L'INOPINÉ 1- Entre deux réalités

Chapitre VIII (1) : la cérémonie de la guerre interminable : Lady Evanna...

La fin de la guerre interminable était célébrée depuis 2584 et se tenait tous les 2 juillet dans un vaste auditorium du quartier des Affaires. Des représentants de chacune des espèces intelligentes étaient conviés pour accroître l'illusion de paix éternelle. Mais si les immortels se moquaient bien de la guerre, les mortels étaient bien plus sceptiques...

Chaque année, Cécile attendait la commémoration avec impatience car elle pouvait enfin apercevoir des Occamy - certes asservis à l'Ennemi, mais des mortels comme elle. Ce jour-là était encore plus primordial car le Ministre lui avait offert une position honorable et elle allait pouvoir converser avec les émissaires des siens ! Pour lui tenir compagnie, Amandine avait soutiré des sièges à ses côtés pour Nour, Nate, Soan et elle ; elle était soulagée de ne pas se retrouver seule au milieu d'inconnus au rang important.

L'auditorium était déjà rempli aux trois-quarts malgré leur demi-heure d'avance et le bourdonnement des conversations oppressa aussitôt Cécile lorsqu'elle suivit ses amis jusqu'à leurs emplacements, l'obligeant à se concentrer sur sa respiration agitée. Les réservations les plus prisées se trouvaient dans les loges et dans les premiers rangs car elles permettaient d'être plus facilement remarqué par les visiteurs extérieurs. Quant aux places d'honneur, positionnées sur l'estrade elle-même, elles appartenaient à un tout autre registre. Leur prix était exorbitant, si bien que la plupart des heureux élus se la voyaient offrir grâce à leur renommée plutôt que par leur richesse.

Un halo de lumière froide éclairait uniquement le centre de la scène, permettant aux extrémités de rester sombres. Mais lorsqu'Amandine y grimpa, suivie de près par ses amis, des acclamations firent vibrer la salle. Elle se retourna, saluant ses concitoyens avec une aisance qui faisait défaut à Cécile et des sifflements lui répondirent, honorant les enfants de la famille la plus riche de la ville. L'Occamy rentra la tête dans les épaules et tituba jusqu'à un fauteuil orné d'or, réprimant tant bien mal sa panique.

Respire. Tout va bien. Tu es en sécurité.

Sans un mot, Nate lui invoqua un verre et la fraîcheur de l'eau la réveilla suffisamment pour qu'elle puisse chasser les derniers relents de sa crise d'angoisse. Elle articula un remerciement mais son ami était déjà retourné à sa conversation avec Nour, lui rappellant qu'il ne lui avait pas encore pardonné ce qu'elle lui avait dit quelques minutes plus tôt.

Sa place était au milieu des autres sièges d'honneur. À sa droite étaient installés Amandine, Soan, Nate et Nour et à sa gauche, un sorcier au crâne dégarni, un autre à la peau d'un noir profond, une femme au visage saupoudré de tâches de rousseur et un troisième homme, blond. Ils étaient vêtus de leurs plus belles tenues d'apparat alors Cécile songea que ce ne devait pas être n'importe qui ; peut-être des membres du gouvernement ?

En parcourant la foule amassée sur les estrades s'étalant dans l'immense salle, la jeune fille croisa le regard bleu de Clary, qui était installée dans une des loges et elles se sourirent. Sa mère adoptive était vêtue d'une robe de velours blanche et ses cheveux tels le pelage d'un renard dévalaient ses épaules, dégageant son visage en cœur. Une véritable complicité s'était installée entre elles au fil des années. Il lui semblait que Clary avait su combler le vide laissé par le manque d'amour que Dominique témoignait à sa fille ; elle l'avait écoutée et consolée et même si Cécile doutait de son empathie, elle était d'une chaleur rare, surtout pour une immortelle. À ses côtés, Loïc était vêtu d'un costume de haute couture cuivré aux reflets violets et il tenait la main de son épouse, son visage pâle habité d'une tendresse sans limite pour elle. L'Occamy avait toujours admiré leur amour, qui projetait une sorte de bulle apaisante sur elle - surtout que ses parents ne lui avaient jamais paru éprouver un tel sentiment l'un envers l'autre.