À Anna...

Anna

Anna ! Oh Anna.

Je t'ai vue, aujourd'hui.
Toujours plus rayonnante, 
Toujours plus magnifique.
Toujours avec cet homme...

Et moi, toujours inconnu de tes yeux,
Toujours plus solitaire,
Toujours plus malheureux,
Toujours plus amoureux, Anna.

Le vieux vinyle tourne, tourne, et tourne encore.
Le tourne-disque en se lasse pas.
Il est comme moi : tenace.
Mais fatigué, si fatigué.

J'irais mieux si je pouvais prendre sa place.
La place de celui qui t'embrasse,
Tous les jours.
Sous mes yeux.

Une désespérée jalousie sillonne mon corps, Anna.
Elle gagne chaque jour du terrain, 
Répandant son lent poison...
Et je m'en veux toujours plus.

De ne pas t'avoir approchée,
De t'avoir espionnée,
D'être tombé amoureux,
De t'avoir un jour vue.

Le vieux vinyle tourne, inlassable.
Il est bien plus résistant que moi...
Le savais-tu, Anna ?
C'est ma mère qui me l'a offert.

Maman...
Tu m'as fait penser à elle,
Quand je t'ai croisée la première fois.
Et pourtant, tu es son opposé.

Aussi lumineuse qu'elle était sombre,
Aussi joyeuse qu'elle était taciturne,
Aussi belle qu'elle était disgracieuse,
Aussi aimée de moi que je la détestais.

Elle s'en est allée, tu restes.
Tu resteras pour l'éternité, Anna.
Ne serait-ce que dans mon coeur.
Anna, à jamais avec moi...

Je pose à nouveau ma plume.
Les timbres sont là, tu sais.
Ils attendent.
C'est inutile.

Je t'aime plus que tu ne pourrais l'imaginer.
Plus que tout,
Plus que rien,
Plus que maman.

Ton si dévoué,