Entre les lignes

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Louis aimait ces matins silencieux, où les premiers rayons de soleil caressaient doucement la pièce, effleurant les draps encore chauds de la nuit passée. Il se redressa lentement, sentant encore la chaleur de Harry sur sa peau, comme une empreinte délicate laissée sur son corps. Ses doigts effleurèrent distraitement l'endroit où son amant avait dormi, un sourire tendre se dessinant sur ses lèvres.

Il pouvait encore sentir l'odeur de Harry dans l'air, ce mélange de sueur légère et de savon, et quelque chose de plus subtil, plus unique, une odeur qui lui appartenait entièrement. Il se leva et se dirigea vers la petite table près de la fenêtre, là où il laissait souvent traîner un cahier et quelques feuilles volantes. Il saisit une page blanche et, sans trop réfléchir, commença à griffonner des mots, des phrases qui tournaient en lui depuis qu'il avait vu Harry s'éloigner, sa silhouette élancée disparaissant dans le couloir.

Louis écrivait souvent après leurs nuits passées ensemble. C'était comme si chaque moment avec Harry ouvrait une porte secrète dans son esprit, laissant jaillir un flot de pensées et d'émotions qu'il ne savait contenir autrement. Il aimait la façon dont Harry le faisait se sentir vivant, intensément, comme s'il était capable de toucher quelque chose de plus grand que lui-même à travers ce lien fragile et puissant qu'ils partageaient.

Il se souvenait de leur conversation de la veille, de la passion dans la voix de Harry lorsqu'il parlait de la danse, mais aussi de cette ombre dans son regard, celle qui ne le quittait jamais tout à fait. Louis savait que Harry luttait contre ses propres démons, qu'il portait en lui un fardeau lourd, trop lourd pour ses épaules fines et élégantes. Il voyait ces tensions se dessiner dans chaque ligne de son corps, dans chaque mouvement, et cela le faisait souffrir.

Il avait envie de le libérer, de lui montrer qu'il pouvait exister en dehors des contraintes de ce monde exigeant, mais il savait aussi qu'Harry devait trouver son propre chemin. Alors, il lui parlait de poésie, de beauté, d'un monde sans limites, où les corps pouvaient être aimés et acceptés tels qu'ils étaient, où l'art n'était pas une prison mais une libération. Parfois, il voyait une lueur dans les yeux de Harry, un instant de reconnaissance, comme s'il touchait quelque chose en lui, puis l'instant disparaissait, emporté par les vagues de ses doutes et de ses peurs.

Louis soupira et reposa sa plume. Il aimait Harry, plus qu'il ne l'avait d'abord imaginé. Ce n'était pas seulement le désir charnel qui les unissait - bien qu'il y en ait beaucoup, bien sûr. C'était plus profond, plus complexe. Il y avait quelque chose dans la vulnérabilité de Harry, dans sa façon de s'abandonner puis de se refermer soudainement, qui le touchait au plus intime.

Il se leva et se dirigea vers la fenêtre, observant la rue en contrebas. Il savait que Harry reviendrait ce soir, comme il le faisait toujours quand il en avait besoin. Ils se retrouveraient, parleraient encore de tout et de rien, exploreraient encore et encore les méandres de leurs âmes et de leurs corps. Louis vivait pour ces moments, ces heures volées au temps où ils pouvaient être eux-mêmes, sans masque, sans jugement.

Mais aujourd'hui, une inquiétude nouvelle l'habitait. Il commençait à se demander s'il suffisait d'attendre, de rester là, de l'attendre chaque nuit. Il se demandait s'il ne devait pas faire plus, essayer de le sauver de ce monde qui semblait vouloir l'avaler tout entier. Mais comment ? Comment faire comprendre à Harry qu'il était déjà assez, qu'il n'avait pas besoin de prouver sa valeur à travers des performances, des regards critiques, des applaudissements ?

Louis savait que ce n'était pas si simple. Il connaissait la force de l'emprise que le monde de la danse avait sur Harry, ce monde qui l'avait façonné et enchaîné tout à la fois. Et pourtant, il ne pouvait s'empêcher d'espérer. D'espérer qu'un jour, peut-être, Harry verrait en lui ce qu'il voyait déjà - une beauté pure, une âme forte mais brisée qui ne demandait qu'à être réparée.

Il se rassit, son cahier sur les genoux, et commença à écrire un poème. Un poème sur un danseur prisonnier d'un miroir, cherchant désespérément son reflet à travers les autres, mais ne trouvant jamais ce qu'il cherchait vraiment. Un poème sur la liberté, sur l'amour, sur l'acceptation de soi. Il espérait qu'un jour, peut-être, Harry lirait ces mots et y trouverait un peu de la paix qu'il méritait tant.

Mais pour l'instant, tout ce qu'il pouvait faire, c'était attendre. Attendre que Harry revienne, encore et encore, jusqu'à ce qu'il soit prêt à rester.

À travers les OmbresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant