-Chapitre Deux-

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C'était une nuit d'hiver, froide, grise, pluvieuse et triste. Victoire avait repris du service et était partie l'espace d'une semaine en voyage d'affaire, laissant sa princesse seule à la maison en compagnie de son père. Elle venait de fêter ses six mois, et tout allait pour le mieux. Sa mère était quand même inquiète, mais quelle mère ne l'est pas.

Mais cette fois, sans le savoir, elle l'était à juste titre.

Sylvain venait de donner le dernier biberon de la journée à sa petite Lola et s'apprêtait à la coucher lorsqu'on toqua, trois coups puissants à la porte. Il déposa avec douceur sa fille dans son minuscule lit à baldaquin, avant de se diriger à la porte de sa maison, non sans crier un « j'arrive » à son interlocuteur mystère. Il ouvrit la porte. Curieusement, il ne reconnut pas tout de suite celui qui se trouvait derrière celle-ci. Mais lorsque ce fut le cas, il était trop tard. Un costard pourpre, une chemise vert bouteille, une paire de gants noirs, des mocassins surmontés de guêtres, des cheveux blonds cendrés rasés derrière et sur les côtés, ramené en une queue de cheval haute, le tout couronné d'une canne pour se donner un air dandy. Alexis était de retour. Il fixa Sylvain d'un regard amusé, avant de lui annoncer d'un air enjoué :

-Coucou c'est moi ! Tu te souviens de moi j'espère.

-Alexis... Comment t'oublier..., répondit le père d'une voix sombre.

-Alors mon petit, tu te doutes de la raison de ma venue.

-S'il te plait non ! Ne la prends pas... elle est tout ce que nous avons avec Victoire.

-Victoire, Victoire... laisse-moi réfléchir... Ah oui, cette femme à qui tu n'as jamais dit ce qu'il arriverait à son enfant, cette Victoire-là ?

Sylvain baissa les yeux d'un air abattu, en soupirant. Puis il se ressaisit, leva les yeux vers l'homme en question, et lui dit avec rage :

-Si tu la veux il faudra me passer sur le corps !

-Soit...

Alexis sorti alors une arme de sa poche et la pointa sur son adversaire avant d'appuyer sur la gâchette. L'homme s'écroula alors, une fléchette dans le torse. Le tireur s'accroupit alors près de sa cible et lui dit à l'oreille :

-Ne t'en fais pas, ça ne te tuera pas. Ça ne serait absolument pas drôle sinon... Mon plaisir, c'est de me délecter de la souffrance que je cause à autrui. Te laisser mourir serait mettre fin à ce plaisir que j'attends depuis plus de six ans maintenant. Non, ce que je t'ai injecté est un dérivé de l'acide gamma-hydroxybutyrate, autrement appelé GHB. Ne t'en fais pas, je ne te violerai pas, je vais juste te laisser là, à me regarder emmener ta fille... Ma petite Judith. Je sais, si tu pouvais parler tu me dirais ''Ce n'est pas Judith, c'est Lola''. Mais je trouve que Judith lui va tellement mieux. Et je vais te dire pourquoi : Judith, c'est le nom de la dame de cœur.

Et sur ces mots, Alexis pris la petite dans ses bras, lança un dernier regard et un dernier sourire mesquin à Sylvain avant de passer la porte avec l'enfant.

Le lendemain, lorsque Victoire rentra chez elle, elle trouva son mari, en position fœtale entre la commode, le mur et la plante verte de leur chambre. Elle courut vers lui. Il avait la tête entre les jambes et répétait sans cesse qu'il n'avait jamais voulu ça. Mais voulu quoi ?! Elle fit se relever son mari et l'amena jusqu'à leur lit où elle le fit s'asseoir. Elle lui demanda de respirer calmement, de se calmer et de lui expliquer ce qui l'avait mis dans cet état. Alors c'est ce qu'il fit. Il suivit chacun des conseils de sa femme, et déballa son histoire. Du carré d'as à la visite d'Alexis, de la dame de cœur au GHB.

Tout d'abord, Victoire tomba des nues. Elle resta immobile quelques instants, puis se ressaisit. C'était de sa faute à lui tout ça. De sa faute si elle avait perdu sa petite fille qu'elle avait passé toute une vie à espérer. Elle se leva. Se mit à hurler à plein poumons tout en faisant les cents pas. Puis d'un coup s'arrêta, se tourna vers Sylvain, une flamme mauvaise et noire dans les yeux, et lui dit une phrase qui resta gravée dans sa mémoire jusqu'à la fin de ses jours :

-Il aurait mieux fait de te tuer, et vu qu'il ne l'a pas fait, je vais m'en charger. Dans la douleur, TA douleur. Peu importe le temps que cela prendra, des jours, des mois, des années même, je m'en moque. Je vais te le faire regretter. Tu souffriras physiquement et mentalement, et ce jusqu'à la fin de ton existence de minable. Et n'essaie pas de m'échapper, car c'est toi que l'on accusera d'avoir joué notre... non MON enfant au poker !

Sur ces mots, elle poussa violemment son mari sur le sol avant de se diriger vers la cuisine où elle attrapa la bouteille de whiskey dans le placard, la déboucha, la porta à ses lèvres et en descendit le contenu.

Raiponce, Ou La Jeune Fille Du Haut De La TourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant