Chapitre 4

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Durant le petit-déjeuner royal, Domos était visiblement mal à l'aise. Ses yeux erraient sur la table, évitant soigneusement le regard des autres convives. Il se sentait encore tellement honteux, sale et dégoûtant. En plus de cela, le prince avait endommagé un objet précieux : le carnet de croquis et de symboles de sa mère. Il l'avait toujours chéri et tentait encore de déchiffrer ses secrets. Le carnet, désormais irrémédiablement taché, reposait sur le rebord de la fenêtre de leurs appartements, ses pages déformées par l'humidité. Il espérait que le soleil le restaure du mieux possible. L'homme se demandait si Irusphène avait seulement conscience des dégâts qu'il avait causés.

Tandis qu'il levait distraitement la main pour saisir une pâtisserie, son regard croisa brièvement celui d'Hector. Ce dernier, avec son regard perçant, semblait scruter son âme, devinant peut-être la source de son malaise intérieur.

— Arion, mon fils, comment avancent les préparatifs des épreuves ? dit le roi interrompant l'échange tacite. Sa voix grave résonna dans la salle. À ses côtés, Eléanor, essuyait les lèvres tachées de confiture de son mari avec une serviette soyeuse.

— Tout se déroule à merveille, père. J'ai rencontré le général hier, et nous avons longuement échangé sur les stratégies adoptées lors des épreuves précédentes, répondit Arion, avec l'assurance de celui qui sait ce qu'il vaut. Je suis convaincu que mon espadon suffira amplement à remporter la victoire.

— Bien, acquiesça le roi, tout en jouant distraitement avec un morceau de fromage parsemé de miel.

Un silence pesant s'installa, que Paoulos rompit avec une pointe d'ironie :

— Et nous, père, Calista et moi, ne méritons-nous pas également que tu t'enquières de nos préparatifs ?

Le roi resta silencieux, absorbé par sa dégustation. Josias, lança d'un ton moqueur :

— Vraiment, pourquoi es-tu surpris ? Arion a toujours été le favori de père.

Paoulos riposta avec aigreur, ses traits se durcissant sous l'affront :

— Et toi, que fais-tu de tes journées, à part échafauder des plans insensés et nous importuner à longueur de temps ? Même tenir une simple dague semble hors de ta portée.

Josias haussa les épaules avec un sourire narquois :

— Peut-être, mais au moins, je sais utiliser ma tête. Un talent que vous devriez tous essayer d'acquérir.

Pamela, assise non loin, laissa échapper un rire amusé avant de rétorquer d'un ton sarcastique :

— C'est bien cela le problème, Josias. Parfois, il vaut mieux que tu ne réfléchisses point.

Domos, quant à lui, soupira intérieurement face à cette scène mesquine. Il ne pouvait s'empêcher de penser à quel point cette famille était dysfonctionnelle. Certes, on ne choisit pas sa famille, mais l'on peut toujours décider de forger ou d'ignorer les liens qui nous unissent.

Paoulos planta alors son regard acéré dans celui de Domos, jouant distraitement avec une cuillère en porcelaine, qu'il tapotait doucement contre une tasse. Le rythme régulier des coups évoquait celui d'une horloge, un rappel subtil du temps qui passe. Domos comprit immédiatement.

Son choix avait été motivé en partie, par cette attirance irrésistible qu'il ressentait pour Irusphène. Une attirance qui le mettait mal à l'aise, le rendant vulnérable à chaque regard. Il redoutait le moment où il céderait, où il se laisserait submerger par ce désir naissant. Au début, tout cela semblait sans importance, mais maintenant que ses obligations étaient remplies et que les cargaisons avaient été livrées, plus rien ne l'obligeait à se lier d'amitié avec lui. Malheureusement, il ne pouvait fuir à jamais. Au risque de briser le pacte forgé avec le roi Hourios et s'attirer ses foudres. Il souhaitait juste un moment, un instant auprès des siens; savoir comment son père se portait, aller chasser avec lui, le serrer dans ses bras.

Danse du destinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant