Faucheuse en grêve ! | Writober 2024

Des gobelins trop malins - jour 16

Les gobelins, ces petites créatures tordues et malveillantes, avaient toujours été considérées comme la vermine des souterrains. Leur intelligence était limitée, disaient les orcs. Ces derniers, bien plus imposants, utilisaient les gobelins pour des tâches ingrates : nettoyer les entrailles des mines abandonnées, creuser à la recherche de métaux rares, ou tout simplement servir de chair à canon. Mais quelque chose avait changé, dans les galeries sombres de la Mine de Roncegrise. Les gobelins étaient devenus... un peu trop malins.

Tout commença avec Snog, un gobelin à la peau verdâtre et aux dents cassées. Contrairement à ses congénères qui ne pensaient qu'à manger, détruire, et dormir, Snog avait un curieux penchant pour l'observation. Alors que ses frères gobelins s'agitaient dans la fange, Snog s'assit un jour devant une vieille forge abandonnée, oubliée des nains. Des outils rouillés, des plans griffonnés, et des matériaux divers traînaient ici et là. Curieux, Snog commença à manipuler les objets, à les étudier, à essayer de comprendre leur fonctionnement. Ses doigts, habitués à la boue, devinrent peu à peu habiles avec le métal.

Il apprit à forger.

En secret, il fabriqua d'abord un simple couteau, bien plus aiguisé que les lames émoussées des gobelins. Puis, il créa des pièges, des outils d'extraction de minerai, et des armes. Bientôt, ses créations attirèrent l'attention des autres gobelins. L'un après l'autre, ils commencèrent à l'imiter, à abandonner leur grossière brutalité pour s'intéresser à l'art du métal, à la mécanique, et même à des concepts plus subtils, comme la stratégie.

Et c'est là que la menace grandit.

Une nuit, alors que les orcs de la mine festoyaient autour d'un feu, buvant de la bière et se moquant de la faiblesse des gobelins, une série d'explosions retentit dans les tunnels. Les orcs se levèrent en hâte, armes à la main, mais il était déjà trop tard. Le sol trembla sous leurs pieds, et des pièges ingénieux se déclenchèrent tout autour d'eux. Des rochers roulèrent des plafonds, écrasant les plus lourds d'entre eux, tandis que des gorges d'acier, forgées par les gobelins eux-mêmes, s'enroulaient autour de leurs jambes, les clouant au sol.

Les gobelins, jusqu'alors serviteurs méprisés, se redressèrent. Armés de lames parfaitement affûtées et de flèches enduites de poisons, ils déferlèrent sur les orcs avec une précision et une coordination jamais vues chez ces petites créatures. Snog, à la tête du groupe, les menait avec un sourire malveillant.

— Trop longtemps, on a été les larbins !  s'écria-t-il, maintenant, c'est nous qui décidons ! 

Les orcs, surpris et dépassés, tentèrent de riposter, mais pour chaque coup qu'ils donnaient, les gobelins en rendaient dix. Les pièges ingénieux continuaient à tomber sur eux, les faisant trébucher, les immobilisant. La mine de Roncegrise, autrefois le repaire des orcs, devint rapidement un terrain de chasse pour les gobelins.

Ce qui n'était au début qu'une révolte isolée se transforma rapidement en une révolution dans tout le réseau souterrain des mines abandonnées. Les gobelins avaient découvert que l'intelligence, la ruse, et l'ingéniosité pouvaient surpasser la force brute des orcs. Ils utilisaient les anciennes forges naines pour produire des machines de guerre, des armes, et des pièges complexes.

Sous la direction de Snog, ils s'organisèrent. Bientôt, des rumeurs circulèrent dans les royaumes souterrains : les gobelins de Roncegrise ne creusaient plus pour les orcs ou les humains. Ils conquéraient.

La nouvelle de leur montée en puissance atteignit même les royaumes de la surface. Les seigneurs humains, les nains, et les elfes commencèrent à s'inquiéter. Si les gobelins, autrefois insignifiants, pouvaient abattre des orcs, qu'est-ce qui les empêcherait de s'en prendre aux autres ? Ce n'était plus de simples créatures à ignorer, mais une menace grandissante.

Snog, désormais connu comme le Roi des Souterrains, s'installa sur un trône fait de métal récupéré, observant ses créations avec une satisfaction malicieuse.
— Qui aurait cru, murmura-t-il,  qu'un gobelin pouvait devenir roi ? 

La mine, autrefois sombre et silencieuse, était désormais un bastion bruyant, illuminé par les forges et les cris victorieux des gobelins. Les créatures crasseuses avaient peut-être toujours vécu dans l'ombre, mais elles avaient appris à manipuler cette obscurité... à leur avantage.