Chapitre 1.

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« Si l'on est différent, il est fatal qu'on soit seul. »

Aldous Huxley


- Attention, voilà Satan !

Une journée normale au lycée Franklin de Paradise. Le brouhaha dans les couloirs, les portes des casiers qui claquent, les profs qui boivent du café.

Lily traversa la nuée d'élèves en regardant droit devant elle, ignorant comme chaque matin les remarques balancées à son passage. On la regardait comme si elle était un monstre. Et ça durait depuis plusieurs années. Elle se dirigea vers son casier où des messages avaient encore été laissés, nonchalamment scotchés et écrits sur des feuilles de papiers à carreaux. Elle arracha le tout d'un seul geste et les jeta dans la poubelle à sa droite. Elle déverrouilla la porte en métal. Il y avait aussi des petits messages à l'intérieur. Sorcière. Va te faire exorciser. Et d'autres bêtises du genre. Elle soupira et s'en débarrassa comme par automatisme. Elle prit quelques bouquins, les affaires dont elle avait besoin pour son premier cours et claqua la porte de son casier.

Les gens la regardaient de travers, la toisant comme un parasite. Les commentaires assassins fusaient dans tous les sens tels une cacophonie disgracieuse. Mais Lily avançait sans se soucier de leurs insultes. Arrivée devant sa salle de classe, elle frappa à la porte pour attirer l'attention du professeur. Il leva les yeux vers elle et lui adressa un petit sourire.

Monsieur Anderson n'était pas un enseignant modèle. Son passé le suivait de très près et on sentait qu'il avait eu du mal à lâcher son look. Il avait de longs cheveux noirs retenus dans son dos par un élastique. Des piercings ornaient son oreille gauche et un tatouage étrange lui décorait l'avant-bras. Malgré cela, il portait de grandes lunettes carrées qui lui donnaient un air sérieux. Il s'habillait toujours avec des chemises blanches impeccablement repassées, d'ailleurs il sentait l'assouplissant. Les parents trouvaient ce jeune prof de littérature et de philosophie peu sérieux, alors qu'il faisait un travail remarquable et qu'il intéressait beaucoup les élèves. Enfin, pas dans leur intégralité. Mais Lily faisait partie de ceux qui l'appréciaient.

- Tiens, Mademoiselle Turner, vous êtes en avance ! fit-il remarquer de sa voix grave.

- Je voulais vous rendre ma dissertation, je l'ai terminée hier soir, annonça la jeune fille en avançant vers lui, sa copie tendue devant elle.

Il lui sourit et parcouru les premières lignes d'un œil rapide. Il déclara qu'il la lui rendrait corrigée dès que possible. Lily alla s'asseoir à sa table, au premier rang. Elle aimait cette place. D'abord parce qu'elle voyait mieux le tableau, ensuite parce qu'elle n'était pas dérangée par les bavardages des autres. D'ailleurs, les autres, elle ne pouvait pas les voir, ils étaient tous dans son dos. Son regard était sans cesse fixé devant elle, collé au prof, alors qu'elle l'écoutait attentivement.

Lily s'installa en silence pendant que les autres élèves arrivaient petit à petit, saluant Monsieur Anderson au passage. Un de ses camarades donna un coup de pied dans son sac en passant près de sa table et elle dût retenir un juron. Elle se leva pour aller ramasser ses affaires. Le prof fit une réflexion à l'élève mais celui-ci riait, fier de lui. Lily lui jeta un regard noir et il cessa de rire. Tout du moins, ses esclaffements se firent de moins en moins sonores, jusqu'à presque s'éteindre. Satisfaite, elle s'assit de nouveau, prête à suivre le cours quand la sonnerie résonna dans le bâtiment.

- Bien jeunes gens je vous prie de vous taire maintenant ! Sortez vos bouquins !

En ce mois de novembre, les élèves de la classe de Seniors B étudiaient Edgar Allen Poe. Ce jour-là, d'après ce qu'avait écrit le professeur de littérature au tableau, ils allaient travailler sur l'une de ses plus célèbres nouvelles, Le Chat Noir. Les garçons du fond imitèrent des miaulements de chat ce qui souleva des gloussements du côté des cheerleaders. Lily leva les yeux au ciel d'un air désabusé. Elle ouvrit son livre et commença à lire le texte qu'elle avait déjà parcouru auparavant étant un rat de bibliothèque. Monsieur Anderson commença son cours.

Les Mondes Parallèles - DivinationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant