𝓛𝓸𝓻𝓼𝓺𝓾𝓮 𝓭𝓮𝓾𝔁 𝓮𝓷𝓷𝓮𝓶𝓲𝓼 𝓼𝓾𝓬𝓬𝓸𝓶𝓫𝓮𝓷𝓽...
Les Beaumont et les Kingsley sont deux familles rivales depuis des décennies, prêtes à tout pour anéantir l'autre. Sabotages, fausses rumeurs, attaques personnelles et destructions de vi...
La jeune femme devant moi est si effrayante que je lutte pour maintenir mon regard dans le sien, comme si ses yeux verts émettaient des ondes de haine susceptibles de me foudroyer. Affronter quelqu'un qui semble autant mépriser le monde, le craindre et le défier, est difficile. Il est comme un obstacle à son bonheur, un adversaire à abattre pour enfin respirer.
Une telle frustration l'habite. Tant de choses non dites qu'elle garde en elle par crainte de perdre le contrôle, de créer un scandale, de crier sa douleur à ceux qui l'entendent, désireuse de faire taire les voix qui lui ordonnent de tout changer. Mais elle ne fera rien. Ni aujourd'hui, ni demain. Parce que rien ne peut jamais changer.
Perpétuelle. Cette vie est perpétuelle.
Je me retiens de grimacer de douleur en serrant la mâchoire, mes ongles s'enfonçant dans mes paumes tandis que Basia continue de me brosser les cheveux. Nos regards se croisent brièvement, et malgré son sourire apaisant, mon cœur bat toujours la chamade et ma respiration reste saccadée.
La douleur dans ma poitrine est si intense qu'aucun remède ne semble pouvoir le consoler. Tout est si débordant, si intense, que je peine à garder le contrôle, contrairement à mes habitudes. Aujourd'hui, chaque sensation est amplifiée, chaque pensée s'enchaîne si rapidement que je me perds dans un orage de désirs confus.
Ce soir, je ne suis pas aux commandes. C'est mon corps qui mène la danse, et si je ne le reprends pas en main dans les prochaines secondes, ça va très mal tourner.
Tout doit être parfait.
Je ne peux pas me permettre de gâcher ça.
— Tout va bien, Sophia ?
La voix douce de Basia me fait avaler ma salive. Elle me ramène brusquement à la réalité, m'ancrant dans un monde que je reconnais, un contraste frappant avec ce que je devrais connaître. Parmi les schémas de ma vie, elle est la seule personne à me percevoir comme plus qu'un moyen pour atteindre ses propres fins. Plus qu'un instrument, plus qu'une solution : une personne. Une âme. Un être vivant.
— Vous avez l'air préoccupée, remarque-t-elle alors que je reste silencieuse.
Je me mords l'intérieur de la joue et relâche immédiatement mes poings, sentant déjà les marques dans mes paumes.
— Tout va bien, lui assuré-je. Je suis juste un peu stressée.
Elle sait que ce n'est pas si simple. Rien ne peut être aussi facile au sein de notre famille. Les Kingsley présentent toujours une façade parfaite qui ne se fissure jamais. Depuis notre naissance, nous portons un masque que nous ne retirons en aucun cas. Toujours irréprochables, jamais défectueux. Un faux pas pourrait renverser toute la structure, et il n'y aurait rien de pire pour nous que de nous effondrer. Nous ne tomberions pas seuls, mais tous ensemble, entraînant dans notre chute des milliers d'autres.
— Le bleu ou le blanc ? me demande-t-elle en me montrant deux rubans.
Sans hésiter, je pointe du doigt le blanc. Ce n'est pas vraiment une décision rapide, mais plutôt un réflexe, connaissant les préférences de mes parents. Rien ne symbolise mieux la perfection, la pureté et l'élite que le blanc.
Chaque détail compte, même ceux que l'on pourrait juger insignifiants ; ce sont ces détails auxquels il faut accorder une attention particulière. Laisser quelque chose au hasard, c'est prendre le risque de le voir parler à notre place. Notre apparence est sujette à toutes les interprétations, donc nous devons être vigilants jusqu'au moindre fragment.
Ce n'est pas quelque chose que l'on apprend progressivement ; c'est une leçon que l'on intègre après avoir été suffisamment joué par le monde.
À mon âge, je sais que je ne peux plus me permettre de commettre des erreurs. Tout ce que j'entreprends aujourd'hui laissera une empreinte durable jusqu'à ma dernière heure. Chacun de mes pas doit avoir un sens profond, il doit laisser une marque indélébile et me permettre de grandir, de nous permettre de grandir. Car nous ne sommes rien de moins que des légendes.
N'est-ce pas ?
Basia termine rapidement ma coiffure, attachant adroitement une partie de mes cheveux avec un ruban qui retient chaque mèche en place. Elle récupère la brosse, me salue et s'éclipse de ma chambre, déjà pressée par d'autres obligations dans cette demeure. Elle ne connaît aucun répit, surtout pas en un jour comme celui-ci, mais j'aurais souhaité qu'elle en ait.
J'aurais aimé pouvoir échanger avec elle, l'entendre me dire que cette pression que je ressens sur mes épaules n'est que le fruit de mon imagination, que tout se passera bien et qu'il est inutile de m'inquiéter. Même si ce ne sont que des mots réconfortants, j'aurais aimé les entendre et peut-être les croire, ne serait-ce que pour quelques instants afin de calmer les battements douloureux de mon cœur.
Je voudrais pouvoir lui murmurer qu'un jour viendra où je n'aurai plus besoin de jouer un rôle, de prétendre être quelqu'un d'autre. Un jour viendra où tout s'arrêtera et où je pourrai enfin découvrir qui je suis vraiment, derrière ces couches d'apparat.
Un jour.
À mesure que le temps passe, mes doutes sur cette possibilité grandissent. Les pensées se matérialisent de plus en plus comme de simples chimères de mon esprit. Ce que j'imagine ne sont que des rêves, des illusions que je crée pour maintenir ma résilience. Cependant, ces aspirations ne sont pas réelles, et il vaut mieux pour moi ne pas m'y attarder afin de ne pas me laisser submerger.
L'espoir constant me confronte à des désillusions que je préférerais ignorer. Je ne peux pas me permettre de me laisser abattre. Je dois être plus résistante, affronter cette journée comme je l'ai toujours fait ces dernières années.
Je suis prête, je le sais. Tant que je continuerai à m'en convaincre, tout ira bien. Je dois perfectionner mon reflet dans le miroir jusqu'à ce qu'il n'y ait plus que le sourire apparent. C'est à ce sourire que je dois m'accrocher, que je dois arborer pour me protéger du monde qui m'entoure.
Tout ça, je le fais pour mes parents.
Je le fais parce que nous sommes des Kingsley, et que les Kingsley n'ont qu'un objectif en tête.
La perfection.
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N.D.A. : salut tout le monde ! je reviens avec une toute nouvelle histoire qui, je l'espère, vous plaira.
sachez que j'étais tellement pressée de la commencer que j'ai écrit ce prologue juste au moment où je commençais l'écriture de Connexion Étoilée. je l'ai repris quelques mois plus tard, tout en mijotant ce que je voulais qu'elle devienne.
je ne vais pas trop m'attarder, mais j'ai hâte que vous découvriez plus de Sophia, parce que c'est un personnage que j'ai énormément aimé écrire et qui est plus complexe qu'il n'y paraît...
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