Parvenu devant la petite niche qui sera récipiendaire du calice, Monseigneur Alban hésite un instant et lève la tête. Son visage affiche un air triste qu’il ne réussit plus à cacher. Le rideau en velours rouge de la niche le replonge dans les souvenirs douloureux d’un soir pluvieux qui avait vu sa foi de Saint homme ébranlée.
Deux saisons auparavant, le roi l’avait fait venir dans la salle du trône. C’était un soir pluvieux qui avait marqué le Saint homme. Les orages avaient forcé toutes les unités de la garde royale à rentrer. Ils avaient eu besoin des soins et des onctions saintes jusque tard dans la soirée. Un garde était venu le chercher peu avant qu’il ne décide de prendre un peu de repos avant de s’apprêter pour une longue nuit de veille auprès des hommes. Il avait été conduit dans la salle du trône. Le roi avait surgi de derrière des tentures épaisses. Il lui avait ensuite demandé de le suivre dans un corridor mal éclairé. Il n’y avait pas de courants d’air dans cette partie. Il fallait croire que de nombreuses salles et une enfilade de couloirs les menaient plus avant vers l’intérieur du palais.
Le roi s’était arrêté sans le prévenir devant une porte basse. Il avait pris une grosse clé suspendue à une corde fine, cachée sous son pourpoint. Il était passé le premier. Monseigneur Alban l’avait suivi quelques secondes après, à petits pas lents et précautionneux.
Il n’était jamais venu dans cette partie du palais. La pièce n’était pas vaste. Elle était éclairée par une cheminée et des torchères accrochées au mur opposé. Une lumière vacillante lui avait permis d’identifier une petite table carrée au centre de la pièce et des étagères garnies de flacons et de sachets en toiles de couleurs. Un gémissement lui était parvenu d’un coin de la pièce, vers lequel il s’était aussitôt retourné. Ses yeux étaient tombés sur le dos d’un serviteur qui était au chevet d’une silhouette allongée sur une paillasse. Il connaissait celui-ci, il l’aurait reconnu sans problème. Sa tonsure et sa carrure étaient sans l’ombre d’un doute celles du jeune homme qui l’aidait parfois dans la préparation des onctions saintes et de ses remèdes médicinaux. Celui-ci présentait la particularité d’être né sourd et muet. Il était d’une fidélité sans faille au service royal. Passé le moment de surprise, et après un bref coup d’œil au roi qui restait immobile au milieu de la pièce, il s’était avancé au chevet de la personne allongée. Il avait posé une main douce et amicale sur l’épaule du serviteur pour le prévenir de son arrivée. Celui-ci lui avait jeté un regard surpris. Il s’était immédiatement écarté en le reconnaissant et le Saint homme avait pu s’agenouiller à côté de la paillasse.
À la vue de la jeune femme immobile, allongée sur le dos, Monseigneur Alban s’était retourné vers le roi, l’air interrogateur. Il n’avait tout d’abord pas pu cacher sa désapprobation. Un temps plus tard, il avait retrouvé toute la déférence qu’il devait au roi.
Son cœur s’était étreint à la vue de la jeune femme. Sa peau était luisante de transpiration. Elle était en proie à une forte fièvre qui la faisait gémir de douleur. Ses longs cheveux bruns étalés sur sa couche faisaient une couronne autour de sa tête et de son cou. Elle ne semblait pas s’être aperçue de sa présence.
Le roi s’était approché. Lorsque Monseigneur Alban s’était retourné, il avait constaté qu’il souhaitait cependant rester à distance. De là où il était, il ne parvenait pas à déchiffrer l’expression de son visage, la lueur des flammes dansait sur un seul côté de son visage.– De quelle sorte de fièvre s’agit-il ?
Le roi ne lui avait pas répondu. Il avait les yeux fixés sur la jeune femme.
L’homme de médecine s’était soudain retourné vers la jeune femme. Elle venait d’entendre le son de sa voix et s’était agrippée à son bras. Elle lui avait lancé un regard suppliant, avant de sombrer à nouveau dans un état d’inconscience agité.
– Elle est aux prises avec la plus puissante des forces hérétiques qu’il m’a été donné de connaître, avait alors répondu le roi, d’un ton égal.
Monseigneur Alban savait que, depuis son arrivée au pouvoir, le roi s’attachait à poursuivre et réprimer toute expression de magie. Il ne faisait pas confiance aux porteurs de magie, les sorciers des Plaines. Il l’avait déclarée interdite et encouragé le retour aux croyances passées. Les païens avaient ressorti leurs icônes et les Saintetés avaient à nouveau pu être célébrées dans toutes les chapelles, avec l’aval et le soutien du pouvoir royal.
Les Saint hommes avaient ressurgi. Les hommes de médecine avaient été parmi les hommes les plus recherchés pour exercer cette fonction et le pouvoir royal avaient voulu en disposer d’au moins un.
– Qu’a-t-elle subi, exactement ?
Monseigneur Alban pressait le roi de lui répondre, sans prêter attention aux signes qui auraient dû l’alerter. Le serviteur sourd et muet dansait sur ses deux jambes, mal à l’aise. Mais il n’en avait cure.
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Les Sorcier Des Plaines
FanfictionUne histoire de sorciers qui vous fait vivre de la magie. Ça vous fait plonger dans un monde légendaire où vous pouvez imaginer et relaxer . L'histoire parle de trois sorciers suivis par des gardes royal..je vous laisse découvrir la suite. Bonne lec...