Petits mensonges et grande frayeur.

2. Un fâcheux malentendu

" Waouh ! T'as trop de chance d'être déjà monté dans un avion de chasse !  Moi, mon père est boulanger, alors tout ce que j'ai réussi à faire c'est monter dans sa camionnette quand il fait sa tournée. Au fait, Nat, c'est sympa comme prénom, plus sympa que Gaspard ! J'ai un petit cousin qui a 7 ans. Dans la famille, tout le monde l'appelle Nat. Mais en vrai, son prénom, c'est Nathan. Et toi, c'est quoi ton prénom ? Nathan ? Nathanaël ?..."

- C'est une catastrophe, Emilie ! Il me prend pour un garçon !

- Ca se complique ! admet-elle. Mais que lui as-tu raconté à part que ton père pilotait des avions de chasse ?

- Ben, pas grand chose... Que j'ai 10 ans, que ma matière préférée à l'école, ce sont les arts plastiques... Et puis que j'étais fan de Tony Parker, vu qu'il pratique le basquet ! Et aussi que je faisais de la boxe.

- De le boxe ? manque de s'étrangler Emilie.

- J'ai pensé que la danse, il trouverait ça ringard. 

- De là à lui raconter que tu pratiques la boxe ! Tu t'es mise dans de beaux draps ! Mais pourquoi ne pas simplement lui avouer la vérité ? Cela t'évitera de lui bâtir un roman à chacune de tes lettres.

- Lui dire la vérité ? Il va se moquer de moi, c'est sûr !

- Mais qu'est-ce que tu vas inventer la prochaine fois ? Que tu collectionnes des petites autos, que ton rêve serait de devenir mécanicien ?

- Je sais... C'est compliqué ! Mais maintenant, j'aurais l'air idiote si je lui avouer que je suis une fille ! Je ne sais plus quoi faire..., dis-je d'une voix plaintive. Tu ne voudrais pas rester dormir ce soir chez moi ? On pourrait discuter et tenter de trouver une solution.

-  Pas possible. Ce soir, je dois garder ma petite sœur.

- Samedi alors ?  

- Samedi, Océane m'a invité à une présentation de twirling. Elle se produit à quelques kilomètres d'ici. Et après son spectacle, on ira manger au resto avec ses parents.

- Pffff... T'as vraiment trop de chance ! fais-je en secouant la tête.

Emilie se contente de relever l'angle de sa bouche pour exprimer sa sympathie.

Que pourrait elle répondre ? Rien. Ce n'est pas de sa  faute si la maîtresse s'est mis en tête de nous faire correspondre avec les élèves d'une autre classe de CM1. Il faut seulement espérer que des idées comme celle-ci, Madame Chabanel n'en aura pas trop souvent ! Parce qu'à cause d'elle, une fille que je ne connais pas et qui habite à quelques centaines de kilomètre de chez moi est en train de me piquer ma meilleur amie ! Sans parler de ce garçon, Gaspard, qui croit sans doute que je passe tous mes moments de loisirs dans une salle de boxe à taper dans un sac de paille !