Avertissement : Ce chapitre comporte des passages très explicites, mais sans aucune vulgarité.
Guy de Gisborne rentra à son tour au château lorsque la nuit commençait à tomber. Une fois de plus, il avait été ridiculisé par Robin et sa bande. Une fois de plus, le Shérif le rendrait responsable de tous ses problèmes. Une fois de plus, une fois de trop, Lady Marianne avait rejeté sa demande en mariage à peine déguisée en offre d’une profonde et fidèle amitié. Frustré, hors de lui, il pénétra dans ses appartements et claqua la porte, non sans avoir ordonné à ses gardes de ne le déranger sous aucun prétexte. Guy n’avait pas le courage, ni l’envie d’affronter la colère du Shérif dans l’immédiat. Il voulait avant tout calmer la sienne. Il arpenta la pièce de long en large, d’un pas vif, pour essayer de calmer le volcan qui grondait en lui, mais en vain. Sa colère n’était toujours pas retombée. Il le savait, il n’y avait qu’une chose qui pouvait apaiser sa fureur un tant soit peu dans ces cas-là. Une lueur mauvaise dans les yeux, Gisborne quitta ses appartements sous le regard blasé des gardes, qui en avaient vu d’autres.
Il longeait le couloir, normalement désert à cette heure, quand tout à coup, il aperçut au loin une silhouette familière s’avancer vers lui. C’était Marie, l’une des nombreuses domestiques du château. Elle était aussi sa maîtresse, ou plutôt, il se servait d’elle pour assouvir ses pulsions animales lorsqu’il en avait envie. Elle venait également d’apercevoir l’homme qui venait à sa rencontre. La peur commença à l’envahir peu à peu, mais elle ne pouvait pas fuir. Il était le maître ici et elle devait lui obéir.
Pourtant, il lui arrivait d’être bon avec elle. Parfois, Gisborne lui offrait même des petits présents, comme un ruban pour ses cheveux ou une corbeille de fruits. Une fois, une seule fois, il avait voulu lui donner de l’argent. Marie avait catégoriquement refusé, sans se préoccuper qu’elle pouvait payer cher le fait de lui désobéir. Elle l’avait supplié de lui laisser le peu de dignité qui lui restait. Elle ne voulait pas passer pour une moins que rien ou pire, pour une catin. Curieusement, il n’avait pas insisté. Elle avait eu l’audace de lui tenir tête et cela n’était pas pour lui déplaire. Et, coïncidence ou non, elle n’avait plus jamais été inquiétée par les gardes du château, qui prenaient un malin plaisir à tourmenter les domestiques, en particulier les jeunes et jolies femmes comme elle. Il avait dû donner l’ordre qu’on ne la touche pas.
Marie ne savait jamais à l’avance comment allaient se passer leurs entretiens, si l’on pouvait appeler comme cela les furtives étreintes quelquesfois charnelles, souvent bestiales, qui se déroulaient toujours dans les appartements de Messire Guy. Parfois, il lui arrivait d’être doux avec elle, tendre même, mais il pouvait aussi être brutal, surtout lorsqu’il était en colère. Et ce soir, il l’était, Marie le sut dès qu’elle arriva à sa hauteur.
Elle s’arrêta, lui fit la révérence et s’apprêta à continuer son chemin en espérant qu’il la laisserait partir sans l’avoir touchée. C’était tout d’abord son intention, car Marie ne faisait pas partie de ses plans. Mais brusquement, Gisborne changea d’avis. Elle s’apprêta à repartir lorsqu’il la stoppa net en lui attrapant le bras. Elle ne pouvait donc pas y échapper, aussi se résigna-t-elle en espérant qu’il ne se montrerait pas trop brutal cette fois-ci, compte tenu de l’état dans lequel il se trouvait.
Marie était prête à le suivre dans ses appartements, mais il ne bougea pas d’un pouce. Elle comprit alors qu’il voulait faire cela ici même. En tremblant, elle commença à délacer son corsage, mais Gisborne voulait tout autre chose cette fois-ci. Il recula de quelques pas et, tout en s’adossant au mur, il lui ordonna de s’approcher. D’un bref signe de tête, il lui fit comprendre ce qu’il attendait d’elle. Elle n’eut pas d’autre choix, elle devait lui obéir, même si ce qu’il exigeait d’elle la répugnait. Elle allait donc faire en sorte que cela soit rapide, qu’il prenne son plaisir et qu’ensuite, il la laisse enfin partir. Elle se mit à genoux devant lui et commença à défaire les lacets de son pantalon, en évitant soigneusement de lever les yeux sur lui. Elle ne voulait pas lui donner la satisfaction de voir que c’était contrainte et forcée qu’elle faisait cela. Froidement, Guy la regarda faire, mais lorsqu’elle le prit dans sa bouche, une toute autre lueur traversa son regard et il ne put retenir un gémissement rauque de sortir de sa gorge. Il passa une main derrière la tête de la jeune femme, sans même prendre le temps d’enlever son gant. Il voulait qu’elle le goûte davantage. Les yeux clos, il s’imaginait que c’était la bouche de Marianne, les lèvres de Marianne, la langue de Marianne qui lui donnaient du plaisir. Dans un souffle, il prononça son nom, mais sa voix n’était qu’un faible murmure qui se perdit dans le silence de la nuit. Ses doigts se crispèrent dans les cheveux de Marie lorsque enfin, il jouit. Il attendit quelques instants que sa respiration reprenne un rythme plus lent puis, sans un mot, il la congédia. Elle partit aussi vite qu’elle put, sans se retourner. Tout en se rhabillant, Gisborne réalisa que loin de l’apaiser, ce bref moment de plaisir avait augmenté sa colère et sa frustration.
