Chapitre Spécial #3 - Levi

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Je reviens d'une énième séance. Et j'ai retenu qu'il serait bénéfique et libérateur pour moi de t'écrire une lettre pour extérioriser. Faire le point sur les derniers évènements de ma vie si ennuyeuse.

Je sais bien que tu seras incapable de la lire. Mais tant pis, j'essaie.


Avril.

Je déteste le jour de la rentrée et tous ces sales gosses, et j'ai hâte d'avoir fait mes preuves dans cette académie pour être muté en fac de sciences où j'apprendrai les mathématiques à des passionnés. Pas à des gros débiles en manque d'autorité...

J'ai appris que j'avais en prime la classe B à prendre sous mon aile. Hanji les a eu l'année précédente, c'est des catas ambulante ceux-là. Mais je vais devoir m'en contenter.

Les jours passaient, les semaines. J'arrivais à en faire quelque chose, pour la plupart mais j'allais devoir mettre en place ma classe de rattrapage. Il y a deux nouveaux cette année, je vais encore mettre mille ans avant de retenir leur prénom. Ils m'emmerdent.

Ne me blâme pas pour mon langage.


J'ai croisé la fille chez Seiyu, le magasin où je vais régulièrement. J'ai bien ri en voyant sa réaction lorsque je lui ai conseillé une marque de sashimi. Ceux qu'elle comptait prendre étaient dégueulasses, j'allais quand même pas la laisser faire... Encore une gamine qui perd ses moyens face à moi. C'est un peu pitoyable je dois dire, mais je m'en tape si j'ai l'air froid et antipathique. Au moins je ne m'attache à personne. Je ne veux plus m'attacher à qui que ce soit. Je sais que tu comprends.

Quelques semaines plus tard, comme tous les matins avant d'aller travailler, je suis allé faire un jogging. Ce jour-là, il y avait la sortie en forêt. La fameuse sortie.

Au bout de quelques heures de marche, moi et mon groupe nous sommes rendu compte que nous étions...perdus. Moi et mon fichu sens de l'orientation...tu me connais. Entre Rarlert les deux bébés et le reste qui n'arrêtait pas de geindre, je commençais à paniquer, intérieurement. C'est là, qu'elle est intervenue.


« Vous n'avez rien fait de grave, tout le monde va bien. »


Tout va bien.

Il n'en fallait pas plus pour me remonter le moral. Je l'ai regardée droit dans les yeux, réellement pour la première fois et au lieu de cette gosse introvertie j'y ai vu une jeune femme bienveillante qui savait mettre sa timidité de côté quand il le fallait.


En ouvrant mon cahier des élèves, je me suis arrêté sur elle. Aucune émotion ne traversait son visage fermé, sa photo me rappelait la mienne. Puis j'ai failli renverser le thé que je buvais dessus, en parcourant les informations qui s'y rattachaient. Elle avait eu dix-neuf ans.


Je sais que tu me vois sourire d'où tu es.


Depuis le début je jouais de ses regards incessants qu'elle pensait discrets. Mais son attention pour moi devenait bien plus intéressante. C'était le statut que je lui attribuais. Ca tournait même à l'obsession.

Elle passait de fade à intéressante. Mais je vais t'épargner quelques détails, après tout je ne peux pas tout te raconter...

Je te passe le jour où je lui ai fait croire que j'allais l'embrasser. Si tu avais vu sa tête, c'était absolument hilarant. Mais au risque de paraître sentimental, c'est le jour de mon anniversaire que j'ai préféré. Je sais, tu dois te dire mais bon sang tu as toujours eu horreur de le fêter, alors pourquoi ?


Cette écharpe vert émeraude me rappelle le foulard que tu portais constamment et que tu passais par-dessus mes épaules, les nuits les plus froides. Cette couleur intense est ancrée en moi comme un souvenir indélébile et je suis déçu de cette hausse de température qui m'empêche d'en profiter.

Les journées se sont réchauffées, le ciel affiche à présent un soleil radieux avec l'arrivée du printemps. Il avait beau être dégagé, sans aucun nuage, je n'y voyais pas plus clair pour autant.

Cette fille m'intrigue, je me surprends à penser à elle très régulièrement. J'imagine toutes sortes de stratagèmes pour la rendre embarrassée, je me réjouis de voir cette expression illuminer ses traits. Mon dernier en date était à la visite de tante Livia. C'est là que j'avais décidé de passer à la vitesse supérieure. Son caractère s'était endurci, ça lui déplaisait à présent que je joue avec elle.


Lorsqu'elle a quitté mon appartement, mitigée comme je l'étais par cette fin de conversation un peu houleuse avec Livia qui s'est montré bien trop perspicace, ça m'a fait réfléchir. Qu'est-ce que je voulais vraiment ? Qu'est-ce qu'elle représentait pour moi ? Ce n'est plus l'élève avec laquelle je me suis retrouvé enfermé dans un placard par inadvertance, ni celle que je m'amuse à torturer sous la table pendant que nous sommes en plein repas... C'est celle qui m'offre du chocolat pour la saint valentin.

Juste après qu'elle l'ait déposé sur mon bureau, j'ai paniqué comme une grosse merde, excuse-mon langage. Fini l'attirance qui n'amène à rien, je sais qu'elle veut plus et j'ai peur de ne pas l'accepter. Pourtant, c'est moi qui ai voulu cette situation. Mais j'ai toujours peur quand on s'attache à moi. Petra et Roy me suffisent. D'ailleurs, cet abruti continue à me foutre la honte et ce même quand elle est là. Il m'insupporte. Je déteste être tourné en ridicule, il le sait très bien et ça ne l'empêche pas de m'emmerder. Il a même failli balancer que je me suis pissé dessus le premier jour de fac, tout ça parce que les toilettes étaient hors service et que je m'étais retenu pendant les quatre heures de cours sans vouloir me soulager derrière un arbre. Enfoiré !

Roy est hyperactif mais tu l'aurais vraiment aimé, j'en suis sûr. Je ne lui avouerai jamais, mais sans lui et Petra mon arrivée au Japon et mon intégration n'auraient pas été aussi simple. Ils sont les seuls à connaître mes faiblesses les plus profondes, celle que je ne partage avec personne.


Je crois qu'Eva était devenue l'une d'entre elles, parce qu'à ce stade je doutais de moi et de mes intentions. Mais j'ai décidé de lui donner une chance, de me donner une chance. J'ignore où ça peut me mener, mais en tenant le livre qu'elle a oublié chez moi dans mes mains, j'avais la certitude que l'expérience serait intéressante et pleine de surprises.


Sens et sensibilité...


Tes lectures me manquent maman. J'espère qu'ils les apprécient là-haut, chez les anges.




Levi.

大阪の新生活 Ōsaka no shin seikatsu Vol.1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant