Chapitre 4

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Un seul et unique son résonnait dans la pièce, froide et lugubre. Les grandes baies vitrées censés apporter de la lumière à l'endroit, ne faisait que l'assombrir plus. La lumière entrant n'était en aucun cas éclatante mais lourde et sordide. Le métronome, placé sur le grand piano, remplissait la pièce de son simple son. Une danseuse devant le miroir regardait ses pieds, enveloppé de ses chaussures de danse, des pointes comme l'on appelait ça. Elle releva la tête pour faire face à son reflet. Elle retint un hoquet de surprise, autour d'elle il n'y avait plus d'île, plus de mer qui s'étend à l'infini, plus de Derek. Ses cheveux étaient tirés en un parfait chignon, qu'elle avait l'habitude de faire il y a de ça un an et demi. Sa peau était blanche et éclatante contrastant avec la pièce. Une pièce dans laquelle dans le passé, elle restait plus de cinq heures, sans s'arrêter de dansé. Cette pièce ne ressemblait en rien à celle de ses souvenirs. Une musique jouait en fond, elle reconnut le Boléro de Ravel. Une musique qu'elle aimait mettre pour se défoulée. Une voix la fit sursauter, elle se retourna et vit son ancienne instructrice. Un bâton de bois entre les mains, impatiente, d'un air sévère, le regard dur. Elle commença un décompte, signifiant le début de la chorégraphie. Cali débuta sa chorégraphie comme elle savait si bien le faire. Plusieurs fois et plus rapidement elle dut recommencée. Elle s'arrêta un instant pour reprendre sa respiration. Son instructrice grogna signifiant son désaccord. Et tapa son bâton de bois dans sa main démontrant son impatience. Le stress monta au fur et à mesure, Cali ne comprenait pas ce qui se passait. Son instructrice, Mlle. Blanche, n'avait jamais été aussi dure avec elle. Elle répéta sa figure préférée, un tour fouetté suivi d'un saut de biche et enfin la figure finale le grand jeté. Cali n'eut pas le temps de comprendre, qu'un craquement suivi d'un relâchement ce fit ressentir. Une douleur perçante et percutante la parcourut. Elle se réceptionna comme elle le put, mais n'empêcha pas sa chute. Son crie résonna dans toute la pièce obscure. Mlle. Blanche ne cilla pas, elle lui ordonna de se lever pour recommencer. Cali se retourna vers elle, les larmes dévalant ses joues avec une vitesse fulgurante. Son visage était tordu de douleur. Sa voix ne sortait pas, elle voulait intimer à Mlle. Blanche d'aller se faire voir mais avant d'appeler une ambulance et ses parents. Mais rien ne sortait, elle ne put prononcer aucun mot, la douleur était bien trop grande. Soudain elle comprit ce que c'était. Ses parents et son médecin l'avait déjà averti plusieurs fois à ce sujet. Mais elle ne les écoutait pas. Danser était sa façon de s'exprimer, un besoin vital. Aussi vital que de respirer. La Danse la libérée de toutes contraintes, de tous ses tourments extérieurs. Elle sentit un déchirement au fond d'elle. La Danse pour elle, c'était finis à présent. Elle devra enlever la seule source de bonheur, de joie et de liberté, de sa vie. Elle ne ressentira plus jamais le stress se mélanger à l'euphorie avant de se produire sur scène. Elle ne sentira plus cette impression de voler pendant ses grands jetés ou tout autre saut. Elle suivra plus la musique comme elle aimait tellement le faire. Elle ne sentira plus la soie de son corset de ballet, ou la voile de son tutu faire comme un nuage autour de sa taille. Elle ne portera plus jamais ses pointes la faisant s'élever, lui procurant l'impression d'être une géante. Fini tous les galas et les ballets de danse. Les représentations solos ou les concours. Une énorme partie de sa vie venait de basculer et plus rien ne serait pareille. La douleur présente dans ses jambes n'était rien comparer à l'énorme trou béant dans sa poitrine, qui ne serait plus jamais rempli. Un énorme vide s'est installé dans son cœur. Et plus jamais il ne s'en ira.

Je me réveillai dans un sursaut. Le cauchemar que je venais de subir était plus un souvenir. Un mauvais souvenir. Ce jour-là à cause de l'entrainement intensif que j'avais subi, ma maladie s'est malheureusement déclenchée. Mon père n'avait pu s'empêcher de me balancer le fameux «Je te l'avais dit.» Comme si cela allait me réconforter. Ma mère l'avait réprimandée dans la cuisine, pensant que je ne les entendais pas. Je ne remarquais pas tout de suite que j'avais réveillé l'énergumène couché à côté de moi. Je sentis sa main sur mon épaule, je l'envoyai balader d'un seul coup de main. Tout en essuyant la larme qui avait malgré moi coulé sur ma joue, je me retournais vers lui. Je l'interrogeais du regard et lui aussi.

Les NaufragésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant