5. "La honte de mon père."

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Il me semble avoir toujours été une honte pour mon père. Même en mer, lors de nos séances de pêche qui nous faisaient vivre, j'étais nul. Incapable de remonter un filet convenablement, je devais être assisté en permanence. Et quelle perte de temps !
Je ne suis pas fait pour la pêche. J'aurais aimé étudier mais les moyens de la famille ne le permettaient pas. À la place, je lisais pour m'instruire. J'aimais beaucoup lire et apprendre. La pêche ne m'a rien appris si ce n'est que je n'aurais jamais été un bon pêcheur. Si j'avais eu la chance de vivre, j'entends bien.
Le pire avec mon père, c'est qu'il ignorait tout de moi. À peine connaissait-il  mon prénom, du temps il daignait encore m'adresser la parole.
Avoir un enfant maladroit, ça le gênait déjà bien assez que pour assumer un fils condamné à mort. Je suis innocent, mais il ne le saura jamais. Il compte sur Daryl comme sur un frère. Si Daryl dit quelque chose, c'est que c'est forcément vrai. Voilà comment je suis devenu un criminel pour celui qui m'a conçu. Un vulgaire criminel en train de croupir dans sa cellule
Mon père avait toujours mal vu les délinquants. Ainsi, un jour, un jeune homme est venu avec nous en mer. Il s'appelait Garret. Je m'en souviens car tout le monde parlait de lui à l'époque. Il avait volé. Il avait volé une orange pour nourrir sa sœur, et on lui avait volé sa main gauche pour le punir de ce crime. Mon père lui a demandé de faire un tas de choses désagréables, encore faut-il que la pêche soit quelque chose de réellement agréable à faire. Bref, Garret s'est retrouvé à quatre pattes sur le sol, essayant de frotter le bois du bateau avec la main qu'il lui restait. J'ai voulu l'aider, à plusieurs reprises, mais mon père a tout fait pour m'en empêcher.
 Peut-être que ma mort lui fera prendre conscience de la valeur de notre famille ?

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