7. Surnom

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                                                                                    Lucas



- Tu ne m'as pas dit comment tu t'appelles. C'était perturbant de jouir sans crier ton nom.

Elle me caresse le torse. Les femmes avec qui je baise sont soit des personnes que je connais déjà, soit c'est Christian qui m'en suggère, mais j'avoue que j'ai des dérapages comme cette nuit. Savoir qui je suis ne me dérange absolument pas. Je m'en fiche qu'elle le dise aux médias. Je pense que la dernière fois que j'ai eu peur, c'était quand j'avais fait ma première fois.

Le problème là-dedans, c'est qu'elles peuvent utiliser la capote usée pour se mettre enceinte. J'ai failli me faire avoir avec une femme que j'ai rencontrée quand j'avais 18 ans. J'ai perdu confiance avec les femmes avec qui je couche. De A à Z, tout est contrôlé pour ne pas les mettre enceintes. Je me suis fait avoir une fois, mais pas deux.

- C'est un détail. Tu as été parfaite, chérie.

Je me lève et commence à me rhabiller pour partir avant que le jour dévoile qui je suis.

- Tu pars déjà ? mmmm Je suis super triste.

elle fait la moue 

- Tu peux rester à l'hôtel, le petit déjeuner est inclus.

Je regarde une dernière fois son corps nu et les draps froissés, puis je pars.

...

- Tu l'as payée pour qu'elle fasse un malaise ?

En appel avec Christian, je continue mon footing.

- Absolument pas, elle était toute faible.

- Ce n'est pas ton genre de te montrer devant les médias, mais là, je pense que tu as rendu ton père heureux.

Il rit. Il part de ville en ville aux États-Unis. Il a été pris en photo avec ma sœur qui était de passage à New York. La voir encore avoir un lien avec notre trio me réchauffe le cœur et me rend un peu jaloux, j'avoue. Ça fait neuf mois que je ne l'ai pas vue.

- Je l'ai un peu fâchée, cette femme. Je pense que mon sang royal a voulu se faire pardonner.

À vrai dire, je ne sais pas pourquoi je l'ai rattrapée. Elle est comme un aimant, cette femme aux cheveux blancs. Depuis que je suis dans cette ville, je ne fais que la croiser, elle et ses copines. Cette soirée-là, c'était la reine de la glace, la robe bleue, ses yeux gris... elle peut geler le cœur des hommes, ça j'en suis sûr.

- D'ailleurs, ta sœur m'a dit qu'elle vient à York pour Halloween.

- Je sais, voleur de sœur.

- Je suis le plus cool, en tout cas.

- Tu connais des femmes à York pour un coup d'un soir ? Je reste ici pour quelques mois et j'ai pas envie de m'ennuyer.

- York, j'y vais jamais, mais je vais me renseigner pour toi.

- Ta rupture, ça va mieux ?

- On peut dire ça. Parfois ça va, parfois je repense à elle. Être privé de ce qu'on a le plus chéri pendant cinq ans, je pense que c'est la pire des choses, mais bon...

Je vous l'avais dit, il peut se montrer comme un playboy, mais il a un cœur tellement tendre. Je comprends en vrai son point de vue. Il a découvert qu'il s'était fait tromper alors qu'il voulait officialiser à la couronne, et purée, ça aurait fait le tour de la planète. Le peuple attend un mariage, et c'est aussi sacré chez nous. Christian voulait que ce soit elle, rien qu'elle.

- Tiens bon, tout va s'arranger, et en tout cas j'ai hâte de te voir à York.

Il rit.

- D'ici là, j'espère que tu nous feras une visite guidée. Je vais devoir te laisser.

Sans même dire un mot, il raccroche. Trou du cul. Je finis ma course, la nuit commence à tomber, le ciel est rose, le monde commence à partir. Ce qui est bien ici, c'est qu'avec un simple sweat et une casquette, je peux être invisible.

Je continue de marcher. J'entends le bruit du train passer à 100 mètres de moi, ma faiblesse, ma seule putain de faiblesse. Malgré que ce soit un coup terroriste, ma mère est morte, et j'étais près d'elle, tout ça pour un maudit voyage royal. Elle ne méritait pas de mourir. Elle était la mère d'un peuple et ma mère aussi. Sa mort m'a tué aussi. J'ai découvert la réalité où je vivais, cette atmosphère sombre où seule l'image compte. Même si notre maman meurt, t'es obligé de ne pas pleurer parce que tu devras foutre ton cul sur un trône, marcher une heure derrière son cercueil alors que tu venais à peine de sortir de l'hôpital. C'est là où j'ai compris la phrase : « Le roi est mort, vive le roi ».

- Vous allez vous faire écraser, monsieur !

Je me sens poussé, je reprends mes esprits. C'est vrai, j'étais au milieu de la route.

- Merci.

Je regarde la personne, mais c'est une femme à la chevelure blanche qui me regarde elle aussi.

- Vous ?

- Vous ?

- Vous me suivez ? J'avoue, j'accepte vos excuses.

- Ha ha ha, franchement, pourquoi j'aurais fait ça ? En fait, je l'aurais fait, mais si cette personne n'était pas arrogante.

Je souris, mais elle fait quoi dehors ? Elle devrait rester chez elle, elle est encore malade. Je regarde comment elle est. Malgré sa peau déjà pâle, elle l'est encore plus qu'avant.

- À cette heure-ci, ce n'est pas très recommandé de sortir.

- AH, parce que vous maintenant, vous me donnez des conseils ?

- Vous ? Tu n'as pas dit que tu ne me vouvoyais plus ?

Je m'approche d'elle, je la vois reculer. On joue à ce petit jeu, mais son agilité prend le dessus et casse cette chaîne qui s'était créée.

- Ton sang royal n'a rien à voir avec mon vouvoiement. Mon père m'a toujours dit d'être polie, même quand les personnes sont des connards avec un taux élevé de narcissisme.

- Très drôle, ton père a peut-être raison, mais je ne suis pas n'importe qui.

- Ah bon, qui ?

- Ton sauveur.

- C'est la meilleure, ça. Tu veux que je m'incline, que je fasse une statue de toi et que je te prie ?

- C'est excitant, ça.

Elle roule des yeux.

- Ah oui, n'oublie pas, demain je vais bien te regarder et je vais bien te faire chier. Hmmm, ton prénom ?

- Oh, sale pervers !

- Ton prénom ?

- Pourquoi ?

- Pour faire des recherches et trouver un clown. Nan, mais ton prénom, c'est quoi ?

- C'est plutôt ça qui est excitant.

- Allez, dis-moi ton prénom, sinon je vais t'en inventer un.

- Non.

- 1...

- Mais ça ne marche pas comme ça. Tu as l'habitude d'avoir tout ce que tu veux, mais je vais te dire un truc : j'avais aussi ce que je voulais, jusqu'à ce qu'un jour je n'aie plus rien. Et tu sais quoi ? Tes petites menaces, tu sais bien où te les mettre.

Elle part en arrière.

- Ah, et c'est à toi de t'excuser en premier. Au revoir, pervers inconnu.

- Tu t'es trompée, c'est belle inconnue.

Elle fait un doigt en traversant.

- On se reverra vite, ma reine des glaces.

Je la vois partir de plus en plus, la laissant disparaître au loin. De mon côté, je décide aussi de partir, laissant un petit pansement de la rejoindre et de l'accompagner. Je ne sais pas, d'ou sort  ce besoin soudain d'être auprès de cette ingrate aux cheveux blancs.

The Red IceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant