Celui de droite est suspicieux et celui de gauche veut mon amour

Chapitre cinq.

Après avoir reçu un sms énigmatique de Mickey, qui lui donne rendez-vous à neuf heures à une adresse inconnue, Ian s'est trituré les méninges toute la journée pour essayer de savoir si ce n'était que pour un plan-cul, ou bien pour quelque chose de plus. Il en devient si distrait au travail que Linda le renvoie à la maison en avance et Lip se moque de lui parce qu'il vérifie cinquante-sept fois son portable pour relire le sms. Il ne se monte pas la tête – se convainc de ne pas le faire – jusqu'à ce qu'il arrive à l'adresse et voie ce que Mickey a préparé, et il s'en prend presque les pieds de surprise.

Ils sont sur le toit d'un immeuble abandonné. Il y a une bouteille à moitié vide de Jack Daniel's et un sac chiffonné de burgers et de frites entre eux. Il y a une couverture usée étalée en dessous d'eux. Il n'y a pas de bougies ou de fleurs, bien entendu, mais c'est évident que Mickey a fait beaucoup d'efforts et Ian est tellement charmé qu'il se dit que son bonheur pourrait éclairer toute la ville. Mickey baisse la tête et envoie balader son admiration d'un geste de la main.

Ils fument la beuh pendant un moment, et Mickey dévore sa nourriture comme s'il n'avait pas eu de repas digne de ce nom depuis des années (il n'en a probablement pas eu, en réalité). Ian prend son temps. C'est une médiocre tentative d'étirer cet agréable moment en sa compagnie, pour le faire durer plus longtemps. Il ne veut pas que ça finisse.

Mickey lui jette des coups d'œil à la dérobée toute la nuit, quand il croit qu'Ian ne le voit pas. Il se passe la langue sur les lèvres et les mordille à maintes reprises et allume maladroitement sa cigarette. Il est nerveux à propos de quelque chose.

Ian fait comme s'il ne remarquait rien et attend patiemment que Mickey dise ce qu'il a à dire. Il se repose sur ses coudes et penche la tête en arrière pour regarder le ciel. Sa bouche se fend d'un sourire quand il repense à l'ironie de la situation. Putain, tu veux quoi, étaler une couverture et regarder les étoiles filantes après ?

Mickey prend une respiration audible et Ian pivote du regard. Mickey le regarde droit dans les yeux, déterminé et inébranlable pour la première fois de la soirée. Ses yeux alternent quelques fois, rapidement, entre la bouche d'Ian et ses yeux, et une sensation s'abat dans le creux de son estomac, d'anticipation qui bouillonne en lui.

C'est alors que Mickey se penche vers lui pour l'embrasser. Il presse ses lèvres contre celles d'Ian et elles atterrissent de façon inégale. Il est maladroit, comme s'il n'était pas tout à fait sûr de faire ça bien, comme s'il n'avait jamais embrassé qui que ce soit auparavant, et sa main tremble quand il la pose sur la joue d'Ian. Il ne laisse même pas à Ian le temps de l'embrasser en retour avant de se retirer. Il a l'air de s'embarrasser lui-même, et se retourne, comme s'il s'attend à ce qu'Ian se moque de lui, mais Ian saisit son épaule à la place. « Attends, non, viens, » il murmure, et bascule doucement le menton de Mickey en arrière afin de le rejoindre pour un deuxième essai.

Ian ajuste l'angle cette fois-ci, met suffisamment de pression pour ce ne soit ni trop doux ni trop ferme, et ils tombent naturellement en rythme. La main de Mickey glisse sur sa hanche, la saisissant et la serrant. Ian administre à Mickey un gentil coup de langue dans la commissure de ses lèvres, et Mickey le laisse entrer. Il a un goût de whisky et de gras de fast-food, avec une touche douce-amère de fumée de tabac.

Ils se séparent, étourdis, cherchant les yeux de l'autre, et se penchent à nouveau en même temps.