Chapitre 4 - Theo

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Mes yeux papillonnent.

Je sors du sommeil lentement, basculant peu à peu d'un rêve dont les contours s'effilochent déjà au bien-être d'un réveil tout en douceur. Les rayons du soleil qui filtrent à travers mes stores baignent ma chambre d'une lumière claire, tamisée. Tourné vers ma table de chevet, je note l'heure machinalement : 10h03. Rien de surprenant : après la nuit que j'ai passée, je me serais presque attendu à ne pas émerger de la matinée.

J'inspire profondément, décidé à profiter de ce moment tant qu'il dure. Une odeur d'orange emplit mes narines : celle de la belle sirène que j'ai ramenée avec moi de la soirée des Zeta Beta Tau. James serait sans doute capable d'en décrire les moindres effluves avec beaucoup plus de précision ; moi, elle se contente de ranimer dans ma mémoire des images des étreintes incroyables que nous avons partagées.

Cette fille, c'était l'un des meilleurs coups de ma vie, c'est indéniable. Voire le meilleur. Rien que d'y repenser, je me retourne, histoire de voir si elle serait prête à remettre le couvert une dernière fois avant de rentrer chez elle...

Mais elle n'est plus là. L'autre côté de mon lit est vide ; seul l'oreiller tout juste affaissé témoigne que quelqu'un dormait là il y a peu de temps encore. Je tâtonne, en vain : décidément, plus trace d'elle. Pas de mot abandonné à mon intention, non plus, ni de bruit qui m'indiquerait qu'elle est en fait dans la salle de bains ou dans la pièce de vie. Avec un grognement, je me décide à me lever pour aller voir, sait-on jamais.

Non : elle a bel et bien disparu, sans me laisser de message. Je devrais m'en réjouir : j'ai traversé suffisamment de petits déjeuners du lendemain gênants pour savoir que la plupart du temps, s'en passer est la meilleure des idées. Surtout quand la fille s'attarde, que j'ai d'autres plans pour la journée et que je n'arrive pas à lui faire comprendre gentiment qu'il est temps qu'elle s'en aille. Au moins, j'ai la certitude que la jolie danseuse d'hier soir était tout à fait honnête quand elle affirmait ne rien rechercher de sérieux, juste une histoire d'une nuit.

Oui, je devrais être heureux que nous soyons sur la même longueur d'ondes... Il n'empêche que je trouve sa disparition un peu brutale. L'alchimie entre nous était exceptionnelle : c'est avec plaisir que je l'aurais explorée davantage. Nous aurions pu échanger nos numéros, par exemple, pour nous revoir à l'occasion. Toujours sans attaches : c'est juste que quelques heures, c'était court pour épuiser toutes les possibilités de nos deux corps.

Bon. C'est ma faute : je ne lui ai pas ouvert cette porte avant que nous sombrions – il faut dire que sur le coup, nous avions mieux à faire que de parler. Vu la manière dont je l'ai prévenue que je voulais uniquement quelque chose de charnel, peut-être s'est-elle dit que je m'offusquerais si elle faisait autre chose que s'éclipser sans un mot ce matin.

Elle est étudiante : nous finirons forcément par nous recroiser sur le campus. Je n'ai pas son nom, je ne sais pas quels cours elle suit, mais je la reconnaîtrai : impossible d'oublier son visage. Je lui parlerai à ce moment-là. Ce n'est que partie remise.

J'hésite à aller me recoucher, mais je choisis finalement d'être raisonnable : quitte à être debout, autant en profiter pour commencer ma journée du bon pied. Je retourne dans ma chambre histoire de passer un caleçon et un t-shirt, puis je récupère mon portable sur ma table de chevet, poussant au passage le bracelet d'amitié orange et bleu qui trône là depuis quelques semaines. C'est Selena, la copine de James, qui s'est motivée à en fabriquer pour tous les Dolphins cet été – sauf que comme je suis un boulet, j'ai cassé le mien au bout de dix jours, lorsque je me suis chauffé pour aller faire du vélo avec Anton et que j'ai malencontreusement traversé un fourré. Ça m'a bien fait chier, parce que j'avais trouvé son geste très cool – alors je l'ai quand même gardé.

J'aime bien que le lien qui m'unit à mes coéquipiers se manifeste ainsi, de manière tangible – comme dans le clubhouse de la piscine où la fresque de dauphin peinte au mur revendique les lieux comme notre espace. La natation, c'est une partie importante de notre vie à tous ; j'en suis fier. Autant le proclamer de toutes les façons possibles, du coup.

Une minute plus tard, je me pose contre le comptoir de ma cuisine – non sans être assailli par de nouveaux flashs de la manière peu conventionnelle dont il a servi hier soir – et je me fais couler un café en consultant mes messages. J'en ai reçu un de Matt, mon meilleur ami, toujours plus matinal que moi :


Alors, cette soirée ?

Les Zeta Beta Tau ont tout donné, comme d'hab, je lui réponds. Les première année étaient super impressionnés. Cela dit, moi, je ne suis pas resté très longtemps. Je suis reparti avec une 10/10, c'était incroyable.


Il ne doit pas être loin de son portable, parce que j'ai bu à peine quelques gorgées de liquide chaud qu'il m'écrit en retour :


Je suis censé être étonné ? Toutes tes soirées se terminent comme ça, non ?

Clairement pas avec une fille aussi bouillante, je t'assure.


Il réagit par trois emojis enthousiastes, et je commente :


Heureusement que je n'ai pas entraînement le dimanche, parce que je suis lessivé, en revanche. Elle m'a vidé. Même toi, tu irais plus vite que moi si on me forçait à nager maintenant.


Cette fois, l'emoji auquel j'ai droit est un doigt d'honneur. L'espace d'un instant, j'angoisse, me demandant si je suis allé trop loin avec ma blague. Mais Matt renchérit, clairement pas vexé :


Merci de me dévoiler ta kryptonite, comme ça j'aurai une chance un jour ou l'autre.

T'es dispo un soir cette semaine ? je lui renvoie, changeant de sujet. Comme ça, tu me rappelleras un peu l'humilité sur la Play ?

Carrément. Mercredi, ça te va ?

Nickel.


Emballé par la perspective, je termine mon café et enchaîne sur une banane, histoire de donner un peu de vitamines et de sucres lents à mon organisme. Ensuite, je m'installe sur mon minuscule balcon avec un manuel de cours : quitte à me résoudre à travailler un peu, autant que ce soit en profitant du beau temps, puisque l'été veut bien se prolonger un peu à Danbury.

Cela dit, il se peut que la chaleur du soleil sur mon visage me rappelle celle de ma sirène sur ma peau... et que je ne sois pas aussi concentré que j'aimerais l'être.


***

Salut à tous ! C'est le lendemain matin, et l'héroïne s'est évaporée... Est-ce que vous en êtes surpris ? Votre curiosité à son propos va bientôt être assouvie : dans le prochain chapitre, nous passerons de son point de vue. J'ai assez hâte de rentrer dans sa tête, j'espère que vous aimerez ce que vous découvrirez !

A très bientôt pour la suite !

Camille Versi

My Sweet SparkleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant