Chapitre XVII

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Je suis assise sur le sol, auprès de Sam. Sa poitrine ne se soulève plus au rythme de sa respiration. Son corps devient de plus en plus froid, de plus en plus rigide. Mes larmes ne cessent de couler. Elles roulent sur mes joues, puis s'écrasent sur le sol, se mêlant au sang.

- Sammy, réveille toi. Tu ne peux pas me laisser seule, hurlais-je en frappant son torse avec mes poings.

Mes sanglots m'étouffent. Une terrible douleur me bloque la poitrine.

- J'ai besoin de toi, repris-je faiblement.

Des pas précipités se font soudainement entendre dans le salon. Ils se rapprochent. Un groupe de soldats pénètrent dans la chambre, précéder par la jeune noble, au visage ravagé par les larmes.

- C'est elle ! Elle est arrivée et a attaqué le général Razym, explique t-elle.

Les soldats m'encerclent, et m'attrapent. Je me débats avec une rage nouvelle, et m'allonge sur le torse froid de Sam. Je ne veux pas l'abandonner. Je ne peux pas. Ils tentent de me tirer mais rien y fait. Je me débat telle une furie, utilisant mes ongles comme arme.

Soudain, un objet lourd vient frapper ma tempe, et je glisse dans les ténèbres. La douleur va t-elle enfin cesser ?

*

J'ouvre mes paupières et me remémore difficilement les derniers événements. Sam est...mort. Et tout est de ma faute. Il m'avait dit de fuir. Qu'on aurait pu vivre heureux ensembles. Loin de Rubilacs. Il est mort par ma faute. Pour ma soif de vengeance. J'ai été aveuglé par celle-ci.

Aïe ! J'ai mal partout. Je suis de retour dans ma cellule. Il fait encore nuit noire dehors. Je pourrais tenter de m'évader, mais...pourquoi faire ? Plus personne ne m'attend. Razym a finalement réussit à me briser. Il ne me reste plus rien dans ce monde.

Tandis que mes idées noires envahissent mon esprit, on déverrouille la porte de ma prison. Le prince Elric s'introduit discrètement dans la petite pièce. Il referme la porte sans la verrouiller, et s'agenouille à côté de moi.

- Il est mort, lui dis-je. Sam est mort.

En réalité, j'essaye surtout de me le faire comprendre à moi-même. Elric ne dit rien et attrape ma main. Plusieurs minutes s'écoulent ainsi, en silence. Puis il prend la parole, me sortant de mes pensées :

- Allons, venez Enora. Il faut partir.

- Et pour aller où ? Je n'ai plus rien ! Razym m'a tout pris...

- Restez ici ne vous aidera pas.

Je plonge mon regard humide dans ses yeux bleus. Quelque chose brûle dans son regard. De la détermination ? Oui, il veut m'aider. Il me tire doucement pour me forcer me lever.

Sans me lâcher, il me guide dans les sombres couloirs, éclairés par seulement quelques torches. Arrivé aux escaliers de pierre, je suis surprise de constater que nous descendons dans les entrailles du château. Malgré ça, je ne fais aucune remarque et me laisse guider.

Nous arrivons devant une grille en fer. Elle est verrouillée, et on entend le clapotis d'un cour d'eau se trouvant à proximité. Elric sort son trousseau de clés et ouvre la grille. Une fois passé, il l'a referme, et nous poursuivons notre chemin. Un long couloir se présente à nous, traversé par une rivière. Enfin, une pâle lumière crée par la lune nous annonce la sortie du tunnel.

- Je ne peux pas aller plus loin, me dit Elric en me lâchant la main.

- Merci. Merci pour tout, mon prince. Mais, sans vous...je ne sais pas si j'aurais la force de...

- J'aurais aimé partir avec vous, mais c'est impossible. J'ai des devoirs, des responsabilités. Je suis le seul héritier de la couronne, après tout, dit-il en souriant.

Je me retourne, et fais face à ma solitude.

- Elric ?

- Oui ?

- Pourquoi faites-vous tout ça pour moi ? lui demandai-je.

Je sens qu'il s'approche, et vient se placer en face de moi. Il prend ma tête dans ses mains, et pose délicatement ses lèvres sur les miennes. D'abord surprise, je ne bouge pas. Puis je passe mes mains sur son cou et colle mon corps au sien. Il passe sa main dans mes cheveux et intensifie ce doux baiser. On se sépare doucement, et des larmes roulent sur mes joues. Il me serre contre lui.

- Merci pour tout, Elric. Je vous serez éternellement reconnaissante, mais...je ne peux pas.

Sur ces mots, je recule puis m'éloigne en courant. La lune, encore haute dans le ciel, éclaire faiblement mon chemin. Je fuis le plus loin possible de cette ville maudite.

L'Assassine de l'OmbreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant