Chapitre 12

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La nouvelle année est passée depuis quelques semaines, j'ai repris l'école dans de meilleurs conditions.
Madame Trem nous accueille chaleureusement dans son cours, échangeant des banalités avec les élèves rangés devant. Je m'en préoccupe pas trop. Nous rentrons en classe, je lui lance simplement un regard en guise de bonjour qu'elle accepte. Je m'installe à ma place, celle du 3e rand, près de la fenêtre. Je sors mes affaires et dans le brouhaha j'observe la rue. De légers courants d'air frais sortent de cette fenêtre amochée. Je soupire et observe les retardataires se faire engueuler. Le cours n'a même pas commencé que je m'ennuie. C'est pas mon truc l'SVT et disons que la prof ne fait rien pour rendre sa matière plus intéressante. M'enfin, elle fait que son travail je ne peux pas la blâmer. J'entends de légers chuchotements mais j'y prête pas attention.
- Bon sang ! S'exclame madame Trem. Vous allez m'écouter un peu ? Au lieu de blablater ! Non vous savez quoi ? Allez-si dites moi ce que vous partagez tous.
Personne n'ose prendre la parole, sûrement prit de court par sa soudaine prise de posture autoritaire. D'habitude, elle s'en fiche complètement, il y a toujours un petit groupe qui participe et ça lui suffit. Je balaye des yeux la salle qui est désormais silencieuse.
- Ok, vous voulez pas répondre ? Tout le monde prend 1h de colle.
Des commentaires négatifs se forment, et les élèves sont plus tentés de parler. Surtout une fille, il me semble qu'elle s'appelle Sarah, c'est une semi-intello semi-populaire. Elle lève soudainement la main, pendant que ses copines deviennent rouges de honte.
- Je t'écoute. Réplique attentivement la prof.
- Et bien nous parlons de la rumeur qui tourne dans le lycée.
Madame Trem fait un signe de tête lui disant d'appuyer ses propos.
- Et bien.. un prof sortirait avec une élève.
Mon souffle se coup, mon estomac se creuse. Je suis soudainement attirée par la conversation mais pas pour les mêmes raisons.
Au même instant, le visage de l'enseignante qui était amusée de la situation s'est rapidement fermé.
- Quel prof ? Chuchote-t-elle mais tout le monde l'avait lu sur ces lèvres.
Sarah semble beaucoup plus gênée que lorsqu'elle avait prit la parole. Ah les représailles, ça fait toujours peur.
- Anissa Amona et Madame Hoss il me semble. Déglutit-elle.
La prof acquiesce silencieusement la tête et se remet à son cours. Ma gorge se serre, j'ai grand mal à montrer que ça ne m'atteint pas. Je serre les dents pour empêcher les larmes au coin de mes yeux de couler. Je prends une grande inspiration et plonge ma tête dans mes bras.

Aujourd'hui, j'ai pas eu envie de manger, je me suis juste réfugiée comme à mon habitude dans le couloir. Est-ce que c'est vrai ? J'arrive pas à arrêter d'y penser. Comment des élèves auraient pu savoir ça ? Je soupire. Des bruits de pas résonne dans le couloir. Putain je pensais que tout les profs étaient sortis. Je sers mes jambes contre moi histoire de me faire plus petite. Je penche légèrement la tête pour voir qui c'est. Madame Hoss. Elle se dirige vers les escaliers, très énervée. La rumeur est revenue jusqu'à ses oreilles ? Elle a été convoquée ? Je balaye ces questions d'un signe de tête. Elle claque la porte derrière elle. Au moins je suis tranquille et seule.

C'est mon dernier cours, celui de français avec monsieur Louis. On a une rédaction à rendre pour la semaine pro. Et il a décidé de nous laisser commencer maintenant. Il passe silencieusement dans les rands. Monsieur Louis nous met toujours de la musique classique quand on travail individuellement. Il dit que ça apaise notre esprit et facilite l'imagination. Ça doit sûrement marcher car j'écris sans m'arrêter. Pour une fois, je suis à fond dans mon devoir. Il arrive à mon bureau et je sens son regard se poser sur moi. Avec lui, ça fait longtemps que nous nous connaissions. Il était mon prof en 4e, et le voilà mon prof en terminale. C'est drôle ! Fin je trouve ça drôle. Il m'a vu complètement métamorphosée. La fille sociable, adorable que j'étais qui adorée lire, les poèmes et l'école était devenue la fille insociable, seule, ne calculant plus les cours.
- Je revois la petite fille que j'ai connu au collège. Dit-il un sourire en coin.
Sa remarque m'arrache un rictus doux.
- J'ai peut-être changé mais j'ai toujours les mêmes acquis.
- J'avais peur de vous avoir perdu à jamais. Dit-il en chuchotant de manière à ce que je sois la seule à l'entendre.
Je lui souris et me remets au travail lorsque je le vois partir. J'avais peur de vous avoir perdu à jamais. Cette phrase était sûrement trop sincère. Du moins elle m'est allée droit au coeur. Comme une flèche qui vise au plein centre de sa cible. J'efface ce souvenir pour me concentrer.
La fin des cours sonne, je suis l'une des premières à m'éclipser sans compter sur le désaccord de mon prof.
- Je peux vous demander un service Aline ?
- Oui m'sieur. Réplique-je.
- Apportez ceci au directeur, c'est un projet littéraire à mettre en place pour les secondes. D'ailleurs jetez y un coup d'œil et vous me direz ce que vous en pensez ! Dit-il très enthousiaste.
Je saisis les feuilles qu'il me passe et je lui offre mon sourire.
- Pas de soucis m'sieur. A demain.
- À demain, dans la joie et la bonne humeur !
Je souris face à cette ref qui date de l'époque, quand j'étais heureuse et que mes parents étaient toujours là. Prêt de moi. Je baisse les yeux et m'en vais. J'inspecte les feuilles qu'il m'a donné. Un projet de concours d'éloquence. C'est sympa. Mais je m'inscrirais sûrement pas si ça m'était proposé. J'arrive devant le bureau du directeur et j'entends des voix montés le ton. Je sais pas ce qu'il se passe mais c'est pas mon problème. Je mets mon casque et m'installe sur le fauteuil d'attente mis à disposition. Après une quinzaine de minutes, la porte s'ouvre et des personnes partent, je prête pas attention à qui c'est quand une voix semble exploser derrière moi.
- C'est toi qui a fait tourner la rumeur partout espèce de pute !
Je reconnais très bien la voix d'Anissa en trombe.
- Me mets pas dans tes histoires j'y suis pour rien. Réplique-je froidement.
Je tourne ma tête en direction du directeur qui me salue tout de même malgré l'énervement lisible sur son visage, à ces côtés il y a la même femme qui m'a volé un baiser. Si elle continue à fricoter entre ses élèves comme elle le fait si bien, elle risque de s'accaparer les foudres de la justice. Moi je m'en fou, j'ai 18ans. Anissa par contre en a 16. Voilà toute la différence de nos relations. M'enfin je m'attarde pas trop sur leur stupide entrevu et tends les papiers au proviseur.
- C'est le projet de monsieur Louis, il m'a demandé de vous le transmettre.
- Merci Aline, d'ailleurs il faudrait qu'on se voit tant que j'y pense.
Un frisson me parcours, pourquoi il veut me voir ?
- Rien de bien grave, j'ai juste besoin d'informations. Dit-il en voyant mon visage se crisper.
Je jette un rapide coup d'œil à madame Hoss qui semble avoir louper un battement de cœur. Comme si elle savait que j'étais prête à tout révéler juste pour la faire payer.
- Ok pas de soucis.
- Je te transmettrai une date par la vie scolaire.
J'acquiesce et le salue en guise d'au revoir, je lance un regard noir au deux autres individus. Avant de m'éclipser par la sortie.

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