La musique, mélange de violons et de guitares, s'engouffrait dans chaque ruelle comme un appel. Les habitants et les quelques voyageurs de passage participaient presque tous aux festivités.
La nuit n'était pas encore tombée, mais n'allait pas tarder à pointer le bout de son nez. L'air était si frais que Kélima frotta ses mains sur ses bras nus dans l'espoir de se réchauffer. Elle avait à nouveau revêtu la robe à fleurs, mais les fines bretelles n'apportant que peu de chaleur lui firent regretter son choix de vêtement. Debout avec sa sœur, Dreis et Loucas près d'une table, la jeune femme observait les quelques personnes qui dansaient devant l'estrade des musiciens. S'en donnant à cœur joie, ils valsaient, tournoyaient et même sautaient dans tous les sens. Alors que Kélima continuait son observation, une main se tendit juste à côté d'elle. Tournant la tête, prête à repousser une invitation d'un quelconque inconnu, c'est le visage anxieux de Dreis qu'elle rencontra. Surprise, elle ne bougea pas, se contentant de le regarder.
— Tu veux danser ? lui demanda-t-il mal à l'aise.
Sans lui répondre, elle posa sa main sur celle du jeune homme en lui souriant. Rassuré, Dreis lui rendit son sourire. Il entraîna Kélima vers les autres danseurs, posa une main tremblante sur sa taille avant de commencer quelques pas en rythme avec le son enjoué des instruments. Un chanteur au ton badin rejoignit les notes qui emplissaient l'air. Kélima ferma les yeux et se laissa guider par son cavalier. Soudain ce sont les images du bal de l'union qui se dessinèrent dans son esprit. Elle rouvrit les yeux et sa respiration s'accéléra. Son regard fixé sur Dreis, elle ne put s'empêcher de penser à Démerss et à ce moment qu'elle avait échangé avec lui ce soir-là. Les doutes accrochèrent son esprit et elle crut qu'une autre crise de panique allait survenir, mais alors qu'elle commençait à perdre le contrôle, Dreis arrêta leur danse.
— Kéli ? Tout va bien ? lui demanda-t-il inquiet en glissant le dos de sa main sur la joue de la jeune femme.
Le geste de Dreis l'apaisa immédiatement et Kélima hocha lentement la tête. Le cœur étrangement léger, elle l'observa pendant de longues secondes. Et soudain, sans comprendre pourquoi, elle se hissa sur la pointe des pieds, saisit la nuque de l'homme et posa ses lèvres sur les siennes. Il lui semblait que son corps bougeait de lui-même. Lorsqu'elle éloigna son visage de celui de Dreis, celui-ci semblait surpris. Plusieurs curieux les observaient avec de grands sourires, dont Loucas et Camélys, toujours accoudés à la table du buffet. Kélima fit un pas en arrière et baissa les yeux.
— Je ne m'attendais pas à ça... murmura Dreis.
— Je... Je ne sais pas pourquoi j'ai fait ça... chuchota Kélima en retour.
Dreis posa un doigt sous le menton de la jeune femme pour l'obliger à relever la tête et lui sourit tendrement.
— Ce n'est pas grave, lui affirma-t-il en posant son front contre celui de Kélima. Et... Si tu veux faire comme si de rien n'était, ça ira.
— Faire com... Non, je ne... Je ne regrette pas ce que j'ai fait ! s'exclama-t-elle en relevant entièrement sa tête. Je dis juste que je ne sais pas pourquoi je l'ai fait.
Le sourire de Dreis s'agrandit.
— Si tu veux, je peux te donner une raison...
Il saisit délicatement la nuque et la joue de la jeune femme d'une main et l'embrassa à son tour.
La nuit était tombée, Kélima observait les quelques rares derniers danseurs en souriant. Camélys, assise à côté, avait posé sa tête contre son épaule et somnolait. En face des deux sœurs, Dreis et Loucas écoutaient les histoires d'aventures racontées par l'un des villageois. L'homme accompagnait ses mots de gestes, de tours d'illusion et de lueurs en tous genres. Kélima détourna son regard des danseurs pour l'écouter.
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Kélima (2 chapitres par semaine)
Fantasia« Le sang, la haine, la peur... Les images de son passé la hantaient. » Kélima est une jeune sorcière de seize ans, adoptée par le roi de Saeit alors qu'elle n'était qu'une enfant. Sa vie se partage entre ses cours, ses sorties avec son meilleur ami...