Chapitre 9

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Léonor

Il fait complètement nuit lorsque, cachées discrètement dans la cuisine, Aimée et moi cuisinons. Je n'arrivais pas à dormir et Aimée jouait tranquillement dans sa chambre avec ses poupées, n'ayant elle aussi visiblement pas sommeil.

Alors, étant donné que demain c'est l'anniversaire de mon grand-frère, nous avons décidé de lui faire des biscuits que je pourrai glisser discrètement dans mon panier lors des courses. Seulement, ça fait deux tentatives que j'essaye de cuisiner correctement. La première fois, la pâte était aussi dure qu'un caillou et la dernière fois, les biscuits ont brûlé dans le four.

Je n'ai jamais été doué en cuisine comparé à Jane qui excelle dans ce domaine.

"C'est quand même super bon avec de la confiture à la myrtille."

Les mains dans la pâte, essayant de faire des formes de cœur, je relève mon regard vers Aimée. Assise sur le plan de travail, elle mange les restes de biscuits qui ont cramés. Du moins, elle picore les bouts qui ne sont pas trop noirs.

"Tu me dégoûtes." je lui dis en souriant.

Elle hausse les épaules, les joues tachées par de la confiture.

Nous ne sommes que toutes les deux; aucun soldat ne nous a suivis, pas même Eugène qui me suit d'habitude comme un chien.

Voilà déjà une semaine qu'ils sont présents autour de nous comme des rapaces; la plupart des femmes se sont habituées à leur présence mais les autres, comme moi, ont toujours du mal à les entendre dans notre dos. Surtout lorsque l'un d'entre eux n'arrête pas de me lancer des pics. Son pain de la paix n'a pas réellement fonctionné; et puis d'ailleurs, ce n'était même pas lui qui l'avait fait.

Ce n'était que du vol.

"Tu es certaine que tu vas le voir demain?" demande Aimée.

" - Je ne sais pas. Normalement il vend le fromage de nos parents.

- Mais est-ce que tu crois que les soldats te laisseront le voir?

- Ils sont juste là pour notre sécurité. Ils n'ont pas intérêt à m'interdire de l'approcher. La dernière fois, j'ai pu le serrer dans mes bras."

Elle baisse les yeux vers les coeurs que je remplis de confiture de myrtilles. C'est déjà le deuxième pot que j'ouvre.

"J'aimerai revoir ma famille moi aussi."

J'arrête de mettre de la confiture et appuie mes mains recouvertes de farine contre le plan de travail, me redressant.

"Je suis désolée Aimée."

Elle sourit faiblement, haussant des épaules.

" - Ce n'est pas grave, vous êtes devenus ma famille.

- Mais nous ne sommes pas ta vraie famille.

- Ma famille n'en était pas réellement une."

Aimée n'a jamais été aimée par ses parents. Elle était une esclave, née pour les aider dans leur travail et pour soigner la maison lorsqu'ils partaient. Elle n'a jamais reçu un signe de tendresse et d'amour. Le fait que le prophète l'ai choisi peut être une bonne chose, car ça l'a aidé à sortir de cette famille, mais au contraire ils l'ont détesté pour l'avoir abandonné.

"Je sais..." je murmure.

Elle se penche, plantant son doigt dans le pot de confiture avant de le lécher. Je lui tire la langue sous son rire. Mais, au même moment, la porte s'ouvre grandement. Nous sursautons, nous retournant en même temps vers l'entrée de la cuisine.

L'aube de la véritéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant