Nos joues nous brûlaient tant nous pleurions. Tous c'était passé si vite... Nos pères se sont battus vaillamment contre les mercenaires, au milieu des cris des femmes et des enfants tirés par les cheveux hors des chaumières en feu. Quel massacre se fut... Nous avons vu des femmes, des filles, des garçonnets être violés devant leurs familles, du sang, beaucoup de sang, coulant par torrent dans les pavages, ruisselant des épées, des cadavres tranchés... Quel horreur...
"ALLEZ ! DEBOUT LA DEDANS !"
Je sursautai. Le garde beuglait en tapant sur les barreaux de notre cage, à ce vacarme assourdissant vint s'ajouter les grognements des femmes qui se réveillaient. Alors que l'homme s'éloigna vers une autre cage, une femme près de moi l'injuria, dans un murmure à peine perceptible. Il se figea, revint vers nous, et la gratifia d'un violent coup de fouet.
"Tu veux répéter chienne !?"Elle se laissa tomber en avant.
"Monstre ! Bêtes zêtes, bêtes vous rest'rez !" hurla t elle, le visage tordu par la douleur.
Satisfait il rebroussa chemin. Marchant souplement pour éviter les femmes sur mon passage, je me précipitai vers la malheureuse. D'autres l'entouraient déjà, elles la plaignaient en observant la trace sanglante laissé par le cuir. Je poussai les observatrices et m'agenouillai à mon tour.
"Ma fille... ma peti'o'te...ou qu'elle est ?" se lamentait elle le regard dans le vague.
En me voyant des femmes murmurèrent entre elles, je savais ce qu'elles se disaient.
Tantôt j'étais une sorcière tantôt un ange, les récits de mes soins changeaient d'une bouche à une autre, j'étais connue dans toute la région. Suivant tous les regards, la femme se tourna vers moi. Ses yeux s'agrandirent, sa mâchoire inférieur se mit à trembler, et rampant au sol elle recula loin de moi.
"Diablesse ! Éloignez la !"
Elle tenta de me cracher à la figure mais la salive glissa devant moi comme stoppé par un mur invisible.
"Elle est pas comme nous, elle est d'mèches avec ces bêtes qui entendent tout et aux yeux d'chat !"
Certaines femmes se levèrent les yeux brûlant de haine, les autres detournèrent le regard, elles étaient de mon côté mais n'osaient intervenir. Je me cachai derrière mes mains les paumes mises en évidence.
"Non, s'il vous plaît, je peux guérir vos blessures....
- Et qui nous dit que tu ne vas pas nous jeter un sort ?"
Une robuste femme, aux mains rougit par les lessives, me siffla ses mots, me mitraillant du regard. Une autre plus jeune se leva et se fraya un passage entre les mégères furibondent. Elle portait un foulard noué derrière sa nuque qui supporté son ventre rond, ses jupons étaient déchirés et ensanglantés.
"Si vous ne voulez pas de son aide alors je lui en demanderais" dit elle timidement.
Elle s'agenouilla près de moi et pris mes deux mains dans les siennes.
"Ils m'ont prit mon père et mon amant, m'ont traîné avec d'autres, je fais partie de celles et ceux qui ont été violé à la chaîne comme un objet passant de main en main.... Je m'inquiète pour mon enfant"
Je posai mes mains tremblantes sur son ventre, et y déplacer mon esprit, un rapide coup d'oeil me suffit à constater l'ampleur des dégâts. À ma conscience je joignis une part de mon énergie que je répartis entre le foetus et le col de son utérus. Mes yeux retrouvèrent leurs éclats lorsque ma conscience regagna mon corps, je sentis ma tête me tourner. Je rompis le contact, prenant appuie sur le sol pour retrouver mon équilibre.
"L'enfant va bien, il a été un peu secouer mais je lui ai redonné un coup de pêche et l'ai remis en place. Les saignements venaient du col de l'utérus, ils n'y sont pas allé de main morte pour en venir à le déchirer. Bien entendu il est maintenant intact, plus fragile qu'à initiale mais intact"
Quand j'eus finis mon diagnostic, je levais les yeux vers mon auditoire, toutes me regardaient, effarées. Ma patiente me contemplait, les yeux humides.
"Merci ! Infiniment !"
J'aurais voulu leur faire un cours d'anatomie, leur expliquer qu'un rapport sexuel durant une grossesse n'était pas vraiment dangereux pour le foetus, que c'était même conseillé le plus souvent. Le pourquoi, le comment... Enfin... Elle n'aurait pas compris et cela aurait renforcé leur méfiance. J'ai juste souris. Après, deux groupes se sont formés: celles convaincu ont quéri mes services, les septiques sont restées en retrait me fusillant du regard. Attiré par le brouhaha, le garde en patrouille vint et cogna les barreaux de sa matraque.
"Un peu de calme là dedans ! Les acheteurs vont bientôt arrivés."
La jeune mère que j'avais soigné plutôt s'approcha:
"Je suis Alba"
Elle me tendis sa frêle main, avec un sourire bien veillant, j'en fis de même.
"Heriel.
- Tu n'as pas peur, Heriel ?
- Non.
- Pourquoi ?
- Pourquoi avoir peur, après ce qu'on a vu et vécu ?
- Qu'est ce qu'il va nous arriver ?
- Les plus belles partiront comme esclaves sexuel ou prostituées, les plus chanceuse seront seulement servante ou dame de compagnie."
Ces yeux s'ouvrirent grand et sa lèvre inférieure se mit à trembler. Elle se recrovilla, la tête entre ses mains.
"Pourquoi il a fallu que ça nous arrive ?
- Ils font toujours ainsi, ils mettaient à sac un village aux hasard et y prennent les jeunes gens pour les vendre au plus offrant.
- Comment tu en sais autant ?
- Je me renseigne, des connaissances par ci par là.
- Tu sais qui ils sont ?
- Ce sont tous des hybrides.
- Hybrides ?
- Des mutants. Mi-humains, mi-animal. Ici je ne vois que félin... Ils ont un penchant pour le plaisir charnel et le sadisme.
- Apprend m'en plus.
- Les hybrides possèdent les avantages de leurs deux patrimoines génétiques. Ce qui en font des combattants craints et haïs c'est surtout leur patrimoine animal: la nyctalopie et des sens trois fois plus aiguisés que les humains."
Le regard d'Alba s'était figés une expression de terreur collés sur le visage, je me tournai vers ce qu'elle fixait. Je tombai nez à nez avec une femme qui m'observait de derrière les barreaux. Ses cheveux blanc lunaire auraient pu tromper n'importe qui sur son âge mais son visage était jeune, un joli minois rond au menton en pointe, le nez fin et légèrement retroussé. Le plus intimidant était ses yeux, rouge écarlate strié d'une pupille perçant. Je frémis légèrement. Elle me sourit, ce sourire, immense et cruel était formé de petite dent tranchante.
"Salut soeurette"
Elle reserra son pourpoint sur ses épaules et héla un garde.
"Combien pour la brunette aux yeux de glace ?
- Vingt milles galg d'or.
- Je vous demande pardon ?
- C'est le prix d'une vie humaine, de plus ce spécimen est rare."
Le félin s'approcha et passa sa main entre les barreaux pour me saisir violemment la mâchoire. Il me tourne la tête en tous sens.
"Voyez donc. Peau parfaitement lisse, visage fin et gracieux; nez droit, pointu; des yeux bleu comme un glacier, légèrement en amande; de longues boucles brunes douce comme de la soie; sans parler de sa silhouette, divine dira-t-on."
Le menton reposant sur son pouce, la femme se tapotait l'arête du nez de l'index, perdu dans sa réflexion.
"Bonus. Car nous pensons à tous pour nos clients. Elle n'a aucune malformation, maladie, ou infection. Toujours vierge. Elle possède également de surprenant talent de guérison"
J'attendais, mon visage ne trahissait aucune expression. Ces hybrides me dégoûtaient, me jugeaient comme si j'étais un animal.
"Dix mille.
- Désolé mais face à un produit de telle qualité vingt mille est déjà un minimum.
- Regardez son regard farouche, prête à sauter à la gorge de n'importe qui essayerait de la mettre au lit, son don aujourd'hui bénéfique pourrait se révéler destructeur. Qui voudrait accueillir une tueuse sous son toit ? Onze mille.
- Un petit coup d'oeil dans son esprit vous suffira à voir que sa connaissance est grande.
- Onze mille.
- Entre hybride doté du sens des affaires je peux vous faire un prix d amis: dix-huit mille mais pas plus bas."
Elle soupira avant de jeter deux grosses bourses au sol, son interlocuteur lui adressa un grand sourire satisfait, puis il se tourna vers moi.
"Devant la porte de la cage et que ça traîne pas"
Je me tournai vers Alba. Pleurant à chaude larmes, elle saisit mes mains dans les siennes et me sourit.
"Nos routes se séparent ici, il semblerait. Ce fut un honneur de te rencontrer.
- Je te souhaite le courage et la santé Alba, à toi et ta fille.
- Ma fille...?"
Elle etouffa un sanglot de joie.
"Merci pour tous !"
Exaspéré notre geôliers foutta les barreaux d'un coup de cravache, créant un affreux froubissement dans le fer.
"Allez j'ai pas toute la journée"
Je me levai, me tenai prête devant la porte, quand le garde l'entrouvrit, je me glissai hors de ma prison. Un regard vers Alba me suffit à voir le foetus en elle au travers de la peau et des vêtements, je lui envoyai quelque lignes elfiques, une bénédiction.
"Ma Lilu, mon adorable Lilu," répétait Alba en caressant son ventre proéminent.
Je murmurai à moi - même:
"Cette petite est promis à un gloireux avenir"
Je me laissai docilement passer des entraves et ne bronchai pas lorsque le garde posa sa main au plus bas de mon dos pour me pousser vers mon acheteuse. Elle le salua et m'aida à monter sur son cheval, puis grimpa son tour, derrière moi.
"Tu sais galoper levée sans étriers ? chuchota l'hybride à mon oreille
- Je n'ai jamais essayer.
- Serre les genoux derrière ses bras et lève toi."
Je suivis ses indications.
"Saisit un bout de crinière, accroche toi et ne parle pas. Tu te mordrais la langue"
Derrière nous, le voix du garde retentit.
"HÉ, REVENEZ IMMÉDIATEMENT ! MALIGNE !"
Il courrut vers nous, arme au poing, furieux. La femme derrière moi fit claquer ses talons contre le flan de notre monture et nous partîmes au galop.
Je tentais de me maintenir en équilibre tandis que nous filions entre les arbres à vive allure, lorsque nous perdîmes notre poursuivant de vu, l'hybride murmura quelques mots mélodieux et un portail, tourbillon rougeoyant de brumes et de lumières, apparut devant nous. Le cheval fonça et s'y engouffra.
Quand nous en resortîmes, je rouvrai mes yeux pour contempler le paysage qui s'offrait à moi: perché sur une colline, nous pouvions voir un campement colossale bordé de forêt au sud, au nord comme à l'est, droit devant nous, à l'ouest, commençait une splendide vallée regorgeant de fleurs, d'herbes, de buissons et d'arbres fruitier, c'est dans ce tableau verdoyant que se dressait le campement formant un tapis de tente toute plus coloré les eux de les autres. Rien à voir avec Dencefleur, mon village natal me semblait maintenant bien misérable.
"Impressionnant non ? Bienvenue chez toi"
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L'Ordre de l'Hydre [EN COURS]
FantasyIl paraît que les rêves sont une fenêtre vers une vie antérieure ? Est ce que vous y croyez ? Croyez vous en ce récit ? Deux siècles après la guerre du Topaze, les conflits raciales continuent de menacer la paix fragile entre les continents. Suit...