Le p'tit nouveau

9. Terminus ?

Deux jours. Deux jours depuis le baiser avec Eijiro. C'est fou à dire, mais je suis dans une relation. Je ne pensais pas que ces émotions étaient aussi fortes. J'ai juste envie de rester avec lui tout le temps, et de faire comme si tout autour de nous n'existait pas.

Je n'arrivais toujours pas à cerner comment Eijiro pouvait m'aimer. Cela ne faisait que deux jours que nous étions ensemble, et il ne faisait déjà que de me bombarder de compliments et de baisers. Il était si doux avec moi. J'adorais quand il enfouissait sa tête dans ma nuque pour m'embrasser, et quand il passait ses mains autour de ma taille. Son sourire d'idiot me faisait toujours fondre. Les autres n'arrêtaient pas de le charier à ce sujet, mais ça ne le dérangeait pas. Il prenait ça à la rigolade. Il se disait "chanceux" d'être avec moi. Je me sentais en sécurité avec lui.

Après, je savais bien que ce n'était pas le cas. Je ne pense pas qu'être avec moi est une chance. Il ne savait pas tout sur ma santé mentale, et je savais que ce n'était pas une bonne idée de lui dire maintenant. Je ne voulais pas le perdre. Je ne voulais pas l'inquiéter. Je ne voulais pas le faire fuir.

J'avais beau être ravi d'être le petit-copain d'Eijiro, j'avais toujours autant de doutes. Il le voyait. Il le savait. Mais ça ne changeait rien pour lui. Il me disait que c'était normal d'avoir des doutes et qu'il comprenait. J'ai vraiment le petit-ami le plus parfait de cette planète.

Durant l'entraînement de Jeudi, je n'étais pas au top de ma forme. Je n'avais quasiment pas dormi, et je n'avais pas mangé. Je ne l'avais pas dit à Eijiro, mais il l'avait deviné. J'avais du mal. Les autres l'avaient remarqué aussi. Ils y allaient plus doucement avec moi. Je n'aimais pas ça.

J'étais face à Denki. Il faisait exprès de louper ses décharges électriques et de viser à côté de moi.

-Arrête ça. Lançais-je sèchement.

-Quoi ? Qu'est-ce que je dois arrêter ? Demanda-t-il avec un air innocent joué.

-Fais pas genre. Arrête de faire semblant de me louper et bat toi vraiment. Ordonnais-je brusquement.

Le jaune regarda les autres un instant, avant de me regarder de nouveau. Il lacha un soupir en haussant les épaules.

Il braqua ses doigts vers moi, et il envoya une décharge dans ma direction. Je formais un champ de force pile à temps pour barrer la décharge, mais elle commença à ricocher partout à l'extérieur de ma barrière. Comme une sorte de yoyo.  Me voyant en difficulté, Denki envoya une seconde décharge.

Ma barrière craquelait, avant de se briser en mille morceaux et de m'envoyer au sol. J'eus du mal à me relever. Denki avait l'air hésitant, mais il reprit l'attaque. J'essayais de me défendre avec de petites barrières, mais je sentais mes jambes flancher. Mes yeux devenaient lourds, mes mouvements lents, ma respiration ralentie.

En voyant mon état, Denki s'arrêta.

La dernière chose que je vus avant de m'évanouir était Denki qui essayait de ma parler.

Quand je me réveillais, je n'étais pas à l'infirmerie. Non. J'étais à l'hôpital. L'hôpital de Musutafu. Maman était là. Kiohsi et Yasu aussi. Cela devait être une habitude pour eux, maintenant. Eijiro était là aussi. Mr.Aizawa était là lui aussi, son expression toujours aussi neutre et indiscernable.

-Comment vas-tu, ma petite Lune ? Me demanda maman, sa voix toujours posément calme.

-Je vais bien..

-Je m'attendais à rencontrer ton petit-ami dans de meilleures circonstances.. Raconta Yasu.

Eijiro eut un petit rire de malaise.

Aux regards sur leurs visages à tous, je savais qu'ils avaient quelque chose à me dire.

Aizawa poussa un long soupir, avant de me regarder dans les yeux.

-Naoki, on doit te dire quelque chose. Il va falloir que tu quittes Yuei pendant quelques temps.

Mes yeux s'ouvrirent si grand que je crus les faire sortir de leurs orbites.

-Pardon ?!

-Naoki, tu as perdu du poids ces derniers temps. Quand tu es arrivé à Yuei, tu étais presque en sous-poids. Maintenant, tu es officiellement en dessous. C'est trop dangereux. Et... Nous avons trouvé une lame. Cachée dans ton bureau. Tu vas devoir aller dans une clinique spéciale pour les cas comme toi. Annonça Aizawa.

J'eus l'impression que tout s'effondrait. Tout ce que je redoutais devenait réalité. J'avais merdé, une fois de plus. Et si je perdais Eijiro ensuite ? Qu'est-ce que j'allais devenir ?

Après une longue discussion, je fus contraint d'accepter mon sort. Malgré qu'Eijiro me disait que tout allait bien se passer, qu'il serait là pour me rendre visite.. J'étais foutu. Tous mes efforts pour rentrer à Yuei ruinés par ma santé mentale. Tout ça en une journée. Ma mère me rassurait du mieux qu'elle le pouvait, mais ça ne m'aidait pas. Kiohsi et Yasu étaient là, à fixer le sol. Moi, je me sentais plus coupable que jamais. Coupable de les mettre dans cette situation. Aizawa m'avait dit que je pourrais revenir quand ça irait mieux, mais si ça ne va jamais mieux ?

J'étais simplement dans la merde. J'avais toujours repoussé l'aide des autres, par peur de les embêter avec mes problèmes. Je n'avais jamais parlé de ça, car je ne pensais pourvoir tout gérer seul. J'ai souffert en silence, car je ne voulais pas les déranger. J'ai souffert tout ce temps, seul, pour au final finir encore plus isolé. J'avais l'impression d'avoir le gros panneau "Terminus" au-dessus de ma tête. Je n'arrivais pas à sortir un seul mot de ma bouche. Je pensais beaucoup trop. Mais j'avais merdé. Et maintenant, j'en payais les conséquences.

Quelques jours plus tard, il était temps pour moi d'aller dans cette clinique. Mon père avait accepté de payer mes frais, probablement le plus grande attention qu'il m'a porté depuis longtemps.

Eijiro était là pour me dire au revoir. Il m'avait serré dans ses bras si fort. Il m'avait même donné un de ses pulls. Il se disait que comme ça, je pourrais l'avoir en quelque sorte avec moi sans vraiment l'avoir. Après un dernier baiser, je suis monté dans la voiture.

Ma mère, mon frère et ma soeur avaient un visage vide. J'avais l'impression qu'ils pouvaient pleurer à tout moment.

Je me retournais une dernière fois, et j'eus vraiment l'impression d'aller vers le terminus.