Premier Éveil

35 1 0
                                    

La lumière pâle du matin filtrait à travers les rideaux de la petite chambre, projetant des ombres dansantes sur les murs nus. Harry ouvrit lentement les yeux, son corps encore engourdi par la fatigue. La veille, il avait dansé plus longtemps que d'habitude, cherchant la perfection à chaque mouvement, chaque plié, chaque arabesque. Ses muscles étaient douloureux, tendus comme des cordes trop serrées prêtes à se rompre. Une pointe de douleur familière lui vrillait le ventre, rappel de son combat quotidien contre lui-même.

À côté de lui, Louis dormait encore, son visage paisible encadré par des mèches châtains. Harry le regarda un instant, fasciné par la sérénité qui émanait de lui, même dans le sommeil. Louis, avec son esprit libre, semblait ne jamais connaître le poids des attentes, des contraintes qui accablaient Harry chaque jour. Le poète était un souffle de vent dans sa vie étouffante, une bouffée d'air frais qui, pour quelques heures volées, le libérait de ses chaînes invisibles.

Harry laissa échapper un soupir et glissa lentement hors du lit, veillant à ne pas réveiller son amant. Il se dirigea vers la fenêtre, écartant légèrement le rideau pour regarder dehors. Le monde semblait encore assoupi, comme lui, encore accroché aux rêves de la nuit. Il savait qu'il devrait bientôt se préparer pour une nouvelle journée de répétitions, pour la même danse sans fin de la discipline et de la douleur.

Il jeta un coup d'œil vers Louis, toujours endormi, et se surprit à sourire. Avec lui, les choses semblaient moins lourdes. Ils avaient passé la nuit à se perdre l'un dans l'autre, leurs corps se parlant dans un langage que seuls eux pouvaient comprendre, suivi d'une longue conversation, des mots murmurés à mi-voix, des secrets partagés à la lueur des étoiles. Louis lui avait parlé de son dernier poème, de son rêve d'un monde où l'art serait libre de toute contrainte. Harry, lui, avait écouté, buvant chaque mot comme un élixir rare.

Mais la lumière du jour apportait toujours la réalité. Harry sentait déjà la pression revenir, le tiraillement familier dans son ventre qui lui rappelait qu'il ne pouvait pas rester dans ce cocon de chaleur et de sécurité pour toujours. Il devait retourner à son monde, à ses exigences, à son miroir impitoyable.

Une main douce vint soudain se poser sur son dos, et il sursauta légèrement. Louis s'était réveillé sans un bruit et l'observait avec ce sourire énigmatique qui faisait battre son cœur un peu plus fort.

"Tu pensais déjà à partir, n'est-ce pas ?" murmura Louis, sa voix encore alourdie par le sommeil.

Harry détourna le regard, coupable. "Il faut que je m'entraîne... que je sois prêt pour la prochaine représentation," répondit-il, presque comme une excuse.

Louis se redressa et s'assit sur le bord du lit, ses yeux d'un bleu profond cherchant ceux de Harry. "Tu sais, tu n'es pas qu'un danseur," dit-il doucement. "Tu es bien plus que ça, Harry."

Ces mots flottèrent dans l'air entre eux, remplissant l'espace de quelque chose de doux et de douloureux à la fois. Harry sentit une vague d'émotion monter en lui, mais il la refoula rapidement. Il se tourna vers Louis, un sourire forcé aux lèvres.

"Je sais," mentit-il, avant de s'incliner pour l'embrasser légèrement. "Je reviendrai ce soir... si tu veux."

Louis sourit à son tour, mais avec une sincérité désarmante. "Je veux toujours."

Et ainsi, avec une tendresse rare, Harry se détacha et se prépara à partir, laissant derrière lui le refuge temporaire de cette chambre, et l'homme qui, peu à peu, devenait son phare dans la tempête.

Lorsqu'il franchit la porte, il ne put s'empêcher de se retourner une dernière fois. Louis était là, le regard fixé sur lui, un livre à la main, déjà replongé dans ses pensées poétiques. Harry inspira profondément, puis s'avança dans le jour naissant, prêt à affronter une nouvelle journée... mais avec, en lui, une lueur de plus, une lueur née d'une nuit passée à aimer et à rêver.

À travers les OmbresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant