Chapitre 4

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- Mais dis-moi au moins à quoi elle ressemble !

Loki protestait depuis des heures, en essayant de glaner quelques informations sur la femme à qui on allait le confier. Enfin, du moins jusqu'à ce que je m'échappe, songea-t-il avec un sourire intérieur.

- Tu verras.

Sif l'envoya paître, comme à chaque fois qu'il lui posait une question. Elle l'entraîna dans un dédale de couloirs du palais, avant d'arriver aux écuries. Elle avait posé sa main dans son dos dans un geste de fausse amitié, mais ses doigts étaient négligemment appuyés contre ses cervicales. C'était sa façon de le prévenir « Si tu bouges, j'appuie ».

Elle le relâcha le temps qu'il monte à cheval, et ils parcoururent ensemble la ville au trot. La plupart des gens s'esquivait le plus vite possible en voyant Loki. Il adorait voir la lueur de peur dans leurs yeux.

Sif l'observait silencieusement. En parvenant au Bifröst, ils descendirent de cheval à son commandement, continuèrent à pied.

- Pourquoi marche-t-on ? interrogea-t-il.

- C'est bon pour la santé.

- Ce n'est pas la seule raison.

Sa phrase sonnait comme une affirmation.

- En effet. J'ai deux ou trois choses à te dire. Et puis, nous sommes en avance.

Il voulut croiser les bras, comme à son habitude, mais, retenu par ses chaînes, il n'en fit rien. Il poursuivit sa marche comme si de rien n'était. Sif inspira profondément.

- J'ai toujours l'impression de faire une énorme erreur, mais je suppose que c'est trop tard.

En tournant la tête vers elle, il nota le diadème qui était apparu dans ses cheveux depuis la veille.

- Votre Majesté, siffla-t-il, légèrement surpris (et un peu jaloux aussi).

Elle sourit.

- Thor a abdiqué en ma faveur.

- Il devait être malade.

Elle ne répliqua pas, reprit plutôt là où elle s'était arrêtée.

- Tu vas donc être au service de la reine d'Arendelle jusqu'à ce qu'elle juge que tu t'es amendé. Ce qui implique de lui obéir totalement. Elle pourra nous faire signe si quelque chose se passe mal, auquel cas tes heures sont comptées. Et je passerai personnellement vous rendre visite de temps en temps.

Elle fit une pause pour le laisser digérer les informations.

- Autre chose, tu seras son tuteur.

Il marqua un temps de pause.

- En quel honneur ?

- On va dire que ses capacités magiques sont à peu près équivalentes aux tiennes, en version incontrôlée.

Il grimaça intérieurement. Il avait pris en compte la variante que sa nouvelle gardienne possède de la magie, mais il n'appréciait pas cette éventualité. Il vira aussitôt le plan A qu'il avait élaboré, et glissa directement au C. Le B ne risquait pas de fonctionner.

- C'est tout ?

- C'est tout de mon côté. Elle t'expliquera le reste à sa façon.

- Et pourquoi donc ?

- Parce que nous sommes arrivés.

Elle avait raison. Il aperçut la silhouette dorée de Heimdall, le dieu gardien de la porte inter-dimensionnelle. Celui-ci les laissa passer sans piper mot, mais gratifia Loki d'un coup d'œil menaçant. S'il croît me faire peur...

- Où est Thor ? demanda Sif.

- Déjà parti.

- Je lui avais dit de m'attendre !

Heimdall fit un geste d'impuissance. La femme poussa son prisonnier dans le passage, et s'y engagea à sa suite.

§.§.§.§.§.§

Ils atterrirent souplement sur leurs pieds. Loki détailla le comité d'accueil rapidement. Il y avait deux filles, une rousse et une blonde, un homme qui ressemblait de manière flagrante à Thor, sauf qu'il avait les yeux marron, un renne, et un... bonhomme de neige ?

- Bonjour ! les salua ce dernier d'un air joyeux. Je m'appelle Olaf !

Dans quel monde de fous suis-je tombé ? Sif regardait l'assemblée comme si elle avait vécu là toute sa vie, et Thor paraissait un peu étonné. La blonde en face soupira.

- Je suppose que c'est lui ?

La question s'adressait principalement à la future reine d'Asgard. Loki se mordit les lèvres pour ne pas lâcher de commentaire inapproprié et faire voler le plan C en éclats. La brune hocha la tête avec une sorte de lassitude.

- Enlevez-lui ça, ordonna la reine en pointant les menottes du doigt.

- Je vous demande pardon ? se récria Thor.

- Enlevez-lui les chaînes, s'il-vous-plaît, répéta-t-elle en détachant chaque mot.

- Et pourquoi donc ?

Oui, pourquoi ? Le concerné se retint d'y mettre son grain de sel.

- Premièrement, parce que vous êtes dans mon royaume, et c'est donc moi qui commande ici. Deuxièmement, parce que si vous ne le faites pas, je le ferai moi-même, et troisièmement, parce que, de toute façon, les chaînes n'ont jamais aidé qui que ce soit à retrouver la bonne voie. Et je sais de quoi je parle.

Le fils d'Odin écarquilla les yeux. Après avoir enfin digéré qu'une mortelle s'adressait à lui de cette façon, il sortit la clef, et libéra son frère.

Loki observa la femme qui se comportait avec tant d'autorité naturelle. Elle avait de magnifiques yeux bleus, couleur glacier, et des cheveux blonds presque blancs. Dans son port de tête altier, il devinait qu'elle avait eu une éducation royale.

Dès qu'il fut libre, il se rangea aussitôt dans la troupe d'en face, juste à côté de la jeune reine. Il se permit même de déposer un léger baiser sur le dos de sa main gauche.

- Majesté, je vous suis reconnaissant de votre grâce, ajouta-t-il.

Thor secoua la tête, incrédule.

- Je peux savoir ce que tu fais ?

- Je me conduis poliment, pas comme un rustre blond de ma connaissance, lui répliqua-t-il.

C'était un test. Il cherchait à savoir deux choses. Et il les obtint toutes les deux.

Ledit rustre blond grogna. Il n'arrivait pas à comprendre pourquoi il ne l'avait pas tué dès le départ. Tu le considères comme ton frère, et tu l'aimes pour ça, murmura une petite voix en lui. La ferme ! lui intima-t-il. Le marteau quitta sa main dans un geste fluide travaillé depuis des années pour filer vers la tête de Loki.

§.§.§.§.§.§

Elsa réagit instinctivement.

Un mur de glace géant, haut de près de cinq mètres, se forma soudain entre les deux camps. Mjöllnir le percuta avec un bruit qui fit tress aillir tous ceux qui étaient présents.

Le marteau tomba à terre.

Le mur n'avait pas cédé.

Pire encore. Ou peut-être mieux ?

Il n'était même pas fendillé. Totalement intact. Pas une seule fissure, pas un seul craquement.

La reine sentit confusément la surprise de tous les spectateurs. Particulièrement celle des Asgardiens. Ses oreilles tintaient. Elle avait l'impression d'avoir dépassé ses propres limites.

Soudain, elle sentit... elle sentit comme si quelque chose s'était rompu en elle. Un son cristallin qui venait de l'intérieur d'elle-même, qu'elle fut la seule à percevoir.

La douleur déferla en elle, comme une vague rugissante et destructrice. Elsa cria. Se plia en deux, avant de tomber au sol, inanimée.


Les Ténèbres dans nos Cœurs / Partie 1 : Love above the realmsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant