Etoile du soir.

Chapitre 8

Des cris, des hurlements incompréhensibles, une manifestation de vacarme joyeux, presque guerrier. Aux alentours, des acclamations relayées par une centaine de voix et des applaudissements inépuisables secouaient les joueurs comme un tremblement de terre. Le tournoi universitaire de rugby était bien avancé et la défaite était dans une impasse. L'équipe n'avait subit aucun échec depuis qu'un duo de choque en faisait partit.  

Le match était joué d'avance, la victoire indubitable. La horde bien-heureuse s'engouffrait déjà dans les vestiaires et avec elle une vague odorante de transpiration. Pendant que les uns s'octroyaient préalablement les douches, les autres festoyaient de bon coeur. Les compliments pleuvaient, Dio et Jonathan étaient au centre des festivités. Lorsque l'euphorie commença finalement à retomber, les premiers s'en allèrent. En maitre de la popularité, Dio prit rapidement possession de toute l'audience. Pas un regard ne resta à Jonathan. Et il ne fut pas plus surprit quand son compagnon parti dans un élan d'impatience, son maillot encore sur les épaules, avec le reste de la bande pour continuer la fête ailleurs. 

-"Jojo, ne vient pas ?" 

-"Je le crains, il aime rentrer tôt." Dio marqua une petite pause afin d'aiguiser ses propos. "J'ai tord ?". Son regard était tranchant, son sourire faux. Il ne regarda même pas qui avait posé la question, les gens futiles ne l'intéressait jamais. 

Jonathan lui rendit un sourire forcé, accompagné d'un petit geste ,tout aussi forcé, d'approbation. La pièce se vida, des éclats de rires lui revenaient en écho du couloir puis plus rien. Autour de lui, des chaussures en vrac, quelques maillots abandonnés, des restes de bières sur le sol et sa solitude. Une solitude qui prend aux tripes. Des murs trop blancs, des fenêtres trop petites, le manque d'aire frais et le silence. Jonathan secoua la tête et commença à s'étirer. Il tendit ses muscles qui roulaient gracieusement entre deux flexions, et travailla sa souplesse. Une fois fini, Jojo retira ses vêtements, les plia avant de les ranger dans son cassier puis sortit de quoi se changer. Dans le cassier d'à côté, les vêtements de Dio attendaient leur propriétaire. Tant pis pour lui. Avant de passer sous la douche, Jonathan examina ses nouveaux hématomes. 

L'eau froide lui remit les idées en place, effaçant le reste d'excitation due à la victoire. Son physique le prédisposait aux sports et il adorait ça. Même Dio avait de la peine à suivre son rythme, il était plus tactique et intervenait aux moments les plus propices. Il avait moins de bleus aussi. Quand ses études en archéologie seraient terminées, il commencerait à voyager, surement en Amérique du Sud, il partirait à l'aventure dans la jungle hostile. Cette perspective lui plaisait, il était curieux, il avait des rêves. Et surtout, il n'aurait plus à subir les foudres de son frère. Avocat, c'est un métier qui rapporte, un métier sans vergogne, ça lui irait parfaitement. Il resterait en Grande-Bretagne, un océan les sépareraient. Il se demanda se que son père en pensera, il serait déçu surement, pour lui, il était toujours déçu. Il avait tord mais il ne le savait pas.

 Jojo se sentit subitement mal à l'aise, quelque chose n'allait pas. Il n'entendait que le clapotement de l'eau sur le carrelage. Aux premiers abords, rien n'avait changé. Il se tourna juste à temps pour apercevoir la paire d'yeux rouge l'observer à l'entrée de la pièce. Dio était appuyé contre le mur.

-"Je t'ai surpris ?"

-"Depuis combien de temps tu m'observes en silence dans le noir ? Où sont les autres ?" Après un court échange de regard, le blond s'approcha, ses yeux brillaient de malice, sa démarche souple et élégante était terriblement sensuelle. Il s'arrêta devant lui, l'eau giclait sur ses chaussures. Ils s'observèrent quelques instants. Dio tendit le bras, écartant une mèche humide du visage de Jonathan, il caressa sa joue, ouvrit ses lèvres. Jojo le repoussa du revers de la main.