CHAPITRE IV - SANG ÂGÉ

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Après avoir improvisé un barbecue à la cheminée, j'avais cuit et mangé la viande. Le goût de cette nouvelle viande me surprenait, rassemblant vaguement au porc. La nuit avait passé, et le soleil se levait loin à l'Est. Je devais me préparer pour la nuit, les autres enquêteurs allaient sûrement se douter de quelque chose : Thomas Hopkins disparut soudainement alors qu'il me cherchait, il m'avait surement trouvé. Je devais donc absolument bouger, et mettre le plus d'espace possible entre moi et Monsieur Hopkins. Cependant, je n'en avais pas terminé avec cette ville... Il me restait un dernier tour à jouer à ces habitants. Fatigué et un peu sonné par tant d'heures de sommeil manquées, je m'accordai un temps de repos. Je m'allongeai au milieu du salon et m'endormis assez rapidement. Dix heures plus tard je me réveilla. J'avais eu un sommeil lourd et profond, sans rêves. J'avais hélas trop dormi, moi qui avait prévu de n'être dans les bras de Morphée que pendant deux ou trois heures. Je regardai alors ma montre gousset, enfin, celle que j'avais volé dans le long manteau de Monsieur Hopkins. Elle affichait quatre heures de l'après midi. Habillé tel un enquêteur, je décidai de sortir et étudier les habitants, si peu nombreux, de cette ville. J'avais besoin d'informations. Je sortis et verrouillai la porte avec une ancienne clé trouvée dans la maison. Je marchai en explorant la petite ville, afin d'en connaître chaque recoin, chaque petite place. Je marchai pas moins de trois heures, tournant en rond dans toute la ville avant de trouver la place idéale. C'était une place ronde, comme un rond-point, avec un immense et ancien chêne au milieu. La pelouse était si verte qu'elle ressemblait à une peinture de Véronèse. Il y avait quelques buissons, chevauchés par des roses. De l'autre côté de la place, la symétrie se vérifiai, avec des tulipes jaunes au lieu des roses très rouges. Droit devant, Il y avait une église dont le clocher se plaçait à une quinzaine de mètres du sol. C'était une petite église à deux étages, avec un troisième petit étage pour le clocher. Elle avait été bâtie en pierre, et une croix d'acier ainsi qu'un coq de fer venaient se poser au dessus du clocher. Le coq en haut de la croix surplombait toute la ville car aucun autre bâtiment ne s'élevait plus haut. Il y avait des bancs en bois un peu partout autour de la place. Je m'y assis et regardai les passants. Principalement composée de vieilles personnes, la population de cette ville était assez pauvre en diversité. En effet, on distinguait deux gros genres et quelques fois, assez rarement, un troisième petit genre. Il y avait des paysans, qui portaient seulement quelques tissus par dessus leurs chemisiers. Il y avait les bourges qui , quant à eux, portaient de belles vestes et chaussures. Et parfois, il y avait quelques nobles qui arboraient de superbes couleurs éclatantes ainsi que quelques bijoux. Moi, je portais un long manteau brun, un chemisier blanchâtre, sali par l'usure, un pantalon brun lui aussi et des chaussures bateau assez plates. J'étais comme qu'habillé en caméléon, car je ne me distinguais vraiment pas facilement des habitants. Le soleil s'était rapidement couché à l'Ouest, et je me mis en route pour rentrer. La montre à Gousset marquait presque huit heures du soir quand je passai devant une épicerie. Bien qu'ayant une nouvelle nourriture dans la maison, je fus tenté de voler une belle pomme. Elle était rouge écarlate et la peau de cette dernière brillait légèrement, comme si elle avait été polie. Alors en marchant juste à côté, je dérobai discrètement la pomme et la croquai, sans m'arrêter de marcher. J'arrivai bientôt à la maison. Je vérifiai que personne ne m'avait suivi et rentrai précipitamment. Je m'empressais de rassembler toutes mes affaires et de les mettre dans une besace en cuir que portait Monsieur Hopkins. De chance, la hache avec laquelle j'avais décapité ce dernier n'étais guère plus longue que mon avant bras et rentrait tout juste dans la besace. Je finis rapidement et sortis. J'avais mangé ce que je pouvais manger de Monsieur Hopkins, et le reste, je l'avais brûlé dans la cheminée, dont la fumée noir s'élevait haut dans le ciel obscur et étoilé. En cette sombre nuit, ayant quitté mon petit refuge, je marchai dans la ville à nouveau. Je voyais des paysans quémander quelques pièces de porte en porte pour se payer un dîner dans une taverne en fin de soirée. J'avais aussi pris soin de défeuiller et d'écorcer ainsi que tailler la branche avec laquelle j'avais premièrement assommé Monsieur Hopkins. Je m'en servais comme canne mais en réalité, ce n'était qu'une arme en plus. C'était elle qui ouvrirait le bal. C'était avec elle que mon dernier tour pour cette ville débuterait. Le bois était désormais clair et semblait comme neuf. Il était résistant et épais. Je marchai tranquillement mais j'avais toujours ce regard de meurtrier qui faisait fuir les paysans et quelques instants après, la place était déserte, silencieuse. Je m'approchai d'une petite maison non loin de la place. C'était une habitation qui comportait deux petits étages et un jardin. A ce que j'avais pu observer, c'était un vieux couple qui en était propriétaires. Je frappai donc calmement et rythmiquement à la porte, mon plus beau sourire aux lèvres. Le vieillard m'ouvrit. Il portait un haut bleu et un pantalon jaune. Ses cheveux étaient blancs et il avait des rides.

"Bonsoir, que puis-je pour vous enquêteur ?", me demanda-t-il en s'appuyant contre l'embrasure de sa porte.

Il avait du reconnaître l'uniforme de Monsieur Hopkins. Cela devait être la tenue habituelle des enquêteurs.

"-Vous pouvez déjà me rendre service et ne pas crier.", lui déclarai-je.

Ce vieux monsieur n'en comprit rien et une expression d'incompréhension se dessina sur son visage. Aussitôt, je frappai sa tête de toutes mes forces avec la canne. Le vieil homme s'étala au sol et sa tête heurta si violemment la porte, qu'elle lui avait ouvert le crâne. Il avait sûrement une hémorragie interne car ses oreilles, ses yeux, sa bouche et son nez se sont mis à saigner. Et alors que je continuais à cogner le corps inerte du vieillard, sa compagne descendait les escaliers :

"Mais enfin Charles ! Qu'est-ce donc que ce bou...can...", s'arrêta-t-elle en me voyant.

Elle devint pâle de peur et se mit à courir vers la porte de derrière. Je fus étonné qu'une femme aussi vieille puisse courir autant. L'adrénaline et la peur l'aidait, sans doute. Elle sortit par derrière avant même que je ne pose ma besace. Alors je sortis la hache et me mis à la poursuivre. De chance, il faisait noir et la place était encore plus déserte que jamais. Je courais après la vieille dame, couvert du sang de son mari, une hache à la main. Elle entra dans l'église et referma la porte.

"Tu es à moi", pensai-je.

J'allais la massacrer sans aucun scrupule. J'allais lui ôter sa vie sans aucune hésitation, comme pour son mari... Et comme pour Monsieur Hopkins. En ces moments là, l'envie de tuer était telle que rien ne pouvait m'arrêter. J'étais assoiffé de sang tel un vampire. Je marchai vers l'église, et les ténèbres m'accompagnaient. Si Caïn était le père du meurtre, alors j'en étais le fils. C'était si... Excitant... Elle avait couru le plus vite possible, et désormais elle était piégée dans l'église. Elle avait fui, mais je l'avais rattrapée. Je la rattrape toujours. Je les rattrape tous.

Hello Madness, My Old Friend.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant