— ... et Ari a répliqué qu'elle serait tout à fait capable de s'en sortir seule, raconte Caliban. Le gars en est resté sans voix.
— Elle a eu raison de s'affirmer, décrète Patrizia. Si elle avait laissé ce type lui marcher sur les pieds une première fois, il n'aurait jamais arrêté.
— Je suis bien d'accord. Mais le pauvre, il ne savait pas sur qui il tombait...
— Ça, c'est clair...
Affalé dans l'un des canapés du clubhouse de la piscine, je n'écoute que d'une oreille la discussion entre mes coéquipiers. Nous sommes vendredi soir, le jour où nous avons pris l'habitude de nous attarder ensemble après l'entraînement ; nous attendons Anton et Lexie qui ne sont pas encore remontés des vestiaires, les exercices du groupe de nageurs de distance s'étant terminés avec du retard. Caliban en profite pour nous parler de la manière dont se passe la rentrée d'Arabella à Harvard. Apparemment, un mec avec qui elle a été associée pour un travail de groupe a tenté de la prendre de haut parce qu'elle vient d'une université peu connue, en se vantant que son père est un avocat influent d'un cabinet new-yorkais au passage. Elle l'a envoyé paître aussi sec, comme il le méritait.
Rien d'étonnant de sa part. Cette fille est assez explosive pour pulvériser la moindre barrière sur son chemin – le plus sage quand on est dans son passage, c'est de s'en écarter. Je ne serais pas surpris si dans trente ou quarante ans, elle était sur les rangs pour devenir notre prochaine Présidente – pas seulement de l'Association des élèves qu'elle dirigeait quand elle était encore à la WestConn, mais du pays tout entier.
Bref. Je ne suis pas très étonné par ce que raconte Caliban, et assez claqué après l'entraînement, alors j'ai besoin de comater un peu là tout de suite, histoire de recharger mes batteries. Je retrouverai ma verve habituelle dans quelques minutes – hors de question que je prive mes coéquipiers de mon incroyable personne pendant toute une soirée. Distraitement, je sors mon téléphone et consulte les notifications que j'ai manquées pendant l'entraînement. Le tour est vite fait : rien d'exceptionnel ne m'attend. Juste une identification de WestConnexions sur Instagram : ils m'ont taggué dans la photo de Caliban, Ernest et moi qu'ils ont prise le week-end dernier. Je l'enregistre dans mes favoris, puis j'entreprends de scroller sur le compte du club : ils viennent de poster en masse toutes leurs images du concert de Whale Deserved. Terry sera content : dedans, il y en a qui en jettent. Il pourra les reprendre pour la com' de son groupe : elles retranscrivent bien l'ambiance que ses amis et lui ont réussi à mettre.
Dans le public, mes coéquipiers et moi ne sommes pas les seuls à avoir été immortalisés dans un portrait : il y a d'autres photos de groupe. Je passe plus rapidement là-dessus, juste un œil rapide, par curiosité. De toute façon, Anton et Lexie viennent enfin de nous rejoindre au clubhouse et...
Un courant électrique me parcourt.
Là, alors que j'allais ranger mon téléphone pour me réintégrer à la conversation générale, une paire d'yeux aux reflets orangés m'a transpercé, sur la toute dernière photo que j'ai consultée. C'est ma danseuse, telle que je l'ai vue ce soir-là, avec son crop top et son sourire ensorcelant. Elle ne porte pas encore la veste d'Evan, et prend la pose à côté de deux amies à elle – la rousse et la fille d'origine indienne avec qui elle était déjà venue à la soirée des Zeta Beta Tau. Je les regarde à peine, l'une comme l'autre : la sirène à leur droite vole toute mon attention.
Je croyais avoir compris la leçon après le bref échange que nous avons eu samedi dernier. Une nuit, c'est tout ce qu'elle était prête à m'offrir. Malgré la dernière bravade dont je l'ai gratifiée, je m'étais résigné. Elle m'a envoyé dans ses archives, et je devais l'accepter. J'ai beau avoir un succès certain auprès de la gent féminine sur ce campus, ce n'est pas la première fois qu'on me rembarre. Ça pique toujours sur le moment, mais je parviens à le prendre avec détachement. Cela ne faisait aucun doute à mes yeux que ce rejet ne serait pas différent. Et peut-être l'aurait-il été, peut-être n'aurais-je conservé de ma danseuse que le souvenir nostalgique de nos heures embrasées, si cette photo n'était pas apparue sous mon regard inopinément.
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My Sweet Sparkle
RomanceLa réputation de Theo n'est plus à faire : fêtard autant que dévoué aux Dolphins, l'équipe de natation du campus, il papillonne de conquête en conquête sans rechercher de relation sérieuse. Ça tombe bien, Honor non plus. Une nuit de plaisir ensemble...