Un Pirate Ne Rend Jamais Les Armes

Un second traître

Mes yeux s'entrouvrent lentement et je remercie silencieusement l'obscurité alentours qui m'a évité de m'aveugler bêtement après une durée de repos forcé. Je tente alors de me lever, mais je me rends compte que l'un de mes poignets est attaché au lit sur lequel je me trouve et que mon autre bras est trop douloureux pour être bougé pour le moment. Je me recouche donc correctement et me concentre sur mes autres sens pour déterminer l'endroit où je me trouve. Tout ce dont je me rappelle, c'est de m'être battu contre l'un des pirates qu'on poursuivait et d'être monté à bord de leur bateau. Y suis-je encore ? D'après l'odeur d'eau salée et le bruit que font les vagues qui viennent éclater contre la coque du bateau, il semblerait que ce soit le cas. Vu l'obscurité de la pièce où je me trouve, je suppose que je suis dans les cales. Il faut que je trouve un moyen de sortir de là et peut-être qu'à la prochaine escale, je pourrai m'enfuir avec le prince et son conseiller. Mais pour le moment, il faut que je me repose et que je récupère des forces, sinon je ne pourrai jamais sortir d'ici.

Satisfait de ma solution provisoire, je referme les yeux dans l'intention de me rendormir, mais un bruit de pas qui s'approchent m'en empêche. Gardant les yeux clos, je feins de dormir, espérant que cela persuade mon visiteur d'attendre encore un peu avant de m'interroger sur ma mission, et je laisse mon ravisseur approcher, restant tout de même sur mes gardes. Avec ces pirates, il faut toujours se méfier d'un coup de traitre. Je sens bientôt le nouvel arrivant s'arrêter à gauche du lit et poser sa main sur mon bras blessé, retirant le bandage qui y a été apposé.
« -Vous savez, ça ne sert à rien de faire semblant de dormir, me dit brusquement le pirate à mes côtés alors que la pièce s'emplit d'une odeur inconnue. »

En reconnaissant la voix du pirate contre lequel je me suis battu et qui a sauvé la vie d'un enfant, j'ouvre doucement les yeux et tombe bel et bien sur la personne à laquelle je m'attendais.
« -Comment tu as su, demandai-je alors qu'il commence à déposer quelques herbes sur ma plaie ce qui me fait frissonner.
-Vous n'aviez pas l'air comme tout à l'heure, quand vous dormiez vraiment. J'ai tout de suite vu que vous étiez sur vos gardes, répond-il en replaçant un bandage autour de ma blessure. »

Tout ce que je parviens à retenir de sa phrase est qu'il m'a regardé dormir assez longtemps pour pouvoir repérer la différence lorsque je me suis réveillé... Et je dois avouer que ce n'est pas pour me déplaire. Mais qu'est-ce que je raconte ? C'est un ennemi ! Un pirate qui a enlevé le prince !

Je remarque alors que le visage du pirate se rapproche rapidement du mien et je me crispe brusquement. Mon cœur s'affole lorsqu'il se retrouve suffisamment proche pour que je puisse sentir son souffle contre mes lèvres. Mes yeux se ferment automatiquement jusqu'à ce que je sente une main dans mes cheveux et qu'une douleur ne s'allume dans mon crâne. Un léger gémissement montrant ma souffrance m'échappe et une lueur d'inquiétude apparait momentanément dans le regard du pirate. Une question m'apparait alors et je ne réfléchis pas plus avant de la poser alors que mon vis-à-vis étudie avec délicatesse ma blessure.
« -Pourquoi tu t'occupes comme ça de moi ? Je suis juste un ennemi fait prisonnier. Tu n'as aucune raison de me soigner...
-C'est justement parce que vous êtes notre prisonnier qu'on se doit de vous garder en bonne santé. Et puis, j'ai rarement eu la chance de tomber sur un adversaire comme vous, alors j'ai bien l'intention de vous garder en vie pour qu'on puisse se retrouver un jour et croiser le fer à nouveau. »

Le regard qu'il me lance alors qu'il m'avoue tout ça m'hypnotise totalement et j'y reste piégé jusqu'à ce qu'il se relève pour ramener un bol rempli de soupe. Il le pose un instant pour m'aider à me redresser en position assise et le récupère, me tendant une première cuillère du repas. Je l'avale sans crainte : pourtant je devrais m'inquiéter du fait que je mange un plat préparé par des pirates et qu'ils ont pu mettre ce qu'ils voulaient dedans pour me droguer. Mais étrangement, je fais confiance au pirate face à moi pour ne pas me faire ce genre de coup bas. Et pourtant, brusquement, je sens une fatigue intense m'envahir. Mes yeux se ferment tous seuls. Il semblerait que je me sois trompé sur son compte...
« -Vous allez bien, entendis-je alors que je sombre peu à peu. »

Il a vraiment l'air inquiet... N'était-il pas au courant de ce qui a été rajouté dans mon bol ?
« -Restez avec moi ! Ne fermez pas les yeux ! »

Plus facile à dire qu'à faire. Lentement, le décor autour de moi s'efface et tout devient noir, alors que je sombre dans l'inconscience.


Pendant ce temps sur le pont

« -YeSung, il faut qu'on parle, m'interpelle une voix que je reconnais bien vite.
-Si c'est pour me rendre la droite que j'ai filée à ton petit protégé, tu peux aller voir ailleurs, Kyu. Il le méritait amplement.
-Même si l'envie de t'en coller une ne me manque pas, ce n'est pas de ça que je dois te parler.
-Alors, qu'est-ce qui te préoccupe ?
-Ce n'est pas SungMin qui nous a trahis cette fois-ci, m'annonce-t-il après avoir vérifié que personne ne pouvait nous entendre, excepté Ryeowook qui est resté à mes côtés.
-Donc, tu penses qu'il y a un autre traitre à bord... Et pourquoi venir m'en parler ? Je pourrais aussi être le coupable.
-Je suis prêt à prendre le risque. Mais c'est toujours toi qui remarque les petits détails dans tout ce qu'il se passe, que ce soit sur le bateau ou à quai.
-Tu as une idée de départ ?
-Effectivement. La dernière fois, les gardes nous ont directement attaqués et on a eu beaucoup de peine à s'en débarrasser. Mais cette fois, ils n'ont pas essayé de profiter de l'effet de surprise pour nous attaquer et ils se sont contentés de filer en douce avec le prince. Ils auraient pu se débarrasser de nous très facilement en nous attaquant un par un dans nos chambres. Et puis, comment ont-ils su que HyukJae ne serait pas dans sa chambre à ce moment-là ? Il a décidé de sortir au dernier instant... »

Comment savoir qui a pu nous trahir avec ça ? Il me faut plus de temps et plus d'informations. Je confirme donc à KyuHyun que je m'occuperai de ça et retourne vers ma cabine. Alors que je passe devant les cuisines, je rentre brusquement dans un corps qui se faufile à l'extérieur de la pièce. Qu'est-ce qu'Il faisait là ? Mes pensées reviennent bien vite sur mon problème premier et j'en oublie ce petit incident. Arrivé dans ma cabine, je m'installe dans mon lit et fais signe à Ryeowook de me rejoindre. Celui-ci s'allonge timidement à mes côtés et je le prends doucement entre mes bras alors que mes pensées dérivent sur le problème épineux que j'ai à résoudre.

Ce n'est qu'une quinzaine de minutes plus tard que je suis brusquement sorti de mes réflexions par la porte de ma cabine qui s'ouvre sur KiBum.
« -Quelqu'un a mis un somnifère puissant dans le repas du garde qu'on a fait prisonnier. Le capitaine veut voir tout le monde sur le pont. »

Ma rencontre dans le couloir, tout à l'heure, me revient à l'esprit. Est-ce Lui qui l'aurait drogué ? Pourquoi ? Une idée ne tarde pas à me venir et je passe rapidement devant KiBum, glissant juste quelques mots.
« -Je sais qui est le coupable ! »

Je n'ai aucun doute là-dessus. Et pour le somnifère et pour les informations aux gardes, je suis sûr de moi. Je tiens même le mobile des deux actes.

J'arrive rapidement sur le pont, suivi de KiBum. Tous les autres sont déjà là. Tant mieux. Je viens me poser à côté de KyuHyun qui me regarde approcher avec espoir.
« -J'ai trouvé la réponse à ton problème, lui glissai-je à l'oreille avant de prendre la parole à voix haute. J'ai quelque chose d'important dont je dois vous faire part. Il y a un autre traitre sur le bateau. SungMin n'était pas responsable de la deuxième attaque des gardes. »

Tous les visages se retournent vers moi, surpris.
« -Ce deuxième coupable a tenté d'empêcher notre prisonnier de dévoiler son identité, mais c'est ça qui l'a trahi, continuai-je.
-Qui est ce deuxième traitre, demande HyukJae avec colère.
-C'est... »

Le temps semble brusquement se figer sur le bateau alors que je dévoile enfin le nom du coupable.