Je l'ai revu pour la troisième et dernière fois.
Nous sommes sur le balcon, en équilibre sur la rambarde... Le soleil s'est levé avec deux minutes d'avances : nous nous délections du paysage montagnard, magnifié par les lumières dorées et caressé par la brise matinal.
À la lumière du jour, sa chevelure rousse s'auréolait d'un rose bonbon : « Tes cheveux... » Elle a passé sa main pâle à l'intérieur, étirant une mèche rose entre ses ongles livides.
« C'est normal... Au soleil, ils font toujours ça. »
Et puis ses doigts ont frôlé les miens. « De là d'où je viens, il y a ces GdR. Ce sont des livrets qu'on doit apprendre par cœur pour le permis, en gros. Et il y a ce passage sur les embouteillages inter-dimensionnels.
– Les embouteillages... inter-dimensionnels ? »
Un sourire au coin.
« Des humoristes se sont amusés à accompagner l'intégralité des chapitres de trucs marrants... Et là, ils écrivent qu'on doit toujours se tenir à distance des véhicules de devant pour nous donner l'impression qu'on avance alors que ce n'est pas du tout le cas. »
Et elle a pivoté la tête vers moi : « Et ils ont aussi ajouté autre chose... » Un souffle doux effleurait mon cou : si doux que le souvenir de moi, enfant, bercé dans les bras de ma mère, fusait hors des abysses.
« Que le meilleur remède pour ne pas voir le temps passer était d'être à deux. »
Le regard rivé au lointain, peut-être essayais-je de discerner un immeuble désaffecté, six étages, ayant chacun un balcon – dont un où mon portrait-caché redescendrait d'une rambarde glissante ?
« Est-ce qu'on se reverra, après ? »
Elle m'a tendu une paire de lunette de soleil en forme de cœur : « Ce sont les miennes. » Je l'ai remercié, et je les ai enfilés sans tarder. Le paysage se transcendait : de violettes montagnes enneigées s'élevant majestueusement vers le ciel en feu. « Ah ouais. Ce n'est plus la même, là. »
Elle a souri. « Bien sûr que non ! Ce sont mes lunettes, après tout... » Et puis je l'ai entendu me chuchoter : « Ferme les yeux. » J'ai obtempéré, et j'ai senti un parfum sucré chatouiller mes narines : « Ça sent la cerise. »
« La cerise morte ! » Puis je lui ai rappelé qu'elle n'avait toujours pas répondu à ma question : « Alors pose-en moi une autre... »
« Quel est ton vrai nom ? »
Et puis sa douce main squelettique, se refermant sur la mienne... « C'est l'un des plus beaux noms que je n'ai jamais entendu de toute ma vie. »
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DES CHEVEUX ROSES DANS LE VENT
Krótkie OpowiadaniaC'est l'histoire de la Mort qui ne voulait plus être la Mort.