chap.5⏳

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16h28

Lance n'était pas rentré. Pourquoi? Tous les jours il partait à 8h30 et revenait à 15h40. Qu'est ce qu'il se passait? Allan tapa du pied frénétiquement , assis sur une chaise.
Son regard croisait de temps à autre l'horloge de la cuisine , puis se baladait sur les murs défraîchis par l'humidité , et s'arrêtait devant les carottes coupées en rondelles sur la table. La lame brillante à côté des légumes le titillait. Il s'imagina un instant la planter dans la carotide de l'homme , voir son sang gicler sur ces mains et la gueule ouverte, incapable de prononcer un seul mot, accablé par la douleur et la surprise. Cette pensée, Allan l'a chassa immédiatement de son esprit. Il était trop faible. S'il se foirait, c'était la fin. Lance lui donnerait la pire des morts.

16h43

Il tira sur les bandages salis par le sang frais sur ses jambes abîmées. Il s'était traîné jusqu'à l'entrée, et s'était posté devant la porte. Une goutte de sueur perla sur son front. Il s'était passé quelque chose. C'était sûr. Lance ne rentrerait pas. Ou du moins c'est ce qu'Allan se disait pour se rassurer.
Une opportunité comme celle-là, il n'en aurait pas deux. Mais....et si Lance était là? Derrière la porte. Qu'il allait rentrer. Ou bien même si c'était un test? Qu'il le faisait exprès...
Allan baissa la main qu'il avait tendu vers la porte. Il ne pourrait pas courir avec ses blessures. Il était presque à poil. Et la rue était toujours silencieuse , donc la probabilité pour qu'il tombe sur une personne qui puisse le sortir de là était, comment dire, très faible.

17h01

Il colla son front sur le bois de la porte, et ses yeux s'embuèrent.
Il avait tellement envie de partir. Tellement. Tellement. Tellement.
Mais il y avait cette sorte de barrière invisible imposée par sa conscience, elle le paralysait.

17h15

Allan releva subitement la tête. Du bruit? Dehors? Lance ? Non. Une voix féminine. Il se cramponna à la porte pour se mettre debout. Instinctivement ,sa main droite se posa sur la poignée. Un frisson parcouru son corps.
"J'ouvre ?...oh puis j'emmerde ma conscience"
Il ouvrit la porte pour de bon. Il fut aveuglé par la lumière, puis le paysage qui s'offrait à lui devînt moins flou. Il distingua une petite route accidentée dont les marquages avaient quasiment disparus, quelques arbres, un grand sorbier , des cerisiers et des noisetiers , une pelouse dont l'herbe avait jaunie et des nuages noirs, menaçant. Mais pas de femme. Il avait rêvé? Allan s'avança , trébucha , grogna. Il proféra  une montagne d'insultes avant d'utiliser à nouveau la porte pour se soutenir.
Il scruta l'horizon , tourna frénétiquement la tête , plissa les yeux . Non. Il n'y avait personne. Les volets des pavillons aux alentours étaient fermer. Allan sentit son coeur se serrer. Lance pouvait rentrer d'une minute à l'autre. Son temps était compté. Et pourtant il y avait toujours cette barrière invisible. Un blocage émotionnel? Possible. Il s'imaginait déjà la réaction de l'autre fêlé en découvrant que sa victime avait essayé de se barrer après des mois interminables de séquestration.
Allan baissa les yeux , se résigna, préférant ne pas prendre trop de risques. Il se maudissait déjà de ne pas être sorti plus tôt , au moins il aurait pu avoir une chance, aurait atteint l'autre bout de la rue et aurait trouvé de l'aide...

17h30

Allan s'était de nouveau installé sur une chaise dans la cuisine. Finalement il aurait peut être eu une chance. Peut être même qu'il la détenait toujours , cette chance.
Le jeune homme redescendit.
"Oui il faut que je tente."
Il rempa doucement sur le sol.
"De toute façon, si je reste ici je crèverais".
Ses mouvements se firent plus pressants.
"Et puis merde j'en ai plus rien à foutre, il a qu'à m'égorger, m'étriper s'il le veut, je suis plus à ça près!"

Shlac.

Shlac?

La porte s'ouvrit...une silhouette se faufilla sur le seuil de l'entrée, une bassine sous le bras, accompagnée de divers produits chimiques.

-Désolé pour le retard, j'avais quelques trucs à faire.

-Qu'est -ce que , enfin je... mais....

Allan rougit. Son coeur palpita. Il balbutia, puis s'arrêta, embarrassé et incapable de ne pas trébuché sur chaque mot qui sortait de sa bouche.
Lance quant à lui voyait qu'il fixait la bassine.

-Quoi? C'est juste un peu de matos pour notre prochain divertissement, fit l'homme en empoignant un bidon d'acide. D'ailleurs notre nouveau joujou se trouve actuellement dans le coffre de la bagnole!
J'ai eu du mal à le faire rentrer d'ailleurs! , ricana t-il.
Mais ça va valoir le coup , je te le promet , on va bien se marrer !

Lance embrassa le bidon d'acide et fit un clin d'oeil à Allan dont le visage se décomposait , livide.

"Non....pitié...pas ça..."

AllanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant