Bob Molotov était arrivé sur Von Smith III, une station orbitant autour de Mars. Il avait quitté la navette qui l'avait amené depuis le transport interstellaire, et il faisait la queue devant le guichet de l'immigration. Avec la destruction de son vaisseau spatial, le prospecteur avait pratiquement perdu tout son capital et, en attendant de toucher un hypothétique dédommagement de l'assurance, il était financièrement à sec. Il avait dû effectuer un voyage de deux mois en classe économique, comprenant de multiples sauts à travers l'hyperespace. Il était fourbu et abattu. Son teint était blafard, ses cheveux grisonnant, qu'il coupait normalement en brosse, avaient poussé en une tignasse terne.
Il remarqua un déploiement inhabituel de policiers. Arrivé devant la fonctionnaire de l'immigration, une jeune femme brune dans la quarantaine, Molotov lui tendit sa carte d'identité et demanda:
- Que se passe t-il ? Pourquoi y a-t-il tous ces policiers?
- Nous avons été victime d'un attentat chimique dans le secteur des ateliers spatiaux, répondit-elle.
Elle introduisit la carte dans le lecteur, et scruta d'un air suspicieux un écran que Molotov ne pouvait voir.
- D'où venez-vous, Monsieur Molotov ?
- J'arrive du système de Zarfonia.
La fonctionnaire pianota quelque chose sur son terminal.
- Que venez-vous faire sur Von Smith III Monsieur Molotov?
- J'ai perdu mon vaisseau dans un accident. Je dois régler la question financière avec l'assurance et éventuellement me procurer un nouveau vaisseau.
- Ce ne sera pas facile, les chantiers et ateliers spatiaux sont en partie condamnés, et les secteurs encore ouverts sont infectés par une odeur pestilentielle. D'autre part votre transpondeur médical est au niveau orange; vous pouvez entrer, mais vous devez vous présenter dans les dix heures au bloc médicochirurgical, sinon vous serez considéré par défaut comme un sujet pathogène.
- Et que cela signifie-t-il?
- Autopsie puis éjection dans l'espace, je crois, répondit la jeune femme. Nous vous souhaitons un bon séjour sur Von Smith III, dit-elle en souriant.
Elle lui rendit sa carte d'identité et Molotov, encore un peu plus déprimé, s'éloigna vers la sortie du petit hall de transit. Arrivé dans la coursive qui faisait le tour de la station, il prit la direction de droite pour se rendre aux dortoirs, ses moyens financiers ne lui autorisant pas autre chose. La station Von Smith III était principalement dédiée à l'assemblage et à la maintenance de vaisseaux spatiaux. Elle était donc essentiellement peuplée d'ouvrier et de quelques hommes d'équipage en transit. Certains cadres privilégiés pouvaient se payer un sarcophage individuel, voir même partager une cabine, mais la grande majorité s'entassait dans les dortoirs où les couchettes s'échangeaient entre équipes de différentes tranches horaires. Dans une station comme dans un vaisseau, l'espace pressurisé était compté. En tant que prospecteur, Bob Molotov était parfaitement habitué à vivre dans des espaces confinés. Par contre, travaillant en général seul, la promiscuité lui était plus difficile à supporter.
Arrivé devant l'accueil des dortoirs, il se dirigea vers le terminal, et réserva la couchette numéro vingt-sept du second dortoir. Il y entra, attendit un moment que sa vue s'habitue à la lueur mauve des veilleuses, puis il tassa son sac dans la minuscule armoire associée à la couchette, essayant de faire le moins de bruit possible. Il se rendit ensuite directement au contrôle médical. Même s'il avait un urgent besoin de repos, il ne pourrait pas dormir avant d'avoir levé cette incertitude sanitaire qui pesait sur lui.
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Traitement de Choc, une aventure de Bob Molotov
Science FictionBob Molotov arrive sur la station spatiale Von Smith III où il est appréhendé par le contrôle sanitaire pour cause d'implants médicaux défectueux. Cette nouvelle fait suite à celle du Zarf.