Partie 2 - Chapitre 6

2K 173 52
                                    

" - Grouillez-vous, on a pas toute la journée ! Putain mais c'est quoi ces gardes du corps !? Ils sont attachés tous les deux, vous avez juste à les prendre et à les traîner ! "

Je grogne en essayant d'apercevoir le visage de la personne qui parle. Après tant de temps dans le noir complet, la lumière agresse mes yeux comme une centaine de petits couteaux et j'ai du mal à les tenir ouverts. Apparemment, le gars qui crie avec cette voix grasse de porcelet porte une blouse blanche. Oh, je n'aime pas ça. Il est encadré par quatre autres gars, qui font au moins six fois sa taille (j'exagère), et qui ne semblent pas décidés à faire le moindre geste vers nous. 

" - J'ai vraiment besoin de vous PUTAIN de montrer comment faire VOTRE job !? "

Les quatre hommes habillés en noir ne semblent pas d'accord avec les propos de celui en blanc, mais il ne leur laisse pas le temps de protester et s'avance vers nous. Jack se tend et resserre son emprise sur moi, décidé à ne pas me lâcher. Adorablement inutile. Le blouseux (ce jeu de mot, applaudissez) m'attrape violemment par les cheveux, m'arrachant un petit cri de chiot pitoyable, et me tire d'un coup en dehors de la minuscule pièce. Attaché comme il l'est, Jack ne peut même pas avoir l'espoir de me retenir et je m'échoue lamentablement sur le sol dur et immaculé. Ma tête heurte brutalement le plancher lorsque ce connard relâche mes cheveux. Je geins de la façon la plus ridicule au monde et essaie de me redresser. Une botte posée avec violence dans mon dos m'en empêche, et une main attrape alors mon menton pour tourner mon visage vers les quatre baraqués en noir.

" - Vous voyez ? Inoffensive, comme un agneau. Elle ne vous fera rien, messieurs, et l'autre non plus. "

" - Elle a tué deux de nos hommes à elle seule, si j'étais vous, je ne l'approcherais pas comme ça. "

Cette information me revigore. Vraiment ? J'en ai buté deux ? Wow, je m'impressionne. Pour une fois, je tire mon chapeau à l'autre Lana. Bravo, vraiment. Cette poussée de joie me pousse à commettre un geste que je mon corps regrettera sans doute, mais dont je rirais à vie et me rappellerais comme une merveilleuse anecdote. Avec un sourire désarmant aux hommes musclés comme des taureaux, j'ouvre doucement la bouche... Et mord violemment la main de celui qui me retient. Le sang afflue vite et je garde la bouche fermé jusqu'à ce qu'une volée de baffe me fasse la rouvrir. Un bout de peau m'est resté sur la bouche et je le recrache vivement. Beurk. Le sang, pas mon truc. Comment Jack fait-il ? En parlant de lui, j'essaie de redresser la tête pour l'apercevoir, mais évidemment, les quatre hommes choisissent ce moment pour ne plus avoir peur, et ils m'attrapent violemment, m'empêchant de voir l'intérieur de la minuscule pièce. Grr. 

" - Espèce de malade ! "

Le blouseux me fout un coup dans les côtes en m'insultant et je lui souris. 

" - Je vous retourne le compliment, connard. "

Je m'applaudis intérieurement pour mon attitude et ma répartie. Il n'a que ce qu'il mérite. Mon corps a beau me crier de m'arrêter là, sous l'avalanche de coup, j'ignore de mon mieux mes nerfs en feu. 

" - Cinq contre un, c'est pas super fair-play, vous savez ? "

Je ponctue ma phrase d'un rire. Ok, j'ai définitivement l'air d'une folle. Bon, après, c'est déjà l'opinion qu'ils avaient de moi, alors tout ça m'importe peu. L'un des quatre en noir m'attrape les cheveux et me traîne à travers les couloirs vides jusqu'à une salle remplie de chemises de sécurité pour les fous et de chaises roulantes qui immobilisent totalement. Flippant. Une femme arrive alors, lunette et blouse, blonde (une réplique d'Harleen Quinzel, quoi) et me prend doucement la main. Comme les quatre gros me retiennent immobile, je ne peux pas lui faire grand-chose, mais ce n'est pas l'envie qui me manque de lui arracher son petit sourire suffisant. Oh, je sens que je la déteste déjà, celle là. Jane number two, bonjour. 

" - Je vais devoir la déshabiller pour lui passer la camisole de sécurité, après, vous l'assoirez et je la raserai. Ca vous va ? Vous connaissez déjà le chemin de sa chambre de détention ? "

Me raser ? Vraiment ? C'est digne des films, dites-moi. Bien sûr, je n'ai aucune chance de m'échapper alors tout se passe exactement comme elle l'a demandé. On m'enlève lentement mes vêtements. Être nue devant ces gars ne me dérange pas, vu tout ce que j'ai vécu, surtout qu'ils n'ont certainement pas le droit de toucher. Ca me donne juste envie de les narguer. Pourtant, je me tiens tranquille. Ne provoquons pas le diable. On me passe la camisole de force qui entrave mes mouvement, puis on m'assoit sur la chaise, et je sens le rasoir s'occuper de ma magnifique tignasse brune. Ok, c'est peut-être ridicule, mais je suis triste de perdre mes cheveux. Disons que c'est la seule partie de mon corps dont je suis passablement fière. Le reste a beau être jugé enviable par la société, ça ne m'a apporté que de la merde alors... Disons que je n'ai plus grand chose pour apprécier mon corps, maintenant. Lorsque mes cheveux sont tous tombés sur le sol, on m'attache correctement et la chaise se met en route. 

" - Ne t'en fais pas, nous les laissons repousser de quelques centimètres. Nous nous assurons juste qu'ils ne dépassent pas les épaules. "

Je souris et réponds à la psychiatre. Si c'est ce qu'elle est.

" - Oh, merci beaucoup pour ces informations. Pourrais-je avoir l'horaire des repas et des sorties, aussi ? Ce séjour me semble déjà si agréable. "

Pas besoin de préciser que ma voix suinte le sarcasme. J'en rajoute encore une couche, sans la laisser parler.

" - Oh, bien sûr, un plan ne serait pas de refus, pour pouvoir me repérer, et la clochette pour appeler mes serviteurs. Le lit à baldaquins a bien été fait, j'espère ? "

Je finis avec un petit rire sarcastique, mais Harleen n'est pas du tout déstabilisée. Elle marche juste à côté de ma chaise, histoire que je puisse l'avoir dans mon champ de vision. 

" - Je suis désolée, nous ne sommes autorisés à donner aux détenus que le strict minimum. Vous aurez droit à deux repas par jours ainsi qu'une douche toutes les deux semaines. Évidemment, il vous sera interdit de sortir sauf lors de l'horaire établi pour vos éliminations d'alimentation. La mesure d'isolement étant hautement encadrée par une loi stricte, nous ferons de notre mieux pour vous assurer confort et sécurité et dès que je vous jugerai apte à rejoindre le groupe, nous pourrons cesser la mesure. Je vous demanderais donc d'être coopérative et franche avec moi, pour que je puisse vous évaluer correctement et vous aider. Une médication adéquate vous sera administrée une fois par jour lors de l'isolement, et passera à trois, voire quatre fois, si vous vous montrez assez stable pour que nous cessions l'application des mesures. Avez-vous d'autres questions ? "

Je me tais, un peu étonnée par son calme, et carrément alarmée par la notion de médication. 

" - Heu... De... De quels médicaments est-ce que vous parlez ? "

" - De ceux que nous allons vous prescrire. Nous n'avons pas encore effectué de diagnostic précis, mais je dirais que nous pencherons certainement vers des neuroleptiques à activité prolongée, style Fluphénazine, Pipotiazine, Halopéridol, Penfluridol et bien sûr, Benzamide. "

Juste ces noms m'assomment, je n'arrive même pas à imaginer quels effets ils auront sur moi. L'abrutissement, la mort intérieure comme extérieure. 

" - Bien sûr, comment oublier le Benzamide. "

Ma voix est quelque peu tremblotante. J'ai perdu mon assurance, et j'ai peur, affreusement peur. 

" - Ne vous en faîtes pas, nous aurons de nombreuses séances ensemble, et vous aurez aussi une dose d'anti-dépresseurs. Vous vous sentirez bien, je vous le promets. "

Je ris, sur le bord des larmes. Mais bien sûr, je pourrais confier mes craintes à une psychiatre, quoi demander de mieux ! Je ne peux plus nier que je suis folle à lier, mais je refuse d'en parler tranquillement, autour d'une tasse de médocs, à une blonde style Harleen. Ma chaise roulante s'arrête alors devant la porte d'une des nombreuses cellules. Contrairement à ce que je pensais, ce n'est pas exactement comme dans les films. Déjà, ce n'est pas une salle totalement vide et immaculée. Oui, les murs, le sol et le plafond sont faits de coussins qui ont l'air plus ou moins agréables, mais il y a un lit ainsi que des meubles en mousse. Rien qui ne me permette de me blesser, quoi. Je ne pensais vraiment pas me retrouver dans ce genre de situation un jour. Lentement, on détache les sangles de ma chaise et on me laisse seule dans la pièce où il n'y a rien à faire. Je ferais mieux de prendre mes aises, je sens que je vais en passer du temps dans cette petite pièce...

Rencontre avec mes cauchemars [Livre 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant