Vérité

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Assise au coin du feu, dans la maison des Potter, Rose écrivait distraitement quelques poèmes sans suite en se laissant porter par l'Hiver de Vivaldi.

A son arrivée quelques jours plus tôt, son cousin James lui avait d'emblée précisé qu'il s'agissait d'une tradition dans la famille Potter : chaque réveillon se célébrait en fanfare par une semaine de Vivaldi, et autres concertos de Noël. Puis il avait monté le son.

Si elle avait fait mine de s'en amuser, au début, à présent Rose ne rechignait plus à entendre les mêmes mélodies tous les jours dès sept heures du matin. Elle s'était même surprise, une fois ou deux, à remettre en marche la musique lorsque celle-ci s'était arrêtée. Elle aimait particulièrement l'Hiver de Vivaldi, justement. Au-delà de la vivacité du morceau, et de la simplicité du propos, il y avait tout simplement une beauté pure qui la touchait, chaque fois que le premier violon entamait son solo. Rose adorait le violon.

Il n'était pas vraiment de mise dans la famille Weasley d'étudier la musique, et aucun de ses deux parents n'étaient musiciens, aussi n'avait-elle jamais vraiment touché à un instrument de musique. Elle le regrettait un peu, aujourd'hui – pas suffisamment pour partir s'acheter un violon du jour au lendemain. Elle savait que chez les Malefoy, la situation était un peu différente. Les rares fois où elle avait surpris son beau-père évoquer son enfance au Manoir de ses parents, il avait laissé deviner une ambiance sombre et silencieuse, où chaque son, chaque émotion se devait d'être étouffé par respect des bienséances. Néanmoins, Drago Malefoy avait appris le piano. Seul instrument jugé assez noble – avec le violon – pour en tolérer le chant. Hermione avait un jour demandé à Malefoy si Scorpius avait lui-même été initié au piano, mais il avait répondu que non. Astoria l'avait forcé à prendre des cours avec un précepteur particulier dès ses quatre ans, mais Drago l'avait fait cesser au moment de leur divorce, deux ans plus tard. Depuis, il s'était confié avoir hésité entre ce qu'il considérait comme une éducation solide et complète, intégrant donc la musique, et l'héritage d'une tradition familiale avec laquelle il voulait rompre. Il n'avait pas choisi. En emménageant en Bulgarie, il avait demandé au tout jeune Scorpius ce qu'il voulait faire, et au lieu d'un piano, Scorpius avait demandé un télescope. La question du piano avait été réglée ce jour-là.

Rose se surprit à sourire à l'évocation de ces discussions qu'elle ne se rappelait même plus avoir gardées en mémoire. A l'époque, elle se faisait un point d'honneur à ignorer tout sujet de conversation autour d'elle, à moins qu'il ne soit question de son père. Inconsciemment néanmoins, l'empreinte en était restée. Combien d'autres fragments de la vie des Malefoy gardait-elle ainsi enfouis dans son esprit ?

Une part d'elle osa s'avouer qu'elle n'avait plus besoin de ces vieux souvenirs désormais : elle s'en était créés de nouveaux, et peut-être que l'année à venir lui en apporterait d'encore plus beaux.

Elle ne questionna pas ces réflexions. En pleine période de vacances, elle était fatiguée d'analyser sans cesse le flux de ses émotions, aussi se sentait-elle soulagée de simplement laisser couler ses pensées, là sur le papier, sans se soucier d'autre chose que de la température de son thé ou des compétences culinaires d'Albus.

Rose avait tenu sa promesse faite à elle-même dans la Tour d'Astronomie. Elle avait écrit à sa mère et à sa sœur, deux fois. Elle n'avait d'abord fait que quelques allusions à ses cours et à l'ambiance générale de Poudlard, puis, devant les réponses chaleureuses de sa mère, elle avait osé lui demander une faveur : passer la première moitié des vacances, qui aurait dû revenir à Ron, chez Harry et Ginny. Son oncle et à sa tante vivant en centre-ville, Rose espérait ainsi pouvoir rendre visite à son père, et passer une partie du réveillon avec lui, pour qu'il ne soit pas seul en ces fêtes de Noël. Une manière pour elle de lui dire que rien n'avait changé. Qu'il serait toujours son père et qu'elle viendrait toujours le voir, quoi que la justice en déciderait.

A Coeurs Perdus : 2e Génération (Scorose)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant