Le ciel est d'une couleur incertaine, et je ne parviens pas à décréter s'il est bleu ou blanc, s'il est vide ou s'il est rempli de nuages cotonneux.
L'astre solaire, lui se fait visible, presque un peu trop : j'ai les yeux plissés, aveuglée par les rayons lumineux.
L'air n'est pas frais, il fait doux pour un mois de septembre, j'en ai profité pour ne pas mettre de veste et simplement mettre mon T-Shirt préféré. Les autres de la classe avaient des vestes légères, parfois en jean, parfois en cuir, parfois en autre chose. Pas moi, et d'ailleurs les gens aiment souvent me traiter de viking, ou d'ours polaire. J'aime bien les ours polaires. C'est mignon. Enfin, les oursons sont mignons. Les femelles sont dangereuses et les mâles.. Les mâles mangent leurs enfants. C'est glauque. Je l'ai lu dans un magazine, il y a longtemps, mais j'avoue que ça m'a marquée. Bref.
On est pas les seuls à avoir eu l'idée de sortir cette après-midi ; des gens marchent dans le parc, des parents avec leurs enfants, des couples, des « jeunes » en groupe, il y a un peu de tout. Nous, on est assis sur un banc. A 4. D'ailleurs, la jeune femme qui passe devant nous est déjà passée deux fois, et je remarque qu'elle s'est détaché les cheveux entre temps.
J'aime bien ce parc. Il est calme, tranquille, et pourtant si plein de vies. Enfin, selon les saisons. Je suis toujours venue ici. Maman m'y emmenait, avant. J'ai continué à y aller. Parfois seule, parfois avec Julie, parfois avec Nat, et maintenant avec les deux L, comme j'ai renommé les jumelles.
J'aime bien ses chênes, ses bouleaux, ses pins, enfin ses arbres quoi. J'aime bien le petit étang qu'il y a. J'aime bien la petite aire de jeux dans laquelle j'ai autrefois si souvent joué. J'aime bien aussi toute l'herbe qu'il y a, j'aime bien le marchand de glace qui s'est installé il y a 3 ans, et surtout je suis intriguée par ce moulin abandonné, que j'observe depuis longtemps sans jamais l'approcher.
-Hé, Amy ? T'es dans les nuages ?
La voix de Luna me tire de mes songeries, et je me tourne vers elle.
-Hein ?
-J'sais pas on te parle, mais j'ai l'impression que tu ne nous écoutes pas.
-C'est pas qu'une impression, me moqué-je gentiment.
-Ah. Tu regardais quoi ?
-Le moulin. J'y suis jamais allée.
-Il y a une première fois à tout .
-Pardon ?
Mais elle ne m'a pas répondu. Elle s'est tournée vers les autres qui ont hoché la tête en un même mouvement. Ils se lèvent, et j'hésite un court temps avant de les imiter.
C'est là que ça me perturbe. Je ne connais Luna que depuis une semaine, et j'ai l'impression qu'on se connaît depuis longtemps, comme j'ai l'impression qu'elle a toujours connu Nat'. Comme si avec elle, le temps n'était pas un obstacle pour le tissage de liens forts. Parce qu'il y a une chose que j'ai compris, Luna n'est pas une amie d'un jour, mais une amie à long terme. D'ailleurs, Julie est un peu jalouse que je passe moins de temps avec elle, mais peut-elle réellement m'en vouloir ?
On se rapproche, on doit à être à quelques dizaines de mètres, je pense, et j'aperçois un panneau jaune. J'ai mauvaise vue, et dois faire quelques pas supplémentaires avant de réussir à lire :
« Propriété abandonnée. Défense d'entrer /!\ »
Mais personne du groupe ne semble avoir envie d'en prendre compte, et je soupire.
Nous y voilà enfin. La peinture autrefois blanche s'écaille, laissant apercevoir les briques abîmées. Il y a des ouvertures rectangulaires, qui devaient être des fenêtres. Au niveau du toit, une espèce de trou, comme si une partie s'était écroulée. , et je frissonne : qu'est ce que je fais ici ? Et par dessus tout, une question me trotte dans l'esprit : pourquoi diable y a-t-il un moulin abandonné ici ? En ville ?
-Amy, je te fais l'honneur de passer en première. Ricane Nat'.
-Va te faire voir, sérieusement.
Mais la curiosité finit par l'emporter, et je m'avance. Je respire un coup, puis pousse la porte de bois moisie. Elle s'ouvre sans problème et une part de moi est déçue. Si elle avait été vérouillée, tout se serait finit ici, point barre.
Je progresse d'un pas dans la vieille bâtisse. Une faible lumière filtre à travers quelques ouvertures. Il y a énormément de poussière et je remercie Dieu de ne pas être allergique. A part ça, la pièce est vide. Il y a seulement un petit escalier en pierre, menant sûrement au grenier contenu sous le toit.
-Encore vivante ?
La voix de Lisa me tire de mes pensées.
-Oui, t'inquiète.
J'entends des bruits de pas et devine que le reste est rentré.
-C'est glauque. Soupire le seul garçon du groupe.
-Mais c'est classe. Rajoute la blonde.
-Bon, on fait quoi, du coup ? Interroge celle qui n'était pas encore intervenue.
-C'est simple. On monte. Proposé-je.
-Tiens, Amy, t'as du courage maintenant ?
-Ouaip.
Et sans un mot de plus, je me dirige vers l'escalier, le cœur battant. Je prie intérieurement pour qu'il ne s'écroule pas. Vous imaginez l'entterrement ? « J'ai le regret de vous annoncer la mort d'Amy Gruber (le nom nul en plus), morte pour avoir monté un escalier ». La honte, j'imagine pas. Remarque, je serai plus vivante pour le voir.. Quoique.. Et si je devenais un fantôme ? Genre Nick-Quasi Sans Tête, mais en Amy-Quasi Sans Cerveau ? Oui, je me vanne moi-même, c'est mon talent.
Bon, trêve de bavardages internes. Je soupire, et commence mon ascension. Un pied après l'autre, une marche suivant l'autre, et me voilà en haut.
-C'est bon j'suis pas morte, vous pouvez monté ! Annoncé-je.
Je balaie l'endroit du regard. La première constation que je fais est que l'air est légèrement plus frais et qu'il y a plus de lumière. J'ai donc atteint le « trou du toit », qui donne une excellente vue sur les nuages.
-Wow. Souffle quelqu'un à ma gauche, Nathanaël.
-Vous avez vu le nuage ? On dirait la tête de Yoshi.
-Ah ouais.
Je souris. J'aime cet endroit, même s'il est glauque.
-Je crois qu'on peut décréter que ceci est notre QG. Décrète Luna.
-Entièrement d'accord. Il nous faut un nom pour le moulin, non ? Dis-je.
-On peut l'appeler juste Le Moulin, t'en penses quoi toi Lisa ?
-Je préfèrerai « Le Moulin aux Nuages ».
-Pas mal. Va pour ça ?
-Oui.
-Donc je nous souhaite la bienvenue au Moulin aux Nuages, ou « MAN » si vous avez la flemme.
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Le Moulin aux Etoiles
RomansL'autre là ; Toujours heureuse. Toujours de bonne humeur. Toujours aimée et aimante Comme si la vie n'avait aucune emprise sur elle Comme si rien ne comptait à part le bonheur, comme si elle ne voyait que ça Comme si il n'y avait aucunes souffrances...