Chapitre 9 (Joshua)

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Je déteste la cafétéria. Le bruit qui y règne est assourdissant, surtout à l'heure du déjeuner. Les petits-déjeuners et les dîners sont plus calmes, la population pas encore réveillée ou blasée de sa journée. J'attends mon tour dans la file en silence, les yeux rivés sur le plateau bleu pâle autour duquel sont refermés mes doigts. Je piétine sur place, avançant de quelques centimètres sur le sol carrelé lorsque le détenu qui me précède récupère son assiette. Aujourd'hui c'est samedi, et nous avons droit à des frites et du poulet à la crème. L'odeur qui se dégage du plat principal est moins ragoûtante qu'à l'accoutumée et je distingue même quelques champignons dans la sauce. Mon estomac gargouille instantanément et je m'autorise même un dessert en remarquant des petits pots de mousse au chocolat. Visiblement, c'est jour de fête aujourd'hui. La plupart du temps, la bouffe est limite. Pour ne pas dire ignoble. Les quantités sont insuffisantes pour un type comme moi qui, avant d'être enfermé ici, passait plusieurs heures par jour à faire du sport et à suivre un régime alimentaire strict, tant en quantités, qu'en calories et en régularité. Parfois, comme aujourd'hui, les repas sont plus copieux et plus tentants. Souvent le samedi ; comme un cadeau que les cuisines nous feraient pour ne pas qu'on perde la boule et qu'on trouve le courage de survivre à une nouvelle semaine.

C'est seul que je m'installe à table. Ces dernières sont disposées de manière linéaire de parts et d'autres de la pièce, en des tablées de dix personnes maximum. Certains détenus se réunissent durant les repas, observant les autres d'un air menaçant, et d'autres, tels que moi, se contentent de ne pas faire de vagues en s'installant en bout de table et en fixant leur plateau. M'isoler est la seule manière que j'ai trouvée de me protéger. Je ne me trouve pas dans l'une de ces prisons les plus craignos du pays, mais ça reste une prison. Des détenus louches, fêlés et peu fiables s'y trouvent et je n'ai aucune envie d'être mêlé, de près ou de loin, à leurs histoires. Je me réveille le matin, prends mon déjeuner, travaille à la laverie et profite parfois de mon temps libre pour courir à la salle de sport, et ça me suffit. Les moments où je me retrouve seul dans ma cellule – par chance, individuelle – sont ceux où je me sens le plus en sécurité. Je n'ai confiance en personne, ici. C'est donc seul que je savoure mon repas. Cette fois, en raison du goût agréable de ce qui nous est proposé, je prends le temps de manger. La douceur de la crème, la tendreté du poulet et le sel des frites me font frémir les papilles. C'est bon. Et cette mousse au chocolat, forte bien que trop légère à mon goût, m'arrache un sourire. Comme les cafés que me porte Preston lors de nos entrevues, cette mousse est comme un câlin au coeur. C'est donc avec ce dernier un peu plus léger que je quitte le self et rallie ma cellule, non sans traîner des pieds, à la fois heureux mais peu enthousiaste à l'idée d'y retourner.

— Young.

Deux coups sont frappés contre la porte de ma cellule, une dizaine de minutes après y avoir été renfermé. Je me lève de mon lit et attends qu'un maton la rouvre. Je tombe nez à nez avec Bobby.

Hidden TiesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant