Zoltan entendait son ami Liam parler, mais il n'écoutait pas. Les paroles prononcées par le jeune homme rentraient dans une oreille pour ressortir par l'autre. Sa seconde amie, une noiraude nommée Sannoë, assise à sa droite, lui donna un léger coup de coude et Zoltan reconnecta soudainement à la réalité. Il était dans le parc à côté du lycée, il venait de finir son premier trimestre de terminale et, surtout, Liam attendait une réponse. Pour quelle question ? Mystère. Alors Zoltan fit ce qu'il faisait toujours dans ces situations : il détourna l'attention.
« Regarde, il y a un marchand de gaufres !
- Heu, Zoltan, ça fait au bas mot trois mois qu'il y a un marchand de gaufres dans ce parc. Rétorqua son amie en haussant un sourcil. Tu sais, il vaut mieux dire que tu n'as pas écouté plutôt que de nous sortir des conneries pareilles. Alors, qui est-ce qui occupe les pensées de notre beau roux ? Qui a donc touché en plein cœur notre ami l'asperge ?»
À côté d'elle, Liam étouffa un rire.
« Qu'est-ce qui te fait dire que je n'ai pas écouté ? Et puis d'ailleurs pourquoi est-ce que j'aurais forcément quelqu'un en tête ?
- Tu as toujours le même air quand tu penses à un garçon, et puis il y a aussi le fait que Liam était justement en train de te demander si ça te tentait qu'on aille acheter une gaufre.
- Dis comme ça c'est sûr que... » Répondit Zoltan, avec un air faussement penaud. Puis il laissa échapper un rire et ses amis le suivirent. Pas qu'eux d'ailleurs, car un petit gloussement s'éleva, timide mais bien présent. C'était celui d'un garçon de leur âge, assis sur le banc d'à côté. Zoltan mentirait s'il disait ne pas l'avoir remarqué, car il était la raison précise pour laquelle il n'écoutait plus ses amis.
C'était un mec du lycée nommé Yaël. Il était en terminale, comme Zoltan. Ce dernier le savait car, depuis la rentrée, le garçon lui avait tapé dans l'œil et il n'arrivait pas à se le sortir de la tête.
Yaël semblait sorti de nulle part avec ses vêtements multicolores, pourtant toujours très classes, et ses longs cheveux bruns tombant en cascade sur ses épaules. Puis il y avait ses yeux, mélangeant le vert, le bleu et le jaune. Quant au détour d'un couloir Zoltan plongeait dedans, il était emporté dans des contrées lointaines, de paix et d'espoir. Les iris de Yaël pouvaient constituer à elles seules une raison de vivre, de se battre, ou de mourir, d'abandonner. Zoltan était persuadé qu'avec ses yeux, Yaël pouvait pousser le monde entier à sauter d'un pont s'il leur demandait. Mais Zoltan était également persuadé qu'il ne leur demanderait jamais, car les yeux sont le reflet de l'âme et que ceux de Yaël ne pouvaient être que le miroir d'une magnifique personne.
Zoltan, perdu dans ses pensées, s'était inconsciemment tourné vers l'objet de ces dernières. Yaël lui sourit avant de détourner le regard et Zoltan se retient de toutes ses forces de s'approcher et de glisser un doigt sous le menton du garçon, juste pour replonger dans ses yeux. Au lieu de ça, il se retourna vers ses amis qui le fixaient avec un grand sourire.
« C'est qui ? voulut savoir Liam.
- Personne. Marmonna Zoltan.
- Parce que ça t'arrive souvent de fixer des inconnus de cette manière ?
- Ce n'est pas un inconnu : c'est un terminal du lycée nommé Yaël ! S'exclama Sannoë. Maintenant je le reconnais.
- Mais parle moins fort Sannoë, il va nous entendre.
- Trop tard. »
Zoltan sursauta en entendant cette phrase, et des milliers de libellules (il les préfère aux papillons) s'envolèrent dans son ventre. Il avait eu le temps d'imaginer des centaines de voix pour son "bel inconnu", mais aucune n'égalait celle qui venait de retentir. Car Yaël s'était levé et, s'étant positionné juste derrière le banc, et donc derrière Zoltan, venait de glisser ces quelques mots à l'oreille, son souffle atterrissant sur le cou du garçon assis devant lui.
« Merde. » Laissa échapper ce dernier.
Yaël eut un rire silencieux dont Zoltan sentit les saccades sur sa peau. Un frisson lui échappa et un léger sourire prit place sur ses lèvres.
« Bon, on vous laisse on va chercher des gaufres. » Les informèrent Sannoë et Liam avant de s'échapper.
Zoltan les regarda partir, hébété, puis se tourna vers Yaël.
« Assis-toi à côté de moi, ce sera plus simple pour discuter.
- Qu'est-ce qui te fait croire que je veux discuter avec toi ? Rétorqua Yaël, un sourire le trahissant.
- Rien. Admit Zoltan. Puis il précisa : Tu n'as juste pas le choix. »
Alors Yaël s'assit. Et ils discutèrent. De quoi ? Un peu de tout, en passant par les cours du lycée, le temps qu'il faisait, une série qu'ils avaient vu et leur famille respective.
Zoltan appris ainsi que Yaël était dans un autre établissement l'année précédente, qu'il adorait la pluie, qu'il avait beaucoup de culture cinématographique, mais seulement quand ça impliquait des couples gays et qu'il avait une sœur aînée, une mère avocate et un père couturier.
Il se perdit à plusieurs reprises dans les yeux de Yaël, ses pupilles attirant son regard comme des aimants. Il plongeait dans un autre de ses voyages à travers les iris du garçon brun quand ses deux amis refirent surface, deux gaufres à la main.
« Vu qu'on ne savait pas ce que vous vouliez on ne vous a rien pris. Fit Sannoë.
- Vous êtes les pires amis de la Terre entière, vous savez bien que j'adore celles à la crème de marron.
- À la crème de marron ? Intervient Yaël. Je n'ai jamais goûté.
- Quoi !? Mais c'est un crime ! Il faut y remédier. »
Et avant que quiconque ne puisse dire quoi que ce soit, Zoltan entraîna son nouvel ami au camion à gaufres.
« Prépare toi Liam, je sens que l'on va être délaissé ces prochains jours pour les beaux yeux de Yaël.
- Bah, ce ne sera pas une grande perte. Souris Liam avec un air désabusé.
- T'es bête ! Rigola Sannoë.
- Mais c'est pour cela que tu m'adores.
- Mais c'est pour cela que je t'adore oui. »
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Parce que je t'aime
RomanceYaël et Zoltan sont tous deux en terminale dans le même lycée. Le premier attire le second, tombé sous son charme à la rentrée. Et ces sentiments n'ont pas l'air d'être à sens unique. Entouré de Liam et Sannoë, ses deux meilleurs amis, Zoltan va vi...