- Chapitre 4 -

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Marchant en rond dans le hall de l'entreprise, je n'arrive toujours pas à me calmer. Mais qu'est-ce que je viens de faire ? Pourquoi j'ai agi sans réfléchir ? J'avais besoin de ce job. Il est hors de question que je dépende de mon père comme le font toutes ces filles à papa. Comment je vais faire maintenant ?

Je pourrais peut-être... Non, Forbes est tellement buté qu'il n'en a absolument rien à faire qu'une de ces stagiaires se fasse la malle. On a peut-être échangé quelques mots hier soir, mais ça s'arrête là. Pourquoi ferait-il une exception ? D'après ce que je sais, ce n'est pas dans sa nature d'être clément. Je sais que mon nom pourrait en intéresser plus d'un, seulement, pour lui, cela ne veut rien dire. Une personne comme moi est insignifiante pour un homme dans son genre. Je suis certaine qu'il doit même être en train de rire en ce moment.

Bordel, pourquoi est-ce que j'ai fait ça ?

- Caroline ! crie soudainement quelqu'un.

Je relève la tête et tombe sur Tom courant vers moi. Il a l'air si angoissé que cela en devient presque mignon. Est-ce parce qu'il est si touchant que je lui souris comme une idiote ? Aucune idée.

Malheureusement, ce bref instant est très vite effacé par lui... Gabriel est là, quelques pas derrière Tom. Je ne sais pas si je dois me sentir soulager ou bien avoir encore plus peur de lui... Tout ce que je vois c'est qu'il ne semble pas avoir envie de jouer.

- Mademoiselle Emerson, commence-t-il sèchement. Je crois qu'il faut que nous parlions. Seuls.

Gabriel regarde si froidement Tom que j'ai l'impression qu'il est à deux doigts de lui sauter dessus. C'est quoi son problème avec lui ? 

- Tu as besoin d'un dessin peut-être ? Alors, t'es gentil Théo mais les grandes personnes ont besoin de parler. Bouge de là, grogne Gabriel.

Tom, surpris par les paroles de Gabriel, essaie de dire quelque chose mais je ne lui laisse pas le temps.

- Ça va aller, dis-je en lui prenant la main. Tu peux retourner auprès des autres.

Il m'observe sans rien dire pendant quelques secondes. Je lui souris à nouveau, pour lui faire comprendre que tout va bien. Nous nous connaissons depuis à peine quelques heures maintenant et Tom est déjà si protecteur avec moi... Est-ce que je devrais faire attention à ce qu'il veut ? La dernière fois, j'ai... Non, c'est du passé. Nate n'est pas là, il ne peut rien m'arriver. Ne pouvant pas m'en empêcher, ma seconde main glisse sur la cicatrice qu'il m'a faite ce jour-là. Respire, Caroline. Respire.

Un léger mouvement sur ma droite, me fait sortir du cercle vicieux dans lequel je finis toujours par replonger. Je pose mon regard sur Gabriel qui s'impatiente de plus en plus. J'ignore si l'un d'entre eux à remarquer mon subit changement d'état. J'espère que non... Je demande une nouvelle fois à Tom de partir. Il hoche simplement de la tête et finit par me laisser seul avec Gabriel.

- Bon, qu'est-ce..., commençai-je à dire.

- Pas ici, me coupe-t-il durement.

Gabriel prend ma main et me conduit dans la première pièce qu'il croise. Manque de chance, il s'agit d'un endroit aussi minuscule qu'un placard à balais.

- Ta petite crise est passée ? Madame a montré à tout le monde qu'elle en avait dans le pantalon, tu es contente ? On peut repartir bosser, maintenant ? Parce que je n'ai pas que ça à foutre... Soit tu remontes avec moi, soit tu te casses de ma boîte.

Une minute... Il est vraiment en train de me donner une seconde chance ? J'ouvre la bouche pour accepter sa proposition, sauf que les mots que je prononce ne sont pas exactement ceux que j'avais en tête...

- Pourquoi une feuille blanche ?

Gabriel lève l'un de ses sourcils, je suis sûre qu'il n'avait pas prévu ce coup. Je suis si près de lui que j'arrive à voir cette minuscule petite veine grossir sur sa tempe quand il est frustré. Bizarrement, il ne me fait plus si peur...

- Je n'avais ni le temps, ni l'envie d'élaborer un plan béton pour vous faire bosser ce matin, dit-il simplement. Alors, une feuille blanche pour tester votre imagination m'a semblé être une solution parfaite. Simple et efficace.

Gabriel fait une pause mais reprend très vite la parole.

- Je ne devrais même pas être ici, murmure-t-il. Encore moins, être là pour te convaincre de revenir... Alors sérieusement Caroline, remonte pour que je puisse enfin me barrer de cet immeuble maudit.

Il ne manquerait plus qu'un " s'il te plait " et je pourrais très facilement croire que cet homme possède réellement un cœur.

Je ne savais pas qu'il n'appréciait pas son boulot. Après tout ce que j'ai entendu sur lui, cela ne devrait pas autant me choquer que ça. Gabriel est connu pour être un coureur de jupons, un type qui n'en a rien à faire d'être respectable, comme le disent si bien les amies de mon frère. Je suis certaine qu'il n'a jamais appris un seul des noms des personnes qui doivent nous attendre au huitième... Je pourrais peut-être y remédier.

- Il s'appelle Tom, vous savez. Le grand blond que vous avez effrayé tout à l'heure, continuai-je en voyant qu'il semble perdu.

- J'y étais presque... On peut remonter maintenant ? dit-il calmement.

- Pourquoi vous n'aimez pas ce travail ? Enfin, je veux dire que vous avez une chance inouïe d'être là. Un tas de gens rêveraient de prendre votre place vous savez.

- Encore et toujours des questions... Si tu acceptes de travailler pour moi, il va falloir que tu apprennes à te taire, Caroline. Je n'aime pas les gonzesses qui parlent sans arrêt, elles me donnent mal à la tête...

Lentement, son regard glisse sur moi. Un sourire satisfait naît, à peine quelques secondes plus tard. Je baisse timidement la tête pour voir ce qui le rend si soudainement joyeux. Merde, mon bouton. Il a dû s'ouvrir quand je suis partie en courant de son bureau. Depuis tout ce temps, j'ai les seins à l'air ?

***

Après quelques sous-entendus dont seul Gabriel à le secret, nous avons enfin fini par sortir de ce foutu ascenseur. J'ignore ce qui va se passer maintenant. Est-ce que je vais reprendre ma place comme si de rien n'était ou alors va-t-il jouer avec moi devant tous les autres, histoire de me ridiculiser comme je l'ai fait en me pointant dans son bureau... Avec lui, tout peut arriver.

Il ouvre la porte si violemment que tout le monde se tait en le voyant. J'entre derrière lui, tout le monde me regarde comme si j'avais la lèpre. J'avance vers mon groupe, sans rien dire. Tom et Stuart sont les seuls à me sourire, ce qui m'apaise légèrement.

- Vous pouvez disposer, lance Gabriel. Revenez demain, à neuf heures précise. Aucun retard ne sera toléré.

En disant cela, Gabriel pose rapidement ses yeux froids sur moi avant de quitter la pièce. Impossible de ne pas comprendre l'allusion qu'il vient de faire. Il m'a peut-être accordé une nouvelle chance mais je ne crains que ce soit la seule et l'unique. Je ne peux plus faire d'erreur désormais.

Tout le monde quitte la salle un par un. Certains chuchotent en me dévisageant, notamment les deux pouffes qui ont l'ambition de sortir avec Gabriel. Qu'ils parlent si cela peut les divertir, je ne vais pas m'abaisser à leur gaminerie.

En sortant, mon petit groupe de travail m'attend sagement.

- On a prévu d'aller boire un verre, ça te dit de nous accompagner Caroline ?

Sarah vient vraiment d'être gentille avec moi ?

- Avec joie. Je connais un petit bar sympa pas loin d'ici, si vous voulais je peux vous y emmener ?

- Ouais, génial, lance Stuart. Je préviens les autres et on pourra partir.

- Les autres ?

- Pendant ta petite... absence, intervient Tom. Nous avons décidé d'aller fêter cette première journée de boulot tous ensemble.

- Ah je vois. C'est euh... C'est super, dis-je en plaquant un faux sourire sur mon visage. Allons-y.

Together [ Caroline ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant