VI - Une Odeur d'Hiver

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Deuxième.

Cette nuit Yuki avait assez mal dormi, des cauchemars avaient élus domicile dans son esprit. Cela lui prit environ deux bonnes heures pour s'endormir. Des visions de sang, de boyaux ainsi qu'une silhouette auprès d'un cadavre mutilé. Elle ne savait pas qui c'était mais Yuki avait la certitude que le corps n'était pas celui de Luckas, c'était une fille.

Yuki se leva à grand regret de son lit, de mauvaise humeur à cause de son réveil, elle alla dans la salle de bain, heureusement elle n'avait pas envoyé son portable de l'autre côté de sa chambre comme elle l'avait fait l'autre fois. Cela lui avait fait assez peur la dernière fois. Elle alla se laver les dents. Quand elle passa devant son miroir, Yuki crut avoir une crise cardiaque, les cernes qui ornaient ses yeux étaient tellement marquées qu'on aurait dit qu'elle avait fait une nuit blanche. Elle avait une mine affreuse, son teint pâle trahissait la nuit de cauchemars qu'elle avait due passer.

Yuki se passa vite de l'eau sur son visage et s'essuya frénétiquement avec sa serviette, elle avait repris quelques couleurs et paraissait plus en forme par rapport à la pâleur morbide que sa peau arborait il y a quelques minutes maintenant.

Elle descendit les escaliers de sa maison pour atterrir dans le hall de celle-ci. Elle entendit, au moment où ses pieds nus touchaient le carrelage froid, son père ainsi que sa mère se disputer violemment. Ils disaient de telles atrocités que Yuki en fut terriblement choquée.

Elle entendit une chose qu'elle n'aurait jamais voulu entendre de sa vie : ―Mais si je n'ai pas avorté, c'est uniquement et uniquement à cause de toi ! Je ne voulais pas d'elle au début ! Hurla sa mère.

Yuki avait mal, elle sentit son coeur exploser en elle, les larmes arrivaient tel un torrent d'eau, la jeune fille ne pouvait plus supporter ça, alors elle courut vers sa porte d'entrée puis la claqua, signifiant qu'elle était partie.

Elle marcha jusqu'à son arrêt de car, sa pâleur était revenue, et des gouttes d'eaux perlaient sur ses joues devenues blanchâtres.

Les personnes à l'arrêt la regardaient comme si elle était venue avec des bleues et des cicatrices. Ils avaient tous les yeux ronds, vitreux qui détaillaient chaque parcelle de son corps et inspectaient son âme tout entière.

Cette triste fille ne voulait pas qu'on la regarde de cette façon, elle les regardait avec dédain. Elle les trouvait tellement laids et fragiles à ce moment-là, la rage monta en elle. Elle avait une telle envie de meurtre que ses mains en tremblaient de façon incontrôlable. Elle pensait à tout ce sang qu'elle pourrait verser à cet instant.

Elle sentait l'odeur de toutes les personnes présentes à cet endroit, une odeur presque obsessionnelle. Yuki voulait voir toutes ces personnes hurler leur désespoir, en sang. Yuki détaillait chaque personne, des petits, des grands, des lycéens, des collégiens... tous plus différents les uns des autres.

Yuki voulait tous les voir à terre, elle voulait voir dans leurs yeux cette terreur qu'elle leur insufflerait.

ㅡHey ! fit une voix calme et inquiète.

Yuki se retourna haletante de toutes ces émotions que son esprit avait emmagasinées. Sa pâleur était toujours présente et ses yeux remplis d'envie sale. Son amie la regardait étrangement comme si elle ne reconnaissait plus la personne qu'elle avait en face d'elle.

Elle lui demanda si ça allait, Yuki en avait marre de cette question qu'on lui répétait en permanence ; elle avait l'impression qu'on l'assistait, qu'elle n'était qu'une petite chose fragile. Elle répondit tout de même affirmativement, pour ne pas qu'on la prenne encore plus pour une handicapée, son amie n'en fut pas vraiment convaincue mais elle se contenta de ne rien dire et de la regarder. Le calme regagna Yuki après de longues minutes en silence.

Aku no HanaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant