Chapitre 3

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   Suite à cette rencontre assez inattendue, j'avais moins de mal à me repérer. Je décidais de me hisser au dessus d'un petit muret pour prendre de la hauteur et ainsi retrouver mes repères, mais il ne m'aida pas énormément. J'avais beau sauter, je n'appercevais pas même la pointe d'un toit. Lorsque j'atteris, mon pied glissa dans la gadoue boueuse, me faisant alors basculer en arrière. Merveilleux, j'étais sale de la tête aux pieds. Je longeais les murs afin de ne pas emprunter deux fois la même route. Mais comme les tâches ne suffisaient pas, sur le chemin, mon pull s'accrocha à un mur épineux et se déchira. Tant pis.

   Une vingtaine de minutes plus tard, j'étais arrivée devant la porte de ma maison. J'appréhendais son ouverture, ma mère était rentrée. La voiture était garée, très mal d'ailleurs, elle écrasait la moitié des plantes. Je commençais à imaginer un scénario qui pouvait m'excuser de mon retard, puis je repensais à mon accoutrement. Tant pis, je m'apprêtais à affronter les foudres de ma mère. Je pris une grande inspiration et posa mon pied sur le seuil d'entrée. Pas de bruit. J'avançais mon autre pied. Rien. Je me dirigeais alors discrètement vers l'étage. Les escaliers grinçaient sans cesse, mais pas le moindre visage d'une mère. Je me trouvais à présent devant une porte, celle de ma chambre. Je n'avais plus qu'à donner l'illusion que je dormais. J'ouvris la porte, heureuse de ne pas avoir été remarquée. Lorsqu'une chaussure m'arriva en pleine figure.

-T'étais où ?!

Cette voix... Elle m'était  presque inconnue, jamais je ne l'avais vu dans un pareil état, pourtant notre relation était plutôt orageuse. Elle avait un soupçon de rage et de tristesse dans sa voix. Elle m'attendait là, dans ma chambre qu'elle avait mise sans dessus dessous et parfumé à l'alcool. 

-Tu vas bien maman...?

-J'ai l'air d'aller bien ?! Cria-t-elle.

Pas vraiment.

-Tu as bu n'est-ce pas ? Demandais-je alors que je connaissais déjà la réponse.

-Et alors ? Je me suis fait un sang d'encre pour toi, j'ai cru qu'il t'était arrivé quelque chose ! Je pensais que tu étais rentrée, mais regarde toi, en plus tu reviens dans un piteux état. Que faisais-tu bon sang ?!

Ce n'était vraiment pas le moment de sortir un mensonge ou de lui reprocher son propre comportement, alors je me contentais de dire le stricte minimum.

-J'avais besoin de prendre l'air.

-Tu crois que j'ai pas envie de prendre l'air moi ?

"Et que fais-tu toute la journée ? Tu ne vas même plus travailler. Chaque jour tu abandonnes la maison et m'y enferme pendant que tu te balades à ta guise dehors." C'est ce que j'ai pensé au fond de moi mais que je n'ai pas osé prononcer haut et fort.

   Ma mère s'empara d'une chaise et la jetta furieusement sur la fenêtre de toutes ses forces. Les bruits cassants du verre cassé résonnèrent dans toute la maison et dans ma tête. Sans rien ajouter elle s'esquiva en silence vers chambre comme si rien de bien démonstratif de son inquiétant état n'était arrivé. Je ne pensais pas une seconde qu'elle aurait pu retrouver son calme si soudainement.

   Je m'allongeais sur mon lit défait. C'était étrange de voir la maison dans cet état, ma mère a toujours été si carrée et pointilleuse sur les moindres détails. Un seul grain de poussière et c'était grand nettoyage de printemps, un seul pli sur le linge et c'était atelier fer à repasser, une seule tâche et c'était la fête de la serpillière.
En songeant à tout cela je commençais à doucement fermer les yeux sans pour autant trouver le sommeil. Je n'avais plus de fenêtre, j'avais froid, mais je finis finalement par lentement tomber de fatigue. On dit que la nuit porte conseil, j'espèrais qu'elle puisse m'aider.

   Le lendemain, je me réveillais aux alentours de 12h, ce qui était une grande première. Habituellement j'étais toujours debout à 6h30 du matin. La maison était d'un silence mortel et étrangement calme suite aux événements d'hier. Je descendais alors vers la cuisine.

-Maman ?

Aucune réponse, elle était souvent absente mais jamais elle ne me laissait sauter un repas.

RainOù les histoires vivent. Découvrez maintenant