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— J'ai fait un rêve le jour où j'ai reçu votre lettre, avoua Noam un peu plus tard. J'étais dans une forêt et je courais après quelque chose.

— Avez-vous attrapé ce que vous poursuiviez ? demanda Myriam.

— Oui.

Le regard de Noam se perdit dans les flammes qui dansaient dans l'âtre.

— Ce n'était pas un légume. Je crois que c'était un lapin. Je ressentais comme une faim. Une faim terrible. Et...

Noam se figea, incapable de poursuivre.

— L'avez-vous dévoré ?

— Non ! Non, Mais... Je sentais la salive dans ma bouche. Je crois que j'allais le faire. C'est alors, que j'ai senti une présence. Je ne voyais rien, mais je savais qu'il y avait un danger. Les rôles se sont alors... comme inversé. Cette chose s'est mise à me pourchasser. Et puis, je me suis rendu compte que je n'étais jamais allé dans une forêt et que je ne pouvais qu'être en train de faire un cauchemar. Lorsque je me suis éveillé, plus rien ne fonctionnait dans ma tour.

Noam se tut et Myriam ajouta une buche dans la cheminée.

— Je ne connais personne à qui cela soit arrivé. De rêver, je veux dire. Et votre colis, avec le livre des trois petits moutons qui rêvent est arrivé le même jour. Vous savez quelque chose à propos de ma tour, n'est-ce pas ?

La bergère lui sourit.

— Je vis moi-même dans une bergerie. Comment saurais-je quoi que ce soit à propos de votre tour ? Mais je m'y connais en moutons. Ils ont besoin de deux choses. De nourriture et de compagnie. Votre rêve a dû perturber l'un de ces deux besoins.

— Saviez-vous que cela m'arriverait ?

— Je savais que vous rêveriez. Bella me l'a dit.

Dans les contes, les moutons parlent, se dit Noam. Pourtant, aujourd'hui aucun d'eux ne semblait doué de parole. Est-elle folle ?

— Vous ne m'avez toujours pas dit ce à quoi rêvait le mouton marron.

Myriam se tourna vers Noam et soutint son regard.

— Selon les versions, le mouton blanc rêve soit de « civilisation », soit de « champignons ». Le noir, quant à lui, rêve de « fortification » ou bien de « fenaison », c'est à dire d'herbe que l'on coupe pour nourrir les animaux. Je n'ai rencontré qu'une seule version qui parlait du rêve du mouton marron. Et cela parlait de « venaison ». C'est-à-dire de la viande des animaux que l'on chasse. Je vous montrerai demain. Pour l'instant, couvrez-vous bien. Les nuits sont froides, à la campagne.

Le songe du mouton marronOù les histoires vivent. Découvrez maintenant