Chapitre 37

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Pdv Camila

Liberée l'espace d'une journée de la hantise qui m'accompagnait désormais quotidiennement, je profitais de cet après-midi ensoleillé avec mes amies, bien décidée à oublier rien que temporairement mes soucis. Mais faire abstraction de ce qui vous poursuit et vous habite chaque jour se révélait bien plus compliqué que ce que je n'aurais pu l'imaginer. Même durant un jour de repos, mon cerveau trimait pour trouver une solution, la clef de tous ces problèmes mais la tâche se révélait ardue et les idées ne se bousculaient pas vraiment dans mon subconscient. Toutes mes tentatives n'étaient jusqu'ici qu'échecs et punitions, à chaque fois plus durs que les précédents. Je n'avais plus le droit à l'erreur. Si j'échouais dans ma quête encore une fois, je pouvais être sûre de voir mes efforts et mes privations réduits à néant, rendant ces mois vides et douloureux inutiles et risquant de perdre à jamais ce pour quoi je me battais et me tenais encore debout face aux menaces et aux coups. Il n'y avait qu'elle pour me forcer à repousser les limites que je dessinais à chaque fois que je croyais ne plus avoir les forces nécessaires pour aller plus loin. Elle qui me haïssait désormais, elle qui ne voulait même plus entendre parler de moi, elle que je semblais avoir complètement changé, elle qui avait oublié toute sympathie à mon égard et qui m'appelait Karla quoique non, elle ne m'appelait même plus, elle que j'avais brisé. Elle ...

Y avait-il un jour où l'idée de l'embrasser et de tout lui avouer ne naissait pas dans mon esprit ? Pouvais-je passer une nuit complète sans me réveiller dans ma morne solitude pour geindre son prénom en pleurs, comme si j'avais fait un cauchemar sauf que je le vivais, ce cauchemar ? Arriverais-je à détourner mes pensées qui nous reliaient quoique je fasse ? Étais-je capable de traverser le fossé qu'elle creusait entre nous, quitte à chuter durement ? Aurais-je un jour une finalité à ce trop plein de questions ? Oh Lauren, pourquoi tout dois toujours être aussi dur ? Mais surtout pourquoi te posais-je la question alors que tu ne m'offriras jamais aucune réponse, laissant mes tourments intérieurs me bouffer ?

Toi Lauren qui reposait sur cette chaise longue, un livre de Stephen King dans les mains, un de ceux que tu avais lu des milliards de fois mais dont tu ne te lassais jamais et dont tu m'avais chantée les louanges, accompagné de ce fin sourire sur ton visage qui était totalement indéchiffrable et dont je ne connaissais pas les raisons, dis-moi pourquoi c'était tombé sur nous ? Ne pouvions-nous pas nous aimer et être heureuse en construisant notre vie à notre rythme ? J'imagine qu'elle me répondrait sûrement que si nous ne pouvions pas avancer main dans la main, c'était de ma faute et elle aurait raison en partie ... J'avais contre mon gré été l'engrenage finale de notre rupture et voilà maintenant où nous en sommes grâce à mes prouesses ... Et je me demandais si elle pensait à moi comme je le faisais, si j'étais son obsession, celle qui l'empêchait de dormir, celle de toutes les chansons d'amour et de ruptures, celle qui survint sans raison en plein milieu de la journée pour ne plus te quitter, celle qui te faisait pleurer et te donner envie de maudire le monde entier ... En tout cas, elle l'était pour moi. Elle était dans mes pensées où que j'aille, quoique je fasse. Et lorsque j'étais en sa compagnie, je n'étais guère capable de détacher mon regard de son être. Je la fixais avec désir et envie, comme je le faisais actuellement, et je profitais de loin de ce que j'avais perdu. Je touchais avec les yeux l'oeuvre d'art, la sculpture parfaite que la jeune femme était et dont je pouvais me vanter d'avoir redessiné les contours, d'avoir affirmé les finitions. Mais désormais, je ne pouvais même plus effleurer sa main sans qu'elle ne me fusille du regard et ne me repousse. J'avais tout perdu, tout.

Mais elle ne semblait pas le comprendre ou plutôt elle ne cherchait pas à le comprendre. Elle ne voulait plus rien savoir et tentait semblerait-il de tourner la page, d'oublier jusqu'à mon existence et elle y arrivait visiblement. Ça faisait longtemps que je ne l'avais pas vu aussi rayonnante, aussi joyeuse. Son bonheur composant en grande partie le mien, la voir reprendre du poil de la bête me rendait heureuse à son égard mais je ne pouvais m'empêcher d'avoir ce sentiment grandissant et persistant de peine, de souffrance. Chaque seconde qui passait l'éloignait de moi et j'avais la crainte qu'en m'oubliant et en me rayant de son coeur, elle trouve chaussure à son pied et se recase avec quelqu'un d'autre que moi. J'aimerais tant qu'elle m'attende, qu'elle reste mienne rien qu'un peu mais comment pouvais-je lui imposer ça alors qu'elle ne connaissait pas les ficelles de l'histoire ? Ses réactions étaient légitimes et tout à fait normales suite à une rupture et je ne voulais pas l'obliger à se morfondre pour moi. Alors j'acceptais, douloureusement mais j'acceptais quand même. Et j'usais de manière excessive des dernières possibilités que j'avais de profiter un temps soit peu de la noiraude, soit les rêves que je nourrissais encore avec elle et l'observation minutieuse de son si beau corps, aujourd'hui couvert d'un simple maillot de bain, de lunettes de soleil et d'un large chapeau. Et plus mes yeux se perdaient sur ses formes d'une éternelle blancheur, plus le sentiment de manque s'étendait en moi. Tout me manquait : ses mains sur mon corps, ses lèvres que j'aimais redécouvrir sur les miennes, ses yeux qui me dévoraient si souvent, ses mots doux qu'elle me glissait à l'oreille, ses caresses qu'elle déposait ici et là, ses attentions si plaisantes, si mignonnes, sa douceur qui me laissait parfois croire que j'étais en sucre, Lauren, Lauren et puis toujours Lauren ... J'avais tellement besoin d'elle et le pire, c'est qu'elle ne s'en rendait même pas compte.

Just I love you (camren)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant