Cigarettes

• The Other Side •

**– J'écris pour ne pas oublier.**

Mon regard se posa sur la petite créature si fragile assise à mes côtés, et me rendis compte que sans le vouloir, Guy m'avait dévoilé une autre facette de sa personnalité.
Des larmes perlaient au coin des yeux de la jeune fille, mais celles-ci semblaient s'agripper assidûment à ses cils inférieurs.
<< – Lennon tu ne devrais pas...
– Cht... Je suis assez grand pour décider de mes fréquentations. Mais là ça devient déprimant nan ? Elle est passée où ta joie de vivre bon sang ? demandai-je avec entrain
– Ma joie de vivre ça fait longtemps qu'elle existe plus tu sais... Mais je vais faire un effort pour toi ! dit-elle, souriante, en écrasant sa cigarette contre le mur.
Je me levai avec vivacité et m'apprêtai à sortir de la petite maison lorsque j'entendis Guy murmurer quelque chose.
Je me tournai vers elle, un air interrogateur ancré sur le visage, mais elle fit mine de ne pas s'en apercevoir.
– Bon on y va ou non ? demanda-t-elle
– Ben je t'attends justement. dis-je en riant.
Elle ne répondit pas et se contenta de sourire avant de m'emboiter le pas.
– On va où ?
– Je t'emmène dans un nouvel endroit. répondit la jeune fille d'un air énigmatique.
– Encore et toujours des énigmes... Je crois que je commence à m'habituer.
Je n'obtins pas de réponse mais la sentis sourire dans l'obscurité.
Nous marchâmes durant une quinzaine de minutes, sans un mot, sur une route déserte. Les panneaux lumineux endommagés des motels clignotaient comme dans les films d'horreur, mais Guy ne semblait pas avoir peur.
Elle avançai avec détermination, elle avait l'air de parfaitement savoir où elle allait, c'est pourquoi je la suivais sans me méfier.
Nous débouchâmes sans tarder sur le centre ville, bondé a l'heure qu'il était, mais Guy continuait d'avancer. Elle s'arrêta devant une petite ruelle et me regarda avec fierté.
– Bienvenue dans le petit bijou de la ville.
Je ne compris pas tout de suite, mais lorsqu'elle me désigna un grand videur devant une petite entrée, mon visage s'illumina.
Elle se planta devant le videur, qui l'a dépassait de plusieurs têtes, et celui-ci l'étreint.
Surpris, je jetai un regard interrogateur à la jeune fille qui me fit un clin d'œil.
– Bil', je te présente Anton. dit-elle à l'adresse du videur.
Je haussai un sourcil a l'entente du faux nom mais elle me décocha une tape derrière le dos.
– Enchanté Monsieur. répondis-je un peu trop chaleureusement.
L'homme me considéra d'un air supérieur avant de lâcher un "Bonjour" inaudible.
Il s'écarta afin de nous laisser entrer et je me contentai de suivre Guy d'un pas assuré.
– Guy ! C'était qui ce mec ?
– Tsss ! répondit-elle, agacée.
Nous débouchâmes sur une grande pièce bondée de gens, que l'on ne distinguait qu'à leur souffle effréné, faute de lumière.
La musique était si forte que le sol tremblait presque.
Je me tournai vers Guy, que je tentai d'apercevoir malgré l'obscurité, et finis par tomber sur ses yeux, brillants, qui semblaient refléter tout l'enthousiasme qu'elle avait d'être ici. Elle me prit par la main et m'emmena dans la foule, là où les néons bleus nous permettaient de distinguer nos visages.
Je la regardai se défouler au milieu de tous ces gens. Elle semblait si lumineuse parmi toutes ces formes sombres autour d'elle, si lumineuse que l'on ne voyait qu'elle.
Elle ne souriait pas, sa bouche était le seul muscle qu'elle n'utilisait pas en cet instant. Et moi je restai planté là, fasciné par la jeune fille qui dansait devant moi, en oubliant même de danser.
– Tu danses pas ? me cria-t-elle dans l'oreille pour que je l'entende bien au milieu du vacarme de la salle.
Je lui souris et me mit à danser avec elle, guettant son sourire, qui ne se décidait pas à apparaître sur son visage.
Ah bout de quelques minutes, je me dirigeai vers le bar, essoufflé, mais la main de Guy le retint le bras.
Dans la pénombre, je ne voyais pas où est-ce que cette main me tirait, je n'étais même pas certain que c'était la jeune fille.
Lorsque l'air frais du dehors parcourus mon visage, je compris que la lumière ne tarderait pas à refaire son apparition, et effectivement, les lampadaires m'éblouirent seulement quelques secondes plus tard.
<< – Guy ?
Pour toute réponse, je me pris une gifle au visage.
– C'est qui Guy ? Un pote avec qui t'es venu te bourrer la gueule et draguer des filles ? glapit une voix familière.
– Alexia ?
La jeune fille s'arrêta de marcher et me lâcha le bras, avant de se tourner vers moi.
– "J'ai du boulot". C'est ça que t'appelles du boulot ?
– Ecoute je n'avais pas envie de te voir aujourd'hui ! Je n'en ai pas le droit ?! m'énervai-je
– Non ! Non tu n'en as pas le droit ! Je suis ta petite amie, tu es censé vouloir me voir le plus souvent possible non ?
– Pas aujourd'hui, c'est tout, je n'en avais juste pas envie. répondis-je, apaisant ma colère et mon exaspération naissante.
– Désolée bébé je sais pas ce qui va pas chez moi... Pardon ... dit-elle, la tête baissée.
– C'est pas grave ... soupirai-je.
La blonde vint poser sa tête contre mon torse, et je me laissai faire. Elle caressa ma joue et y déposa un baiser
– Je t'aime tu sais ... chuchota-t-elle.
– Moi aussi. >>

~ ÉCLIPSE DE LA NUIT ~

Je me réveillai avec un mal de crâne terrible, dans un grand lit aux draps beiges. Surpris, je me tournai sur le côté et aperçus Alexia, toujours endormie, allongée à mes côtés. À en juger par sa tenue légère, les activités pratiquées la veille ne laissaient aucun doute.
Je me relevai en position assise avec difficulté, me tenant la tête avec les mains.
Avais-je bu hier soir ? Je réalisais bien vite que je ne m'en souvenais plus. À vrai dire, je ne me souvenais plus de rien de cette soirée à partir du moment où Alexia m'avait fait sa petite déclaration, et étrangement, cela ne semblait pas plus me déranger que cela. Jusqu'à ce que je réalise quelque chose : Guy. Guy. Je l'avais laissée seule à la soirée et n'étais pas revenu. Où était-elle désormais ? Viendrai-t-elle me chercher ce soir ? Toutes ces questions commençaient à me ronger, et elles avaient bien de quoi, car cet oubli allait me coûter plus que je n'aurai pu le penser.

<< Tonight we just get drunk, disturb the peace >>