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Il y des jours où tout est noir. La ballade dans le parc m'a fait oublier un instant Aely. Mais une fois finie, je me souviens de tout, et mon malheur m'arrive en pleine face. Il me percute, me transperce, et reste ancré dans mon cœur. Juhin le sent bien, que je vais mal... Mais il ne sait plus quoi faire.

Ma machine bipe. Elle me rappelle que mon état se dégrade. Qui sait si dans un mois, je serais toujours là ? De plus, mon bras gauche a beau être paralysé, il me fait parfois aussi mal que si on le brulait au cinquième degré après l'avoir écrasé au rouleau compresseur. J'en peux plus... Il faut que ça s'arrange... Je ne veux pas me laisser dépérir de la sorte...

Juhin va bientôt sortir de l'hôpital. Il me promet au moins deux visites par semaine. Plus celles de Zack et Dyun, je devrais avoir cinq visites par semaine. Mais les visites ne me font qu'oublier que je suis malheureux, avant d'être à nouveau pris par le désespoir.

"Pour connaître un grand malheur, il faut avoir connu un grand bonheur." Je donnerais tout ce que j'ai pour revenir il y a deux ans en arrière. Voir plus de deux ans. Quand est-ce que tout a commencer ?

Quand j'avais dix-sept ans... On a compris que j'étais Insu. Cela faisait à l'époque sept ans que je donnais ma vie à un inconnu. Maintenant je sais que cet inconnu est Juhin. Mes parents m'ont alors soutenu. J'allais encore plutôt bien.

J'ai pu garder une vie normale jusqu'à mes vingt ans. Je venais de finir mes études. Et là, tout a dégringolé. D'abord de gros maux de tête. Parfois des malaises. Mes amis qui ne m'avaient pas déjà quitté me laissèrent. Sauf Zack, qui me soutenait. Il m'aidait. Mes parents étaient encore là.

J'ai ensuite eu vingt-deux ans. Il a fallu que je reste enfermé à l'hosto. Pour toujours... La même année, mes parents sont morts. Mon père d'abord, dans un accident du travail. Il construisait des bâtiments, c'était un ouvrier. Un bâtiment très haut. Aucune sécurité. Une chute. La mort. Ma mère ne s'en remit pas. Elle se laissa mourir. Elle allait perdre son fils unique. Elle avait perdu l'amour de sa vie. Elle ne mangeait rien, ne dormait pas... C'est limite si elle buvait de l'eau. Elle est morte d'épuisement. Je fut en partie détruit. Mais à l'aide de Zack, et d'Aely, que je venais de rencontrer, je me suis reconstruit. Je garde de mes parents un délicieux souvenir.

Puis à mes vingt-trois ans, j'allais très mal. On m'a alors "offert" ma machine. Elle me maintenait et me maintient toujours dans un état stable. Elle est relié à mon bras gauche par un tuyau, qui aboutit en une petite seringue, planté dans ma veine. J'étais à la fois heureux de ne plus avoir mal, mais triste de perdre le peu de liberté qui me restait. Heureusement qu'il me restaient encore les ballades quotidiennes.

Mes vingt-quatre ans ressemblaient fortement à mes vingt-trois.

Puis vous connaissez la suite. Juhin, Zack et Dyun, ma fugue, puis Aely...

Tout ça pour ça ! Tout ce combat pour que je me sente comme ça ? Non ! Il faut que je me relève ! Il faut que le sourire retrouve une place chez moi ! J'en ai besoin ! C'est vital ! Je vais me reprendre en main ! Il faut que je sorte de cette torpeur funèbre...

Je sors de mes pensées lorsque Juhin rentre dans la chambre. Il était allé se balader un instant. Il me ramène un gros sachet de friandises. Avec son grand sourire, on dirait un gamin fier de sa surprise. Je lui dis merci et prend un berlingot. Il s'assied sur son lit, respire un grand coup. Il me regarde, et commence un long discours :

- Alors, voilà. Exedan. On sait tous que tu ne vas pas bien en ce moment. Aely t'a déçu... Tu as mal... Tu penses à la mort...

Je le coupe :

- Comment tu sais ça toi ? Que je pense à la mort ?

- Tu en parles dans ton sommeil... Enfin bref... Alors... On s'est dit, avec l'accord de mes parents, que... Qu'on... Que l'on allait faire une collocation. On va te faire une chambre spécial pour que tu puisses recevoir tes soins. On a déjà trouver une maison pas loin de l'hôpital. Zack et Dyun seraient des nôtres. Tandis que moi, je m'inscrirais à la fac qui n'est pas loin de l'hôpital. Dyun entrerait à l'école. C'est tout réfléchis, Zack est entièrement d'accord... Il ne manque que ton avis et... Et voilà...

Ouah ! Quelle proposition ! Il y a quelques minutes, je me disais que je retrouver le sourire ! Voilà comment je vais faire ! C'est tout réfléchit ! J'accepte !

- C'est d'accord ! Hurlé-je.

- Oh ! Euh... Quel enthousiasme ! Tu es sûr ?

- Oui, je suis sûr ! Laisse moi prévenir Zack !

Juhin est tout étonné. Il m'emmène jusqu'à un téléphone. Fixe. Les portables n'existent plus. Ils émettaient trop d'ondes, mauvaises pour la santé. J'attrape le fixe et compose le numéro de Zack.

- Voui allôôôôôô ? Décroche Dyun.

- Dyun, passe moi Zack tout de suite !

- C'est quiiii ? Demande Dyun.

J'entends les pas de quelqu'un qui court, puis un gros badaboum dans le combiné. Et Zack hurle de douleur en râlant contre "cette satané table basse." Ça doit être sympa à voir, pensé-je.

- Papa ! Y a quelqu'un dans le téléphone. Il veut parler à toi.

- Oui, je sais !

J'entends le téléphone que passe des mains de Dyun à celle de Zack.

- Allô Juhin ? Alors il a dit quoi ?

Je prend tout l'air que mes poumons peuvent contenir, puis hurle :

- C'EST D'ACOOOORD !!!!!

- Merci Exedan de me rendre sourd. Dit Zack d'un air blasé, avant de reprendre. Quoi ? Tu es d'accord ? Mais c'est super ça ! Par contre ça ne se fera pas avant un petit mois, le temps que l'on déménage tout avec Dyun... Et que l'on prépare ta chambre... Et....................

Je n'écoute plus ce qu'il dit. Je suis trop heureux pour ça...

Le sourire a retrouvé l'adresse de mon visage !

Juste pour VivreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant