Chapitre 4 (partie 2).

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Blake avait poussé Elisabeth durant plus de vingt minutes. Ils étaient sortis du lotissement et étaient arrivés au niveau d'une maison abandonnée près d'une falaise.

-C'est l'ancienne maison de mes parents... Ils n'ont jamais pu la vendre, à cause de la falaise et de l'érosion elle serait sujette à des risques d'effondrements d'ici une cinquantaine d'années...

-D'accord... Et tu veux m'y faire entrer ?

-Ouais ! T'inquiète y'a aucun risque on a encore le temps avant que tout ne s'écroule, dit Blake dans un rire homérique.

Bizarrement Elisabeth ne se sentait pas à l'aise. Elle ne savait pas ce que Blake préparait mais elle n'aimait pas cela. Blake était en train de la pousser jusqu'à la porte, il ouvrit celle-ci et la fit entrer.

-Y'as plus d'électricité mais j'ai des bougies et y'a des lampes torches aussi sur la table.

Ils étaient plongés dans un noir presque total. Les rayons de la lune qui passaient par les fenêtres leur permettaient à peine d'entrevoir quelques meubles. Blake venait de se prendre une table, il ne put s'empêcher de jurer car il avait pertinemment conscience de la présence de cette table, toutefois il se cognait toujours dedans. Il conseilla à Elisabeth de ne plus bouger le temps qu'il trouve les bougies et les lampes.

-J'ai trouvé deux, trois meubles lors d'un vide grenier, tu sais c'était juste pour meubler le salon. Je vais plus dans les chambres et la salle de bain. Donc une table basse, un canapé et deux chaises, c'était l'idéal pour ce que je comptais faire ici...

-Et tu comptes faire quoi au juste ici avec moi ?

Elisabeth sentit que sa question le mit mal à l'aise. Elle ne le voyait pas mais elle commençait à le connaître et le silence qu'il laissa planer quelques secondes en disait long sur son état d'esprit.

-Ce que je compte faire ici avec toi ? Tu le découvriras bien assez vite Lizzie... Ah voilà les bougies ! J'ai besoin que tu fermes les yeux !

-Pourquoi ??!

-S'il te plaît, arrête de discuter, dit-il d'une voix implorante.

-Ok, ok je vais le faire !

Il alluma une bougie à l'aide de son briquet et revint vers la jeune femme afin de vérifier qu'elle avait réellement fermé les yeux. Comme il constata que c'était chose faîte, il retourna au niveau des autres bougies afin de les allumer les unes après les autres. Elisabeth entendait chacun de ses pas lorsqu'il se déplaçait afin d'installer les bougies. Il s'arrêta soudainement et revint auprès d'Elisabeth.

-C'est bon tu peux ouvrir les yeux...

Durant ce moment d'agitation, Elisabeth avait eu le temps de laisser son imagination inventer les choses les plus farfelues, comme les plus romantiques ou encore les plus effrayante mais jamais elle n'avait pensé à cela.

-Wow !

Blake qui était assis à côté d'elle avait un sourire timide, il attendait une réaction plus développée de la part d'Elisabeth mais elle ne parvenait pas à trouver les mots. Le salon était son lieu d'exposition. Il avait accroché aux murs des dizaines de photographies. Certaines étaient pendues au plafond. Il était cependant toujours possible de rester debout sans risquer de les toucher et de les faire tomber. Elisabeth baissa les yeux. Sur le sol se trouvait aussi une œuvre d'art. Une photo avait été collé sur le parquet du salon. C'était une photographie de ciel et d'un coin de plage. Le coin de plage où ils étaient quelques heures plus tôt.

-Wow ! Et ton ciel comment tu as fait pour le mettre ici ?

-J'ai imprimé ma photo en taille grand poster. Ça fait 1 mètre 50 sur 1 mètre. J'ai juste eu à coller après sur le sol en faisant gaffe de ne pas faire de plis !

-C'est... Bluffant...

-Viens ce n'est pas fini !

Il l'aida à descendre de son fauteuil et la fit s'allonger sur le sol, il fit la même chose. Durant un instant Elisabeth ne dit rien. Puis soudain elle comprit...

-Mais... C'est moi ? Quand est-ce que tu m'as pris ?

Blake avait réussi à reconstituer une photographie d'Elisabeth grâce à l'assemblage bien précis des nombreuses œuvres qui tombaient du plafond. Cette œuvre-là n'était visible que s'y l'on s'allongeait.

-C'était la première fois qu'on s'était vu au parc. Je t'ai vu arriver ce jour-là et je t'ai reconnu tout de suite. Tu t'es arrêtée à cet endroit précis, devant mes œuvres à les contempler, et moi je te contemplais... La lumière était parfaite et je me suis dit que je devais immortaliser cet instant afin que jamais ce doux moment n'échappe à ma mémoire... Quand j'étais petit je m'allongeais toujours par terre, dans le salon. Ça avait le don d'énerver ma mère, mais je m'en fichais j'adorais ça. Quand j'ai commencé à stocker mes œuvres ici c'était un rituel, je devais m'allonger sur ce sol. Je peux passer des heures comme ça... Et soudain j'ai eu cette idée, j'avais cette photo de toi, toi dans toute ta splendeur. De dos comme si tu ne voulais pas qu'on lise dans les traits de ton visage ce que la vie t'a obligé à endurer. De dos mais avec ce rayon de lumière jaillissant de nul part et s'arrêtant pile sur toi comme pour me signifier que l'ange que j'attendais était là sous mes yeux... Alors plutôt que d'observer ce plafond blanc dont je connais chacune des fissures je préfère te contempler toi...

Elisabeth resta un moment sans prononcer de mots. Elle tourna légèrement la tête vers Blake, mais ne dit rien. Parler aurait été de trop, parler aurait été comme briser cet instant, et Elisabeth ne voulait surtout pas que cela s'arrête. Blake comprit lui aussi qu'il ne servait plus à rien de parler. Quelques secondes plutôt il venait de faire une déclaration à Elisabeth, et toute personne sur Terre faisant une telle chose aurait voulu une réponse, un signe plutôt qu'un éternel silence. Mais il savait qu'avec Elisabeth les choses étaient différentes. Son absence de réponse était une réponse à elle toute seule. Elisabeth tourna à nouveau son regard vers l'œuvre de Blake. Le regard dirigé vers le ciel, elle posa sa tête sur l'épaule du jeune homme.


Love and these little secrets. [En réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant