Chapitre Premier : L'Empire Ancestral - Partie 4

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Dévandra se pressait dans les couloirs tremblants du Palais, elle devait atteindre la salle de l'Ilnatràj au plus vite. À en croire les rapports militaires qu'elle recevait par télépathie, l'attaque était menée par Nakãra en personne. Celle-ci n'avait pas encore traversé la barrière, mais son démon Zaefan, si.

Au bout du couloir, elle tourna à droite, les poings serrés. Dévandra avait toujours su que ce jour arriverait, elle aurait simplement espéré qu'il tarderait plus. Elle porta sa main à son cou afin de saisir son pendentif. Il s'agissait d'un tic qu'elle avait développé au fil des années, un geste machinal qui la rassurait et la rapprochait de son mentor. Mais cette fois elle ne sentit que sa peau nue. Alors seulement, elle se souvint qu'elle l'avait confié à Isis, pour que l'amulette de Kao puisse protéger Mya.

— Kahlaksen, ordonna-t-elle.

La porte qui lui faisait face s'ouvrit avec fracas.

— Mahlaksen.

La pièce se verrouilla et face à Dévandra se dressait l'Ilnatràj, un catalyseur magique créé par les elfes, à-même de transcender les limites de son utilisateur. Il était hasardeux à manier et provoqua de nombreuses morts. À tel point que son utilisation fut proscrite, et tous furent détruits, sauf celui-ci.

Elle s'installa dans le fauteuil de l'appareil et en abaissa le dossier. Elle ferma les yeux. Elle cala ses inspirations sur le flux d'énergie qu'elle ressentait et enfin entra en symbiose avec l'Ilnatràj. La magie afflua, l'air devint électrique, tandis que Dévandra déployait sa puissance. Sa conscience se sépara de son corps et fusionna avec la planète, ressentant chaque vie qui la parcourait. Elle avait vu juste. Zaefan était toujours le seul ayant percé la barrière. Si elle la renforçait suffisamment, il ne pourrait pas fuir, et sa maitresse ne pourrait pas le rejoindre.

Elle ne remarqua pas la brume noire qui lentement envahissait la pièce, ni la silhouette qui se dessina dans les ténèbres. Seul le claquement sourd de talons sur le carrelage la sortit de sa transe, brisant sa connexion avec l'Ilnatràj par la même occasion. Une femme à la longue chevelure de jais se tenait devant elle, souriante.

— Nakãra, siffla Dévandra entre ses dents.

— Croyais-tu sincèrement que ton petit jouet elfique suffirait pour t'opposer à moi ?

Nakãra s'assit dans la brume qui l'entourait.

— Tu n'as jamais été de taille à m'affronter, et ne le sera jamais. Aujourd'hui, Kao n'est pas là pour vous sauver. Ton Empire tombe aujourd'hui.

— Jamais !

Dévandra avait déjà invoqué son épée et chargeait la déesse du Mal. Celle-ci cligna des yeux et des chaînes sortirent du sol, se saisissant en plein vol de la dirigeante de l'Empire.

— Non, non. Nous n'allons pas nous battre ici. Un public est nécessaire. Je veux te tuer devant tes amies, en même temps que Zaefan les tuera devant toi.

Nakãra claqua des doigts, les transportant aussitôt sur la place du Chêne.

— Divertis-moi, Dévandra, dit Nakãra en la libérant de ses chaînes.

La déesse du Mal fendit l'air de sa main droite et une épée noire comme la nuit prit forme. Elle s'en saisit puis feinta une approche sur le flanc gauche de Dévandra pour mieux lui asséner un coup de taille du côté opposé. La dirigeante de l'Empire lut clair dans son jeu, para, et enchaina avec une contre-attaque. Nakãra détourna avec aisance et propulsa Dévandra au loin d'un simple geste de la main. La femme aux cheveux améthyste se volatilisa avant de réapparaitre dans le dos de la déesse. Celle-ci ressenti le déplacement et enfonça aussitôt sa lame dans la tête de l'ancestrale.

— Dévandra ! hurla Isis de terreur.

— Iz, reste concentrée ! la reprit Opalis.

Isis, aidée d'Opalis, dévia de justesse une nouvelle attaque de Zaefan.

Satisfaite, Nakãra avait relâché sa garde alors qu'une nouvelle Dévandra apparaissait derrière elle, tenant dans ses mains un curieux fragment de métal à la blancheur éclatante. Sans attendre, elle poignarda la déesse avec ; sa chair se mit à bouillir autour du morceau de métal alors qu'il disparaissait en elle. Nakãra en lâcha son arme de surprise et porta ses mains à son visage, distordu par un râle terrible.

— Impossible ! s'étouffa la déesse. Où as-tu obtenu ça, sale garce ? Je t'arracherai tout ce à quoi tu tiens avant de te tuer de mes propres mains. Zaefan, pyrej !

L'apparence du démon changea encore. Ses membres s'étaient allongés. Ses muscles augmentés de volume. Sa vitesse était telle que ni Isis, ni Opalis, ne parvenaient à suivre ses mouvements. La puissance décuplée de ses coups les rendait impossibles à parer. Zaefan fendit l'air en avant. Isis esquiva sur la gauche. Mais le démon avait déjà changé sa trajectoire et coupa sa retraite. Il contracta ses muscles et d'un coup précis entailla l'abdomen de la femme. Elle s'effondra au sol. Nakãra poussa alors un nouveau râle :

— La douleur... Elle est intenable. Zaefan, tar.

Aussitôt le démon reprit une apparence presque humaine. La déesse cligna des yeux et ils disparurent. L'Empire Ancestral cessa de trembler et le ciel redevint d'un violet pur. Dévandra était parvenue à forcer leur retraite. Mais à quel prix ? Isis gisait au sol, la respiration haletante.

— Tu vas t'en remettre, pleurait Dévandra. Je vais te soigner, tout ira bien, tu verras

Elle n'avait pas attendu pour placer ses mains sur la blessure de son amie, usant de toute sa magie pour refermer la plaie, arrêter l'hémorragie. Pourtant la vie d'Isis continuait de filer à toute vitesse. Opalis voulut poser une main réconfortante sur l'épaule de Dévandra, mais celle-ci la repousse d'un geste brusque.

— Dev'...

— Tais-toi !

Une intense lumière entoura le petit groupe alors que Dévandra augmentait l'intensité de ses soins. L'énergie vitale d'Isis se stabilisa et la douleur devint presque supportable, mais la respiration restait difficile, alors que ses veines se tentaient de noir.

Les Fresques Ancestrales : L'ÉlueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant