Partie I - Chapitre 1

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J'avais cinq ans lorsque la guerre fut déclarée. J'avais bien grandi depuis,  j'étais devenue une grande femme d'un mètre soixante-quinze, avec des cheveux noirs comme la couleur de la mort qui habitait maintenant ma ville natale. Ma peau était marquée par le soleil brésilien et les nombreuses heures que j'ai passé allongée sur le sable de la plage d'Ubatuba.  J'ai du, il y a longtemps maintenant m'habituer aux nuages et à la pluie parisienne. Je dois avouer que ça a été un certain choc pour moi,  de passer de São-Paulo à Paris ; mais je ne me pleins pas,  j'adore Paris, c'est devenu depuis un certain nombre d'années maintenant ma ville,  et je l'aime. J'habitais dans le treizième arrondissement et je m'y plaisais,  de toute façon je ne passais pas beaucoup de temps dans mon quartier,  je l'occupais seulement pour dormir ;  le reste du temps, je travaillais. Mon travail était, comment dire, un peu particulier ; ce n'est pas le genre de métier dont on peut parler lors d'un premier rendez-vous et encore moins lors d'un repas de famille. Officiellement je travaillais en tant qu'attachée de presse au près du ministre des affaires étrangères ; officieusement,  je travaillais pour le Service des Renseignements Internationaux ; pour faire simple, j'étais une agente secrète, comme James Bond,  mais en femme, et en métisse. J'étais assise dans une brasserie, dans le quinzième arrondissement,  « La Petite Rotonde »,  les serveurs y étaient très aimables et les plats de bonne qualité. J'y allais souvent, entre deux rendez-vous,  avant d'aller au travail,  pendant une pause ... Ce jour là,  je lisais le journal en buvant la même chose que d'habitude : un cappuccino avec un carré de chocolat noir. Tout en dégustant mon déjeuner,  je lisais. C'était l'édition du mardi 24 janvier 2040, les nouvelles étaient toutes les mêmes, pour les civils du moins. D'après le journal, ce mois de janvier était un mois de détente; alors qu'en vrai, en Corée, depuis la réunification, les coréens du sud n'acceptaient toujours pas le régime totalitaire exercé par le dictateur nord-coréen, et depuis, des conflits éclataient sans-cesse, y compris en ce mois de janvier 2040. Mais la Corée n'était pas le seul endroit du globe où la guerre était présente ; alors certes depuis 2040, la France avait eu moins de conflit que la fin d'année précédente ; mais quand bien même, la guerre demeurait toujours. Une fois mon petit-déjeuner fini, je payai et me rendit au travail. J'aimais regarder ma ville lorsque je me promenais, je ne comprenais pas tous ces gens qui portait des lunettes électroniques ; la ville était si belle, il y avait tant à voir ! Quand je fus arrivée à l'angle de la rue, je regardai avec attention les personnes empruntant le SkyTran pour aller au travail. Je dois avouer que c'est une des inventions les plus réussites de ces dernières décennies. Le SkyTran est un rail suspendu à six mètres du sol sur lequel se déplacent à vive allure des capsules contenant une seule personne. Je trouve cela beaucoup mieux que le métro, car on est pas forcé d'être collé à des inconnus. Je l'empruntais quelque fois, le soir lorsque ma journée de travail m'avais épuisé. Je tournis à gauche et passai devant mon salon de coiffure. Je contemplai avec admiration le geste des professionnelles. Je trouvais fascinent la façon dont les coiffeuses prenaient les cheveux et clac les coupaient tous de manière égale. J'admirais ce geste car j'étais incapable de le reproduire, j'étais la femme la moins douée de ses mains que je connaissais -je parle de travaux manuels bien-sûr ; car dans les autres domaines je me débrouille plutôt bien- la dernière fois que j'ai voulu me couper les cheveux,je me suis retrouvée avec une frange qui partait de l'angle gauche de mon front, pour venir se terminer à la hauteur de mon sourcil droit. Inutile de vous dire que depuis ce jour là, je vais dans un salon de coiffure. Je portais les cheveux ni trop long, ni trop court, juste la bonne longueur. Arrivée le long de la route, le vent que généraient les nombreux vélos, se glissait à travers mes cheveux pour venir caresser doucement ma nuque. La brise était fraîche, ce qui me fit frémir et je sentit mes poils se hérisser tout le long de mon coup. J'humai l'air, qui m'entourait, je savourai chaque odeur que je croisais: l'odeur d'une pizza toute juste sortie du four, l'odeur des chappatis du restaurant indien ... Depuis une vingtaine d'année, la ville était devenue plus calme, le maire de Paris avait réduit le nombre de voies pour les voitures, poussant les automobilistes à opter pour un vélo ou pour les autres moyens de transports. Je pense que depuis le début de cette nouvelle année, je n'ai pas vu une seule voiture dans Paris. Je me délectais ce silence, il était reposant, il était tout le l'opposé de ce bruit incessant qui monopolisait les rues de la ville à mon arrivée.


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J'arrivai finalement devant un grand bâtiment qui s'avérait être mon travail. Quand on le regardait, comme ça, il ne payait pas de mine ; il fallait renter et au bout du couloir tourner à gauche. On arrivait dans une pièce qui ressemblait à des toilettes ; mais il suffisait d'appuyer sa main droite sur le côté gauche du grand miroir qui occupait la totalité du mur, pour qu'une fois votre emprunte digitale validé vous puissiez découvrir ce que j'appelais ma caverne d'Ali-Baba. Quand le grand miroir eu finit sa rotation, on pouvait découvrir une grand salle où des glaces faisaient office de murs, ce qui donnait l'impression que la lumière était omniprésente. Le plafond paraissait tellement loin. Lors ce qu'on levait la tête, on pouvait voir une ribambelle d'étages ; je dirais qu'il y en avait une dizaine. Néanmoins, ces derniers laissaient eux aussi place à la lumière, grâce à un magnifique toit de verre, qui reflétait le soleil et servait de lustre à tous le bâtiment secret. Les gens qui y travaillaient semblaient apaisés, sereins, il n'y avait aucune inquiétude sur leur visage. Ils étaient de tout âges et de toutes les ethnies. Au fur et à mesure que je traversait le rez-de-chausser pour me rendre aux escaliers, je saluais les gens, les gens me saluaient, l'agréable ambiance qui régnait me mettait de bonne humeur pour aller travailler. Je montais les marches de l'escalier de verre, puis une fois sur la mezzanine, je pris la huitième porte à gauche et entrai dans mon bureau. Ce dernier était comme tout le bâtiment : blanc - trois murs sur quatre étaient blancs- sauf le dernier, qui était vitré, me permettant d'avoir une des plus belles vue de Paris. Cette pièce était quelconque : un bureau se trouvait tout de suite à droite quand on entrait, dans l'angle gauche du fond de la pièce se trouvait un cactus de taille moyenne qui mettait un peu de couleur dans cette pièce. Sur mon bureau, ne se trouvait rien d'extraordinaire : des dossiers, une lampe, un ordinateur nouvelle génération, des stylos, un bloc note et une photo de ma mère et moi lorsque nous vivions encore au Brésil. C'était la seule photo que j'avais de ma mère, au Brésil nous ne roulions pas sur l'or et il ne s'est passé que très peu de temps avant que ma mère ne m'envoie en France pour échapper à la misère. Non seulement j'y ai échapper ; mais j'ai aussi réussi à échapper à la catastrophe ; la femme qui m'a donné la vie me l'a sauvé, n'est-ce pas poétique ? Mais en me sauvant la vie, elle a perdu la sienne ; je crois qu'au début de ma vie en France je lui en ai voulu, voulu d'être morte, voulu de s'être sacrifiée. Maintenant, c'est fini, je ne ressens plus de haine envers elle ; en fait, je ne ressens plus rien pour elle. C'est triste à dire, mais plus les années passent et moins je me souviens d'elle, moins j'éprouve quelque sentiment pour elle. Je pense que c'est normal qu'avec le temps on oublie, notre cerveau doit faire de la place pour de nouvelles choses. Il y a un temps j'y avait beaucoup réfléchi, au deuil, à la vie, à la mort, à la façon dont on oublie ...


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Soudain un bruit me sortit de ma rêverie. C'était Jessica, ma collège qui travaillait à l'administration ; elle venait de toquer :

« -Salut, Vane j' te dérange pas ?

-Non pas du tout, lui répondis-je en reculant mon fauteuil de mon bureau, qu'est-ce qu'il y a, je suppose que t'es pas venue pour me dire à quel point je suis belle ?

-Tu sais que je t'aime, ma belle, mais c'est pas pour ça, il faudrait que tu ailles à l'étage des chefs, Mme Girard veut te voir.

-Ok, j'y vais, lui répondis-je en  me levant. »

Je sortis du bureau et me dirigeai vers le plus haut des étages.

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