Alors je suis là, aujourd'hui, 1 an après, à dévorer des yeux, revoyant pour la première fois, la femme que j'aime. Autour d'elle les invités se pressent, aucun d'eux ne paraît s'étonner de son absence, mais je ne dis rien. J'attends dans un coin, seul comme souvent et, après m'avoir embrassé elle ne dit rien, elle repart simplement, comme un papillon, laissant derrière elle une traînée d'amour. Et je le regarde, encore et encore. La soirée se passe trop lentement à mon goût, je ne suis pas à l'aise au milieu de tout ces riches invités, même si je connais bien les lieux.
Des vagues de souvenirs ressurgissent de toute part, ce salon est celui où je l'ai rencontré la toute première fois. Et où je la rencontre à nouveau aujourd'hui. Un salon rouge et gris, d'inspiration moderne, où trône en son centre une grande table de verre. Un salon trop froid, à l'image de la famille Léonard. Je n'éprouve aucune animosité envers cette famille, elle est l'image même de gens qui ont réussi, et ses parents avaient bien laissé faire à Eve ce qu'elle voulait, signe de leur indulgence. Non je dirais que cette famille était victime, entraînée dans une course financière, luttant pour garder son patrimoine, désespérant de voir leur seule héritière prendre une route si différente.
C'est ce qui fait la force de Eve, ce mélange interculturel, cette diversité d'opinion autour d'elle, et en cela je l'admirais particulièrement. Elle avait réussi trouver sa propre pensée, sans jugements, sans cris, dans la douceur de sa force comme dans la franchise de ses émotions.
Pensif, je m'attarde près des photographies familiales, lorsqu'une voix me ramène à la réalité.
-Noé ? La soirée se finit, tu viens ? On monte ?
Je me retourne et,comme par peur de salir cette angélique beauté, la suis de loin, sans la toucher. Les voiles de sa robe se soulèvent à chaque pas. Le blanc lui va bien, elle est magnifique.
La porte de sa chambre se referme derrière moi et je soupire, n'osant rien dire, de peur que, comme dans un cauchemar, cet ange disparaisse. Je suis debout, contre la porte. Eve est en face de moi, elle me regarde, m'interroge de ses prunelles brunes.
Que je l'aime. Mon coeur s'affole.
Alors elle se lève, me prend la main, un ange passe et, un court instant, m'embrasse sur les lèvres.
Les larmes me viennent, notre premier baiser, chétif, maladroit, un rossignol sur une branche n'est pas plus discret.
Je reste un peu plus dans la magie de l'instant, la contemplant silencieusement. Puis je la prends dans mes bras, comme serrant un enfant. Je l'embrasse, la soulève et enfouis ma tête dans ses cheveux. Je la respire, la croque, pleurant en même temps. Je l'adore, je l'aime, à cet instant plus que tout, soulageant le manque d'elle qui m'a poignardé pendant un an. Elle m'a testé, encore une fois, c'est ça façon de faire changer les choses. Peut-être cache t elle au fond un certain manque de confiance ? Je la redecouvre aujourd'hui, fragile, aimante, fière de ma réaction, tant attendue.