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Ils s'étaient tranquillement emparés des lieux. Ils bloquaient les domestiques un à un et prenaient leur déclaration dans le cabinet de travail du défunt. Arsinoé attendait son tour dans son atelier, le pinceau fatigué d'un second portrait. Celui-là souriait davantage et l'observait tendrement. Elle l'embrassa, essuya la peinture de ses lèvres. Qu'on l'enfermât ou qu'on l'envoyât aux mines de sel à l'issue du procès, il fallait qu'elle trouvât un moyen de l'emporter avec elle.

Le lieutenant Tailleur frappa à la porte.

— C'est votre tour. C'est Nicéphore ? Joli coup de pinceau. Évidemment, vous n'avez pas de lien avec Nicéphore, pas vrai Ariel ?

Arsinoé haussa les épaules. Elles traversèrent les couloirs. Des voix se faisaient encore entendre depuis la salle d'interrogatoire improvisée.

— Nous sommes en avance. Je vais vous demander d'attendre ici avec moi.

— ... et donc selon vous, que s'est-il passé ?

Parma émit un soupir sur-joué.

— Le patron était... Je ne sais pas si vous voyez, un homme à l'ancienne mode, maître chez lui, maître en tout... Et je crois que ces derniers temps il se voyait partir. Il avait honte. Il nous le faisait payer.

— C'est intéressant, mais je vous parle d'hier après-midi.

— La fatigue, l'âge, la fierté... Il a appelé la mort à lui.

— Que voulez-vous dire ?

— Que c'est clairement un suicide.

Paule eut un sourire en coin.

— Vos gens ont eu le temps d'accorder leurs violons. Est-ce bien la peine de continuer l'enquête ? C'est clairement un suicide. Ah, quelle brochette d'arrestations pour faux témoignages on se trouverait contraints de faire s'ils n'avaient qu'un tout petit peu enjolivé les faits !

Arsinoé ne répondit pas. Elle ne dit rien quand les policiers repartirent. Elle s'assit dans son atelier, attendit le jour suivant.

La peinture était sèche.

Il fallait vivre.

L'oreillerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant