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Cela fait une semaine que je sais que Juhin est mon Desti. Pour le moment, il est toujours dans m'a chambre, mais je sais que ça ne va pas durer. Aely n'est toujours pas repassé, mais les occasions pour elle de s'échapper sont rares.  Mes journées se résument à attendre. Attendre quoi ? Je ne sais pas.

Avant-hier, c'était le jour de ma sortie. Je suis aller voir Zack. Son frère était chez lui, alors on a fait un jeu en réalité virtuelle. Un petit jeu tout simple, de plateforme. Zack et moi étions ensemble contre Huka, son frère. Vu qu'on sautait, courait, marchait et tirait, ça m'a fait faire du sport. Ça faisait longtemps que j'en avait pas fait.

Avant, j'allais à la salle de sport de l'hôpital, mais assez vite, mon état ne me le permit plus. D'ailleurs je vous raconte même pas l'état dans lequel j'étais après le jeu. Je suis à grosses gouttes, je ne trouvais pas l'air nécessaire à mes poumons. Zack m'a offert de l'eau, ça allait mieux. Je suis parti et comme il me restait un peu de temps, je suis aller sur une des nombreuses esplanades. Au loin, j'entendait les bruits sourds de l'hyperloop. Des hommes et femmes couraient sur l'herbe. Un enfant faisait du cerf-volant électronique. C'est un cerf-volant qui vole même quand il n'y a pas de vent. Je trouve ça inutile, mais vu comme le gamin galerait, je trouvais ça drôle à regarder. Puis je suis rentré.

Maintenant, j'attend avec impatience la venue d'Aely. Me voyant existé comme une puce, Juhin me demande :

- Qu'est ce qu'il se passe ?

- J'attend la venue d'une potentielle petit amie !

- Oh ! Et d'où sort-elle ?

- De la chambre 117.

Il réfléchit.

- Mais c'est trois chambre avant la notre !

- Bravo Poirot.

Poirot, c'est Hercule Poirot. Avant, on disait bravo Watson ou bravo Sherlock, je sais plus. Mais les jeunes ont changé Watson/Sherlock en Poirot pour la rime et pour se fourre de la tête du concerné. C'est vrai qu'il y a plus flatteur qu'un poireau dans la vie...

- Depuis quand tu la connais ?

- Depuis un an, un an et demi...

- Tous ça! Et vous avez jamais rien conclut ? S'exclame-t-il, ahuri.

- Et bien... non. En même temps je savais pas qu'elle m'aimait !

- Et toi, tu l'aimes ?

- Je sais pas... On va dire que j'aimerais bien vivre une histoire d'amour avant de mourir, et qu'elle me plait bien. Alors je vais en profiter !

- Ah... moi j'en ai déjà eu plein !

Sacré Juhin ! En même temps, il est plein de qualités. Ça m'étonne pas !

- T'as pas des conseils à me donner ? Dis-je en rigolant.

- Et bien... Hum... Non !

On rigole. Ça fait du bien de rire parfois. Les robots ne rigolent pas, je sais pas comment ils font ! C'est peut-être bien la dernière chose que me fait sentir Humain. Entre ma machine artificiel, ma vie artificiel, et mon amour imaginaire.

Les parents de Juhin viennent lui rendre visite. Il ne leur a pas dit pour moi, son Insu. Ils s'en vont, pour une promenade de quelques heures. J'appelle un infirmier, et demande si Aely est dans sa chambre. Il me répond que non, qu'elle est à sa ballade hebdomadaire. Elle ne devrait pas tarder à rentrer. Avec un peu de chance, elle passera me voir en rentrant. Alors j'attend. J'attend Aely.

La porte s'ouvre. Mon coeur fait un bond ! C'est elle. Elle me sourit :

- Qu'est ce qu'on dit ? Me lance-t-elle.

- Bonjour medamoselle Aely !

J'avoue que j'ai légèrement oublié le mot...

- Aaaah... Non.

Elle fait mine de partir. Se retourne. Se rapproche de moi. De plus en plus près. Je m'asseois sur mon lit pour mieux l'accueillir. Elle dépose ses lèvres sur mon cou, puis sur ma bouche. Elles ont vaguement un goût de chocolat, un mets si rare aujourd'hui... Aely est un mets dont je veux profiter. Ses mains se baladent sur mon dos, les miennes aussi. Nos lèvres ne veulent pas se décoller. J'ai tellement besoin d'amour disait la chanson. Moi aussi. Je ne m'en rendais pas compte, mais maintenant qu'elle est là...

Aely s'en est allée. Je ne sais toujours pas si je l'aime, mais j'aurais appris que certains soutiens-gorges se décrochent par l'avant. Juhin ne devrait plus tarder à rentrer. En attendant, je refait mon lit, me rhabille dans la salle de bain. Je parierais cher pour revivre ce moment immédiatement...

Juhin rentre. Je suis sous la douche et l'entend gueuler : "Alors ? C'était bien ?"

- Comment tu sais qu'elle est passée  aujourd'hui ? Je crie à mon tour.

- La prochaine fois, rappelle lui de récupérer son soutien-gorge.

Je l'entend dire tout bas : "tiens, il s'ouvre par l'avant."

- Ah mince ! Bon, ben je vais même pas pouvoir te cacher mon après-midi démentiel !

- Torride, je dirais ! Corrige-t-il.

Mais comment a-t-elle pu l'oublier ici, celle là ? Bref, je sors de la douche, fais un grand sourire gêné à Juhin, récupère le soutif et le met dans mon armoire. Ça aura le mérite de la faire revenir...

En effet, une heure plus tard, j'entend timidement frapper à là porte. La petite bouille d'Aely se dévoile par l'encadrure de la porte.

- Tu vas jamais deviner quoi ! Lance-t-elle. En rentrant dans ma chambre, je me suis sentie toute légère. J'ai oublié mon soutien...

Elle voit Juhin

-...gorge... finit-elle.

Juhin rigole.

- Je suis au courant ! C'est moi qui l'ai trouvé !

- Oh... euh...

Je vais le chercher, le lui tend. Elle me sourit. Mais elle repart vite car elle n'est pas censée être ici.

Juhin est mort de rire, et moi tout honteux.

Mais ça nous fait oublier nos soucis, au moins...

Un médecin rentrer dans la chambre, il prévient Juhin qu'il pourra partir demain. Je serais à nouveau seul. Seul à ruminer ma douleur. Seul à attendre ma mort. Juhin voit ma tête triste et me dit :

- T'inquiètes pas ! Je viendrais te voir parfois ! On est plus qu'unis !

- On est reliés ! Je complète.

Il me fait un grand sourire. Depuis qu'il est dans ma vie, tout va mieux pour moi. J'ai moins mal, je dors mieux, je rigole... Son absence va laisser un grand vide. La télé seule sera là pour combler le silence. Je ne veux pas qu'il parte... Juhin...

Le lendemain, dans l'après-midi, les parents de Juhin viennent le chercher. On se sert fort dans nos bras. Sa douce chaleur, je vais sûrement l'oublier. Oui, il viendra parfois me voir. Mais les jours où il ne sera pas là, je sais déjà qu'ils vont être longs et durs à vivre... Même Aely ne le remplacera pas. Notre lien est trop puissant. Je lui insuffle ma vie. Il vit grâce à moi. Il en est conscient. Il me dit souvent qu'il me revaudra ça ! Mais quand ? Quand je serai trop malade pour profiter de son cadeau. Quand je serai mort ?

Un dernier sourire.

De dernières paroles.

Une porte qui se referme.

Un silence accablant.

Au revoir Juhin.

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